AVC du bébé : le repérer chez son enfant


AVC du bébé : une urgence neurologique méconnue
Un accident vasculaire cérébral (AVC) est une obstruction ou une rupture d’un vaisseau dans le cerveau qui entraîne l’arrêt de l’irrigation sanguine - et une privation d’oxygène - dans les zones cérébrales touchées. Cette urgence neurologique, potentiellement fatale, frappe un Français toutes les 4 minutes : hommes, femmes, seniors, jeunes et même bébés.
En effet, si la majorité des AVC touche les adultes, 1% des patients - soit tout de même 1000 cas par an - ont moins de 18 ans. Et ce risque pour les petits est souvent méconnu.
Près de 8 Français sur 10 sous-estiment le nombre de nourrissons et d’enfants qui sont victimes d’un AVC. Selon un sondage réalisé par Odoxa pour la Fondation pour la Recherche sur les AVC, 41% des personnes interrogées pensent que 100 enfants en souffrent, soit dix fois moins que la réalité. 13% déclarent même que “cela n’existe pas”.
Le Dr Lucie Hertz-Pannier, pédiatre et radiologue qui mène des travaux sur le développement des enfants ayant souffert d’un AVC néonatal, reconnaît “On ne peut pas en vouloir aux jeunes parents de ne pas regarder leur enfant en se disant : il va faire un AVC. Ce n’est pas une maladie qu’on associe à l’enfance, surtout chez les tout-petits”.
Le Dr Manoelle Kossorotoff, neuropédiatre à l’hôpital Necker-Enfants malades à Paris et coordinatrice du centre national de référence de l’AVC de l’enfant, avait également prévenu lors de la sortie du sondage en 2018 "Le fait que l’AVC chez les nourrissons et les enfants soit inconnu du grand public mais aussi parfois de la communauté des urgentistes a des conséquences/répercussions graves en termes de diagnostic et de prise en charge de l’enfant à la phase aiguë et pour son parcours de rééducation/récupération post AVC".
Les signes de l’AVC des tout-petits sont, en effet, mal identifiés par le grand public. 78% des Français avouent qu’ils ne reconnaîtraient pas les symptômes de la pathologie chez un nourrisson ou un enfant.
“Dans le cas de l’AVC des bébés, il faut différencier l’AVC du nouveau-né et celui qui survient lorsque l’enfant a plus de 1 mois. Les causes et les symptômes diffèrent”, précise le Dr Lucie Hertz-Pannier.
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AVC du nouveau-né : les signes

La praticienne explique "Les signes de l’AVC du nouveau-né sont particuliers. Il s’agit presque toujours de crises convulsives au cours des 5 premiers jours". Toutefois, les symptômes de convulsion sont parfois difficiles à identifier chez les tout-petits. On peut observer :
- des secousses répétitives d’un seul bras et/ou d’une seule jambe, ou de tout le corps ;
- des mouvements répétitifs du visage, touchant la bouche et les yeux ;
- un regard fixe ;
- une pause respiratoire.
L’accident vasculaire cérébral à cet âge a des signes différents de l’enfant plus grand et de l’adulte, ce qui le rend parfois difficile à repérer.
Les causes
Le Dr Lucie Hertz-Pannier précise “En ce qui concerne les causes de l’AVC du nouveau-né - même si on n’a pas de preuve absolue - beaucoup d’arguments laissent penser que c’est lié à une inflammation du placenta. Un caillot se forme et migre le long du cordon ombilical, entre dans l’organisme du bébé par la circulation sanguine, qui conduit au cœur, puis au cerveau”.
Par ailleurs, les maladies cardiaques congénitales avec une communication intracardiaque favorisant le passage vers le cerveau de caillots, ou une pathologie favorisant la formation de caillots, sont également des facteurs de risque chez le petit enfant.
AVC de l’enfant après la période néonatale

La pédiatre explique “Il y a ensuite deux pics de fréquence : la petite enfance autour de 4-5 ans et l’adolescence ”. Elle poursuit "Contrairement au nouveau-né, la symptomatologie de l’AVC de l’enfant est très semblable à celle des adultes. Il faut agir si on voit que l’enfant a très brutalement une faiblesse (manque de force) d’un côté sans avoir mal, n’arrive plus du tout à parler ou encore un visage très asymétrique".
Les causes
À cet âge, l’AVC survient le plus souvent à cause d’une inflammation de la paroi des vaisseaux du cerveau qui favorise son occlusion. La pédiatre ajoute “La première cause de ces inflammations sont les maladies virales, notamment la varicelle”
Toutefois, pas de panique : l’immense majorité des varicelles ne conduisent pas à ce type de problème de santé. Le Dr Lucie Hertz-Pannier tempère “Parmi les AVC à cet âge-là, les infections virales sont très prédominantes mais l’AVC reste une pathologie rare eu égard à la fréquence de la varicelle”. Aujourd’hui, on ne sait pas pourquoi certains enfants vont développer ce type de réaction à l’infection, alors que la grande majorité va guérir complètement de ces infections banales.
twitter.com/avcenfant/status/995231702522920960
AVC de l'enfant : que faire ?

Selon le sondage de la Fondation pour la Recherche sur les AVC, en moyenne, seulement 20% des parents auraient le réflexe d’appeler le 15 si leur enfant présentait les symptômes d’un AVC.
Dans le détail, ils sont 26% à prendre leur téléphone pour joindre les secours en cas de troubles convulsifs, 22% le feraient en cas de mal de tête brutal et très fort ou bien de faiblesse d’un côté du corps et 20% si l’enfant se mettait à avoir des difficultés à communiquer.
Et pourtant, joindre les secours est bien la réponse à avoir face à ces signes inquiétants. “Si les parents voient les symptômes cités, la bonne attitude est d’appeler le 15”, explique le docteur. Elle ajoute “Lors d’une première crise d’épilepsie, les parents ne se posent pas de question, ils appellent le 15 immédiatement, il faudrait avoir le même réflexe face aux signes de l’AVC”.
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Les conséquences d’un AVC chez l'enfant

Le cerveau des enfants, encore en développement, est plastique. Ainsi, après la survenue d’un AVC, il peut modifier son organisation et se construire autrement. "En moyenne, les enfants vont mieux récupérer sur le plan moteur et du langage que pour un AVC équivalent chez un adulte", explique l’experte.
Toutefois, cet accident neurologique va avoir un impact sur le développement futur de l’enfant, et notamment pour les apprentissages. “ plus les exigences avancent sur le plan cognitif tandis qu’ils grandissent, plus des petites choses se révèleront et pourront gêner l’enfant dans ses apprentissages, ou le mettre en situation de handicap, en fonction de la zone touchée.”
Par exemple, si l’AVC était situé dans la zone du langage, les enfants parleront. Par contre, ils pourront rencontrer en grandissant des difficultés lors d’exercices de compréhension ou de grammaire à l’école.
Si la zone touchée est celle qui commande les mouvements, l’enfant aura une hémiparésie (paralysie cérébrale unilatérale). Contrairement aux adultes, la plupart des petits patients marcheront. Toutefois, ils auront une démarche particulière (marcher sans poser le talon genou un peu fléchi, un bras replié).
La praticienne conclut "La plupart des enfants ont des difficultés, même si elles ne sont pas forcément visibles de prime abord. Toutefois, si on améliore la reconnaissance de ces difficultés, ils pourront parvenir - avec l’aide des parents et des professionnels - à se construire malgré ou avec elles".
Sources
Merci au docteur Lucie Hertz-Pannier, pédiatre et radiologue, et au Dr Manoelle Kossorotoff, neuropédiatre à l’hôpital Necker-Enfants malades à Paris et coordinatrice du centre national de référence de l’AVC de l’enfant, pour leur aide.
Sondage Odoxa pour la Fondation pour la Recherche sur les AVC : Fondation pour la Recherche sur les AVC alerte sur cette maladie qui touche 1 000 enfants chaque année, communiqué 29 octobre 2018.
La Fondation pour la Recherche sur les AVC est la 1ère fondation en France à financer des programmes de recherche dédiés à cette maladie.