Insolite : 9 choses que vous ignorez sur le cerveau

Le cerveau continue de se développer avec l'âge
Difficile d'y croire, mais notre cerveau se développe en permanence. Selon le neuroscientifique français Pierre-Marie Lledo, il abrite "une véritable pouponnière à neurones". Y compris à l'âge adulte.
Loin de décliner avec le nombre d'années, l'organe se remodèle constamment. Une étude publiée dans Science l'a montré : les adultes reconnaissent mieux les visages que les enfants. En fait, l'organe semble faire évoluer ses spécialités au fil du temps.
Vers 45-50 ans, par exemple, la régulation du stress et la compréhension du vocabulaire sont à leur pic. C'est d'ailleurs à cet âge que le cerveau fait son grand ménage de printemps. Tous les neurones de l'hippocampe, qui jouent un rôle clé dans la mémoire, sont alors renouvelés.
Il est possible de vivre avec un seul hémisphère
Cameron Mott, jeune Américaine épileptique, vit avec un seul hémisphère. C'est le résultat d'une intervention chirurgicale réalisée quand elle était âgée de 6 ans. L'opération avait pour objectif de traiter l'épilepsie sévère dont souffrait la fillette. Jusqu'à dix fois par jour, des crises se manifestaient.
Cette chirurgie - appelée hémisphérectomie - est rarement pratiquée, et reste réservée aux cas les plus résistants d'épilepsie, comme le syndrome de Rasmussen dont souffre Cameron Mott. S'il est tout à fait possible de vivre avec un hémisphère en moins, les suites de l'opération sont lourdes.
L'ablation d'un hémisphère entraîne souvent une perte de mouvement, voire de sensation, sur le côté du corps opposé. Des séances de physiothérapie et d'orthophonie sont donc nécessaires, ainsi qu'une surveillance continue. C'est pourquoi l'opération reste relativement rare.
Le cerveau bouge dans l'espace
Voyager dans l'espace, c'est un peu un rêve d'enfant. Mais l'aventure n'est pas sans risque. 34 astronautes qui ont séjourné en orbite nous l'ont appris dans une étude parue en novembre. En apesanteur, le cerveau n'occupe pas la même place dans la boîte crânienne. Ce qui peut poser problème.
L'absence de gravité ne permet pas au cerveau de rester vers le bas du crâne. Cela pourrait expliquer pourquoi, à leur retour sur Terre, une bonne part des astronautes souffrent de migraines et de problèmes oculaires.
Mais ça n'est pas tout. La structure même du cerveau se modifie dans l'espace. Certaines régions occupent un volume différent dans les stations spatiales. C'est le cas du sillon central, qui rétrécit légèrement, et du liquide céphalo-rachidien, qui occupe moins d'espace.
Le cerveau des femmes se repose moins
S'occuper des enfants, de la maison, tout en gérant sa vie professionnelle... Il semblerait que les femmes ne se reposent jamais. Idée reçue ? Pas tout à fait. Car le cerveau féminin ne s'active pas de la même façon que celui des hommes. Et il tend à moins se prélasser.
Cette conclusion émane d'une étude réalisée auprès d'hommes et de femmes en bonne santé, ou atteints de schizophrénie. En comparant les images de leurs cerveaux, des chercheurs de l'université de Montréal (Canada) ont constaté que les zones activées varient beaucoup selon le sexe.
Concrètement, les neurones de ces dames se mettent moins au repos, ce qui pourrait expliquer leur capacité à effectuer plusieurs tâches en même temps. En cas de schizophrénie, par contre, cette particularité ne s'observe pas. Le niveau de testostérone, accru chez les malades de sexe féminin, pourrait expliquer cela.
Le cerveau vieillit différemment selon le sexe
Notre cerveau ne vieillit pas de la même façon selon qu'on est un homme ou une femme. Cela peut sembler surprenant, mais c'est ce qu'ont observé des chercheurs du CNRS, 3 000 IRM à l'appui. Réalisées aux différents âges, de quelques mois à 90 ans, elles révèlent de vraies différences entre les sexes.
Dans l'ensemble, le volume de la matière grise progresse jusqu'à 30-40 ans puis commence à régresser. Mais les femmes atteignent la maturité plus tôt que leurs congénères masculins. Et elles restent avantagées après 80 ans. Passé cet âge, l'atrophie s'accélère plus chez les hommes. Un résultat qui peut sembler paradoxal, dans la mesure où la maladie d'Alzheimer touche plus de femmes.
Le "câblage" du cerveau lui-même serait différent. Là où ces messieurs possèdent plus de matière blanche - qui connecte surtout les régions de l'encéphale -, ces dames sont mieux dotées en matière grise. Les liaisons sont elles aussi variables selon le sexe. Les cerveaux féminins privilégient les connexions entre les hémisphères, tandis que les masculins favorisent les liaisons d'avant en arrière.
30 neurones sont chargés de réguler la douleur
Le nombre semble ridicule au vu de la tâche qu'ils assument. Et pourtant, à eux seuls, 30 neurones se chargent de la gestion de la douleur. Tous situés dans l'hypothalamus, ils coordonnent la production de l'ocytocine, cette hormone qui aide à moins souffrir.
Ce mini "centre de contrôle" a été découvert par des chercheurs du CNRS. Par exemple, lorsqu'on se pince fort, l'information est remontée jusuq'au cerveau par les nerfs périphériques et les neurones de la moelle épinière.
Les 30 neurones décrits par l'équipe française interprètent le message et activent d'autres neurones. Ce sont ces derniers qui déclenchent la libération d'ocytocine qui apaise les neurones périphériques.
Le cerveau compte près de 100 milliards de neurones
Environ 100 milliards de neurones constituent le cerveau. Ils sont capables d'établir jusqu'à 10 000 connexions chacuns. Mais ces cellules ne représentent rien à côté des cellules gliales. Elles sont 10 à 50 fois plus nombreuses.
Ces cellules jouent un rôle essentiel dans le fonctionnement du cerveau. Situées dans le système nerveux, elles fournissent les nutriments aux neurones et éliminent leurs déchets. Elles sont aussi nécessaires à la production de myéline, qui isole les fibres nerveuses et favorise la transmission des signaux électriques.
Mais les cellules gliales établissent elles aussi des connexions. Elles pourraient donc participer à la vitesse de réflexion. On a, par exemple, appris que le cerveau d'Einstein en contenait beaucoup. Autant dire que notre organe est bien protégé...
Les neurones sont les cellules les plus longues du corps humain
Une cellule, c'est forcément petit. On pourrait le penser en se souvenant de ses premiers cours de biologie. Mais certaines cellules peuvent être très longues. C'est le cas des neurones, les plus longues cellules du corps humain. Entre le cerveau et la moelle épinière, 90 cm peuvent être parcourus.
Cela ne doit rien au hasard. L'axone, qui constitue le prolongement du neurone, peut parcourir de longues distances pour transmettre son message. Le mouvement des orteils, par exemple, est contrôlé par des neurones partant de la moelle épinière pour atteindre le bout du pied. Un long chemin.
Ce parcours est essentiel à de nombreuses fonctions de l'organisme. Les axones jouent, en quelque sorte, le rôle de ligne électrique. Ils permettent donc de mener à bien la transmission et l'interprétation des différents messages sous formes de signaux électriques.
L'alcool met 6 minutes à monter à la tête
Pour certains, ce sont les bulles, pour d'autres les alcools forts. Chacun prétend connaître une boisson qui lui "monte à la tête" plus vite que les autres. En réalité, les substances alcoolisées mettent exactement 6 minutes à atteindre le cerveau.
C'est ce qu'a révélé une petite étude réalisée en Allemagne. Ses chercheurs ont fait boire à 15 volontaires une quantité précise d'alcool, à la paille. Ils ont ingéré l'équivalent de trois verres de bière ou deux verres de vin (soit une alcoolémie de 0.05%). Les cellules cérébrales mettent 6 minutes à réagir à cet apport alcoolisé.
Dès lors, quelques changements surviennent. Les neurones, notamment, sont plus vulnérables aux attaques. Des effets qui sont, toutefois, réversibles.
Sources
"Microstructural proliferation in human cortex is coupled with the development of face processing", Jesse Gomez et al, Science 06 Jan 2017: Vol. 355, Issue 6320, pp. 68-71
Pierre-Marie Lledo, Des cerveaux à neurones ajoutés
DOCS: Extraordinary People - Living With Half A Brain, Barcroft TV
Hémisphérectomie, Epilepsie France
"Effects of Spaceflight on Astronaut Brain Structure as Indicated on MRI", Donna R. Roberts, N Engl J Med 2017; 377:1746-1753
"Disturbed sexual dimorphism of brain activation during mental rotation in schizophrenia", José A. Jiménez, Schizophrenia Research
"Towards a unified analysis of brain maturation and aging across the entire lifespan : A MRI analysis", Pierrick Coupé et al, Human Brain Mapping, Novembre 2017.
"Sex differences in the structural connectome of the human brain", Madhura Ingalhalikar et al, PNAS
"A New Population of Parvocellular Oxytocin Neurons Controlling Magnocellular Neuron Activity and Inflammatory Pain Processing", Marina Eliava, Neuron
Le cerveau, université McGill
"Des cerveaux à neurones ajoutés0", Armin Biller et al, Journal of Cerebral Blood Flow & Metabolism