Les aliments à ne pas manger crus

Publié par Audrey Vaugrente
le 9/03/2018
Maj le
6 minutes
steak haché
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Bactéries, virus, parasite… Nos aliments sont parfois colonisés par des micro-organismes. Pour ne pas vous faire avoir, voici les aliments qu'il faut mieux faire cuire avant de les déguster.

Du champ, à l'assiette, sans passer par la poêle. La mode est au crudivorisme – aussi appelé raw-foodisme. Mais attention à ne pas commettre d'erreur, lors de cette transition. Car tous les aliments ne peuvent pas être mangés crus.

Certains sont toxiques, d'autres véhiculent des micro-organismes néfastes pour notre santé. Afin de vous éviter les faux pas, E-Santé a fait le point avec le Dr Arnaud Cocaul, médecin nutritionniste à Paris.

La viande (surtout hachée)

Consommer de la viande  crue, c'est prendre un risque réel. En 2015, 388 alertes de toxi-infections alimentaires étaient dues à la viande de boucherie et 72 à de la volaille, d'après l'Agence nationale de sécurité sanitaire. Salmonelles, E. coli, Campylobacter… les coupables sont nombreux.

"Si vous préparez un tartare ou un carpaccio, vous êtes plus exposés à une contamination bactérienne", résume le Dr Arnaud Cocaul. Un exemple qui n'est pas dû au hasard. 

En pénétrant une première fois la chair, la lame du couteau récolte les bactéries qui l'ont contaminée. Plus la viande est hachée, plus les germes seront donc disséminés. Ça n'est pas pour rien que le bœuf haché est la deuxième source d'intoxications alimentaires.

Certaines viandes s'accompagnent de risques plus spécifiques. Ainsi, la volaille sera plus souvent porteuse de salmonelles tandis que le porc abritera plus fréquemment le Taenia solium – aussi appelé ver solitaire.

Comment bien faire cuire : La clé de la prévention consiste à faire cuire à cœur les aliments carnés que vous consommez. Une cuisson rosée ne suffira pas à vous débarrasser d'éventuels microbes ou parasites.

Pour les viandes hachées, le porc et les rôtis, une cuisson supérieure à 71 °C permettra d'éliminer la plupart des bactéries. Dindes et poulets demandent au moins 85 °C de cuisson. Les farces, saucisses fumées et plats à base d'œufs se contenteront de 74 °C.

Le poisson

Sushi, sashimi et autres chirashi ont beaucoup de succès auprès des Français.e.s. Mais ces plats japonais ne sont pas sans risque. Comme les viandes, les poissons  peuvent abriter des Listeria et même des salmonelles.

Mais un ver se montre particulièrement retors : l'anisakis, présent dans de nombreux poissons. Ce petit parasite, lorsqu'il infecte l'être humain, provoque des symptômes digestifs mais aussi des allergies allant jusqu'au choc anaphylactique.

"Il n'est pas interdit de manger cru, mais il faut être conscient du risque de toxi-infection", explique le Dr Cocaul. Limiter les risques est possible, en congelant la viande avant de la manger crue.

A noter que le fugu, particulièrement apprécié au Japon, est toxique lorsqu'il est mal préparé, surtout cru. Les organes de ce poisson abritent de la tétrodotoxine, un poison violent sans antidote qui peut paralyser les nerfs moteurs. Il doit donc être soigneusement préparé.

Comment bien faire cuire : La meilleure solution reste la cuisson du poisson. "Les germes sont sensibles à la température, donc en faisant cuire le risque de contamination bactérienne est moindre", confirme le nutritionniste.

Cuire la chair à cœur, au moins une minute à 60 °C est recommandé. A l'arête, elle ne doit pas être rose.

Les œufs

C'est bien connu, il vaut mieux éviter de gober ses œufs  directement sortis de leur coquille. Ce geste, particulièrement répandu chez les sportifs, n'est pas vraiment sûr… Avec la volaille, les œufs figurent parmi les produits les plus souvent contaminés par la salmonelle.

Afin de limiter les risques, il est conseillé de ne pas utiliser d'œufs fêlés ou souillés par des excréments, mais aussi de ne jamais les laver. L'eau les rendra poreux. Pour ce qui est des plats ne nécessitant pas de cuisson – comme une mousse au chocolat ou une mayonnaise –, ils doivent être ingérés dans les 24 heures suivant leur préparation.

A noter que seule la cuisson d'un œuf dur permet d'éliminer totalement le risque de contamination. "Certaines personnes sont plus à risque, souligne Arnaud Cocaul. Les femmes enceintes, les personnes immunodéprimées, âgées ou qui sortent d'opération et les jeunes enfants devraient plutôt cuire leurs aliments car les contaminations auront des effets plus sévères."

Les produits laitiers au lait cru

A l'ère de la pasteurisation, difficile de trouver un produit laitier à base de lait cru. Si cela peut nuire à la tradition fromagère française, cette préparation a aussi son intérêt pour la sécurité sanitaire.

"Les fromages au lait cru peuvent être des sources de contamination potentielle", indique le Dr Arnaud Cocaul. Il n'est, en effet, pas rare qu'un rappel de produits soit effectué à cause de la présence d'E. coli, de salmonelles ou de Campylobacter.

A l'exception des fromages à pâte pressée – comme le gruyère ou le comté –, l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) conseille donc aux personnes vulnérables d'en éviter la consommation. De même, les repas et les biberons de lait des nourrissons ne doivent pas être stockés plus de 48 heures au frigo, à 4 °C maximum.

Certains légumes toxiques

Un grand nombre de légumes peuvent être consommés crus. Mais pas la totalité. Et pour cause : certains contiennent des molécules toxiques, qui ne sont dégradées que par la cuisson.

Les racines de manioc, par exemple, contiennent de la linamarine qui peut se transformer en cyanure – un poison mortel. La cuisson dans de l'eau, sur une période prolongée, permet d'en réduire la teneur.

Mais des légumes très utilisés peuvent aussi abriter des composés toxiques. La pomme de terre, l'aubergine et le pédoncule des tomates abritent ainsi de la solanine, légèrement toxique. Une ingestion excessive peut provoquer fièvre, vomissements, voire détresse respiratoire. Heureusement, il faudrait 96 kg de pommes de terre pour mettre en danger une personne de 60 kg.

De même, les épinards, rhubarbe et betterave doivent être cuits avant leur dégustation. L'acide oxalique qu'ils contiennent est soupçonné de bloquer l'absorption de magnésium et de fer par l'organisme. Il est également dangereux pour les personnes souffrant d'insuffisance rénale ou de calculs rénaux.

Enfin, certaines courges sont toxiques crues. Un moyen simple permet de les distinguer : si leur goût est neutre et légèrement sucré, elles peuvent être mangées. Sinon, les cuire est impératif.

Les crudités : à bien nettoyer

Les salades de crudités rencontrent généralement un grand succès auprès des adeptes de régime minceur ou tout au long de l'été. Mais les légumes peuvent aussi véhiculer des bactéries, qui les ont contaminés dans le potager.

E. coli, Yersinia enterocolitica, Clostridium botulinum… Toutes les bactéries provenant des intestins des animaux peuvent être présentes. "En 2011, des graines germées de fenugrec étaient porteuses d'E. coli et ont provoqué plusieurs décès", indique le nutritionniste.

Eplucher les légumes peut aider, mais il faut aussi les laver à grande eau, systématiquement. "En rajoutant du vinaigre ou du citron, vous commencez à cuire le légume par une action chimique", ajoute le Dr Arnaud Cocaul.

Les crudités peuvent aussi être source d'inconfort et de ballonnements quand ils sont digérés. "Quand on mange cru, il faut mastiquer davantage pour broyer les fibres des fruits et légumes, conseille le nutritionniste. Il faut commencer la digestion dans la bouche, en mastiquant longtemps."

Ce travail prépare les intestins, qui a besoin de plus d'énergie pour digérer les aliments crus. Un repas durant, au minimum, 20 minutes, il faut donner au moins 12 coups de dents avant d'avaler le légume cru. Ne pas le faire risque de provoquer des ballonnements.

Sources

Place des alertes alimentaires et des toxi-infections alimentaires collectives dans la surveillance de la chaîne alimentaire, Agence nationale de sécurité sanitaire, consulté le 9 mars 2018

Fiche "Salmonellose" de l'Anses, consulté le 9 mars 2018

Fiche "Hygiène domestique" de l'Anses, consulté le 9 mars 2018

Fruits et légumes : peuvent-ils être dangereux ?, Mathieu Pasquier, Fabrice Dami et Bertrand Yersin, Revue Médicale Suisse, 2013

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