L’exposition aux produits chimiques PFAS déclencherait la ménopause plus tôt

Les Françaises sont ménopausées en moyenne à 51 ans. Mais l’arrivée de ce processus physiologique naturel varie d’une femme à l’autre. Et un des facteurs de cette variation pourrait être l’exposition à des substances chimiques, selon une étude américaine parue dans la revue scientifique Journal of Clinical Endocrinology & Metabolism.
Ménopause : un taux élevé de PFAS veillerait les ovaires
Des chercheurs américains, menés par le Dr Ning Ding de l’école de santé publique de l’université du Michigan, ont découvert que les femmes ayant des taux élevées de substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS pour per- and polyfluoroalkyl substances, nom anglais des molécules) entraient en ménopause deux ans plus tôt que les autres.
Pour parvenir à cette conclusion, la scientifique et son équipe ont analysé les dossiers et les échantillons de sang de 1120 femmes âgées entre 45 et 56 ans ayant participé à une étude épidémiologique longitudinale sur 17 ans.
Ils remarquent que l’effet de ces produits chimiques présents dans de nombreux objets du quotidien comme les emballages alimentaires, les tissus antitâches et certains insecticides sur le corps des femmes est plus important que celui du tabac. En effet, les participantes fumeuses avaient leur ménopause 1,1 an plus tôt que celles qui n’ont jamais fumé.
Ainsi, si les causes de la ménopause précoce ne sont pas entièrement comprises actuellement, les travaux des chercheurs suggèrent que l’environnement jouerait un rôle dans le vieillissement des ovaires.
La chercheuse auteure principale met en garde "les PFAS sont partout. Une fois entrés dans le corps, ils ne se décomposent pas et s'accumulent avec le temps. En raison de leur persistance chez l'homme et de leurs effets potentiellement néfastes sur la fonction ovarienne, il est important de sensibiliser à ce problème et de réduire l'exposition à ces produits chimiques".
Une ménopause précoce qui peut avoir des conséquences
Être ménopausée à 49 ans au lieu de 51 ans… cela pourrait paraître anecdotique pour certains, mais cela n’est pas sans conséquence sur la santé des femmes. Comme l’explique le professeur Sung Kyun Park de l’école de santé publique de l’université du Michigan explique "Même la ménopause quelques années plus tôt que d'habitude peut avoir un impact significatif sur la santé cardiovasculaire et osseuse, la qualité de vie et la santé globale des femmes".
En effet, à la ménopause les femmes font face à des risques cardiovasculaires plus importants. Cette hausse s’observe, car elles ne peuvent plus compter sur la protection de certaines hormones comme les œstrogènes. Ces dernières bloquent le mauvais cholestérol et favorisent le bon cholestérol.
À la disparition des œstrogènes, les femmes ont des risques similaires aux hommes face aux maladies du cœur.
Par ailleurs, l’interruption de la sécrétion des hormones ovariennes fragilise les os et augmente la menace de l’ostéoporose. Les femmes ménopausées ont ainsi un risque plus grand de souffrir de fractures. Les scientifiques précisent que plus la ménopause survient tôt, plus le risque d'ostéoporose augmente.
Les PFAS : qu’est-ce-que ?

L'acronyme PFAS signifie per- and polyfluoroalkyl substances (ou en français : substances per- et polyfluoroalkylées). Ces composés chimiques de synthèse couramment utilisés se révèlent être des polluants environnementaux.
Selon l'OCDE, il existe au moins 4730 sortes différentes. On les retrouve entre autres dans les boîtes de pizza, les emballages alimentaires, les textiles tels que les revêtements de canapés, les tapis et les vêtements imperméables, les revêtements anti-adhésifs des poêles...
Très stables, les PFAS ne se décomposent pas à l’air, la lumière ou dans l’eau. Ils peuvent ainsi s’accumuler dans l’environnement et les organismes vivants.
Le Programme national de biosurveillance Esteban réalisé sur les années 2014-2016 que 100% des 744 adultes et 249 enfants (de 6 à 17 ans) présentaient des traces de PFOA et de PFOS (les deux agents de la famille des PFAS les plus connus) dans leur sang.
Composés perfluorés: des risques pour la santé
Les composés perfluorés sont connus pour être des perturbateurs endocriniens importants. L’agence américaine de protection de l’environnement explique sur son site "Les PFAS restent dans le corps humain pendant de longues périodes. Par conséquent, au fur et à mesure que les gens sont exposés à différentes sources, le niveau de PFAS dans leur corps peut augmenter au point où ils souffrent d'effets néfastes sur la santé".
Elle ajoute "des études indiquent que le PFOA et le PFOS peuvent avoir des effets sur la reproduction, le développement, le foie, les reins et le système immunitaire chez les animaux de laboratoire. Les deux produits chimiques ont provoqué des tumeurs dans les études animales".
Des études épidémiologiques ont également trouvé une corrélation entre taux élevé de PFAS et une hausse des risques de cancers du rein et des testicules, de l'hypothyroïdie, de cholestérol élevé, de la colite ulcéreuse. Ces substances chimiques seraient aussi liées à un faible poids à la naissance, à l'obésité, à une réduction de la réponse aux vaccins ainsi qu'à des niveaux hormonaux réduits et une puberté retardée.
Quels sont les symptômes de la ménopause ?

La ménopause survient généralement entre 45 et 55 ans. Si le signe le plus marquant de ce processus physiologique est l’arrêt des règles, les femmes font aussi face à d’autres symptômes :
- Les bouffées de chaleur : elles sont constatées chez la majorité des femmes et persistent plus de 5 ans chez une patiente ménopausée sur 2, et plus de 10 ans pour une sur 4.
- La sécheresse vaginale.
- Les sueurs nocturnes.
- La fatigue.
- Une irritabilité.
- Des maux de têtes.
- Des douleurs articulaires.
Pour réduire les symptômes, il est possible de prendre un traitement hormonal substitutif (THS) de la ménopause composé d’œstrogène et de progestatif. Les patientes voient leurs bouffées de chaleur et leur sécheresse vaginale réduites. Par ailleurs, il permet de prévenir la perte osseuse.
Les femmes qui souhaitent éviter de prendre des hormones, peuvent limiter les bouffées de chaleur grâce à l'homéopathie ou encore des plantes comme le houblon, la cimicifuga ou actée à grappes noires.
Sources
Study finds PFAS exposure may cause early menopause in women, Endocrine Society, 3 juin 2020
Associations of Perfluoroalkyl Substances with Incident Natural Menopause: the Study of Women’s Health Across the Nation, JCEM, 3 juin 2020
Imprégnation de la population française par les composés perfluorés : Programme national de biosurveillance, Esteban 2014-2016, Santé Publique France, 24 janvier 2020