Hallux valgus : peut-on se débarrasser d'un oignon au pied ?

Renoncer à une paire d'escarpins trop douloureux, c'est le quotidien de nombreuses femmes. Mais pour certaines, ça n'est pas seulement une question de confort. C'est aussi une affaire de santé du pied. En cause : l'hallux valgus, plus connu sous le nom d'oignon du pied.

Cette pathologie, qui se caractérise par une déformation de l'articulation du gros orteil, touche majoritairement les femmes (90-95 %), et concernerait jusqu'à 30 % des personnes âgées. Mais comment s'en débarrasser ?

Une pathologie qui dégénère

Venir à bout d'un hallux valgus n'est, à l'heure actuelle, pas possible. Il s'agit, en effet, d'une pathologie évolutive et dégénérative, particulièrement si elle n'est pas traitée. Outre la déformation de l'articulation, ce trouble peut provoquer une douleur.

En l'absence de prise en charge, les symptômes s'aggravent donc. Des troubles associés peuvent aussi survenir. "Une forme d'arthrose dégénérative et inflammatoire se développe", indique Daniel Benjamin, podologue.

"Lorsque l'orteil est trop déformé, cela peut provoquer des lésions aux petits orteils et créer des douleurs plantaires", ajoute le Dr Jean-Yves Coillard, président de l'Association française de chirurgie du pied (AFCP).

Des solutions existent

Dès l'apparition de l'hallux valgus, il est toutefois possible de mettre en place une prise en charge. Plusieurs professionnel.le.s sont alors impliqués : médecin généraliste, podologue, voire chirurgien.ne dans les cas les plus sévères.

Le traitement a un objectif principal : soulager la douleur, et freiner l'évolution de la déformation du gros orteil. Il est donc important de consulter, car l'hallux valgus n'est pas seulement un problème esthétique.

Le problème, c'est que "généralement, ce sont les personnes qui ont mal qui vont en consultation, auprès du médecin généraliste, qui les dirige vers un podologue…" reconnaît Daniel Benjamin. Et ce symptôme peut se produire à un stade très avancé de la pathologie.

Porter les bonnes chaussures

La première chose à faire, quand un oignon au pied se déclare, ne nécessite pas d'avis médical. "Les patientes le font spontanément, précise Daniel Benjamin. Les femmes abandonnent les talons hauts et choisissent plutôt des chaussures à bout rond. Pour les hommes, le problème se pose moins."

De fait, les talons très hauts ont tendance à provoquer une douleur et aggravent la déformation du gros orteil. Ils sont un facteur d'aggravation bien identifié.

Il est donc recommandé de privilégier les talons de moins de 5 centimètres, des chaussures pas trop étroites et à bout rond. Un geste suffisant, dans un premier temps. "Grâce à cela, un moment s'écoule avant que la première consultation n'ait lieu", confirme le podologue.

Les exercices à faire chaque jour

Afin de limiter le handicap que peut provoquer l'hallux valgus, et notamment l'arthrose, quelques exercices sont recommandés au quotidien. Ils sont d'autant plus nécessaires si l'inflammation revient régulièrement.

En effet, ces gestes quotidiens permettront de conserver la mobilité de l'articulation du gros orteil. "On peut, par exemple, mobiliser le gros orteil de bas en haut avec sa main, ou placer une feuille de papier au sol et la ramener vers soi avec ses orteils", conseille Daniel Benjamin.

Si cela ne ralentit pas forcément la déformation de l'os, il est possible de limiter les répercussions du trouble au quotidien.

En cas de douleur, consulter le médecin

Mais face à l'hallux valgus, nous ne sommes pas égaux. "Certaines personnes n'auront presque aucune douleur, alors que d'autres auront du mal à marcher et beaucoup de crises inflammatoires", admet Daniel Benjamin, podologue.

Dans ce dernier cas, une consultation médicale peut s'avérer très utile. Les poussées inflammatoires qui caractérisent la pathologie peuvent être calmées par des médicaments, les anti-inflammatoires.

"Les médecins ont tendance à prescrire ces médicaments pour calmer la douleur, lors des phases de poussées", explique le spécialiste. Mais cela suffira rarement à long terme : il faut aussi passer par le cabinet du podologue.

Semelles orthopédiques ou orthèse sur mesure ?

Sans aller jusqu'à "guérir" l'hallux valgus, plusieurs types d'appareillages peuvent améliorer le confort de la marche et soulager la douleur. Cela vaut particulièrement si la déformation n'est pas trop prononcée.

La prise en charge se compose de deux étapes. D'abord, la semelle orthopédique. "Elle va répartir les appuis et les charges de manière plus correcte, ce qui limite l'impact de l'hallux valgus", souligne Daniel Benjamin. Particulièrement lorsque le pied est excessivement plat.

En effet, la déformation provoquée par l'oignon au pied modifie la façon dont le pied s'appuie sur le sol, ce qui peut entretenir la pathologie. "On peut rompre le cercle vicieux avec les semelles, pour ralentir la déformation à moyen et long terme", résume le podologue.

L'autre option, ce sont les orthèses d'orteils, ou orthoplasties. Elles sont fabriquées par le podologue sur mesure. "L'appareillage est moulé sur l'orteil touché, indique le spécialiste. L'objectif est de le protéger du frottement dans les chaussures et de corriger la déformation autant que possible."

Des orthèses sont aussi disponibles en pharmacie et promettent de redresser l'orteil pendant la nuit. Mais les résultats d'un tel dispositif sont inégaux.

La chirurgie, une solution de dernier recours

En dernier recours, les patient.e.s peuvent accéder à une chirurgie. Les conditions d'accès sont toutefois limitées, car l'intervention est lourde. Elle ne se limite donc pas à corriger un problème esthétique.

"C'est une chirurgie de traitement : on opère la déformation chez quelqu'un qui souffre, si le trouble a un retentissement sur la vie quotidienne", confirme le Dr Jean-Yves Coillard. En termes d'âge, par contre, les chirurgiens se montrent plus souples.

L'intervention est possible dès que la croissance s'est achevée et peut être proposée aux personnes âgées, tant que celles-ci ne souffrent pas de troubles de l'équilibre.

"On se contente d'adapter le traitement à l'évolution de l'hallux valgus et à l'âge du patient, explique le président de l'AFCP. Pour une personne âgée, par exemple, on privilégiera une intervention qui permet une prise d'appui immédiate."

Mais en quoi consiste-t-elle ? Comme toute chirurgie orthopédique, elle se révèle assez lourde pour l'articulation. Une fracture est volontairement provoquée pour ré-aligner le pouce du pied. "C'est un peu comme pour un mur dont on referait les fondations", illustre le spécialiste.

Un arrêt maladie d'au moins un mois est donc nécessaire, mais il peut aller jusqu'à 56 jours selon l'activité professionnelle du patient ou de la patiente. "Cela dépend du temps nécessaire pour cicatriser et consolider", résume le chirurgien.

Cette intervention est la seule manière de venir à bout d'un hallux valgus, et elle est censée être définitive. "Le but, c'est qu'on n'y revienne pas, tranche le Dr Coillard. Mais il est possible qu'une récidive se produise, surtout en cas d'hyperlaxité."