Endométriose : les traitements... et leur efficacité !

Publié par Audrey Vaugrente
le 16/05/2018
Maj le
5 minutes
uterus with ovaries and doctor doctor in white medical lab coat with stethoscope around his neck shows and indicates to the patient on uterus concept photo for use as teaching subject for patient
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De fortes douleurs, surtout pendant les règles. Voilà le symptôme le plus connu de l'endométriose. On devrait plutôt parler au pluriel de cette maladie, car chaque femme présente une forme spécifique. Et les traitements doivent s'y adapter. Explications.

De ses causes, on ne sait rien. Identifier correctement ses symptômes est à peu près aussi compliqué. L'endométriose est une maladie gynécologique ancienne, mais encore mal connue. Une chose est certaine : en l'absence de traitement, de nombreuses patientes souffrent le martyr.

La faute revient à un phénomène qui se produit lors des règles. En temps normal, la paroi de l'utérus (l'endomètre) se dégrade et est évacuée sous forme de sang menstruel. Mais chez les personnes souffrant d'endométriose, ce tissu remonte et se fixe sur d'autres organes, provoquant des douleurs. Le plus souvent, ce sont elles qui sont ciblées par les traitements.

Une prise en charge au cas par cas

En fonction de chaque patiente, la maladie va se manifester d'une manière différente. "Certaines femmes souffrent d'endométriose sans en développer les symptômes, mais on peut aussi observer des signes suspects en l'absence de la maladie", souligne Xavier Fritel, gynécologue-obstétricien au CHU de Poitiers (Vienne). Bref, le mal est complexe et nécessite une prise en charge sur mesure.

Plusieurs options thérapeutiques sont possibles, mais celles-ci s'adaptent surtout à la souffrance de la patiente et à ses attentes à long terme. Aux yeux du Pr Fritel, impossible d'établir une règle absolue.

Face à l'endométriose, "le traitement se fait en fonction de la sévérité de la maladie, de l'ampleur des lésions, des attentes de la femme mais aussi de ses antécédents", liste le spécialiste de l'endométriose.

Le choix thérapeutique est donc le fruit d'une réelle réflexion entre le médecin et la patiente, qui fixent ensemble les priorités. "Chaque traitement a des conséquences, il faut donc faire des choix", résume le gynécologue.

La contraception hormonale

La contraception hormonale est le premier traitement testé face à une endométriose  se manifestant uniquement en période menstruelle. "Tous les traitements hormonaux qui permettent de supprimer les règles seront efficaces, dans la mesure où quand on ne saigne plus on n'a plus mal", explique le Pr Xavier Fritel.

Parmi les options disponibles figurent les différentes pilules contraceptives, mais aussi l'anneau vaginal, l'implant à l'étonogestrel ou encore le stérilet au lévonorgestrel. Si ces médicaments fonctionnent bien, ils peuvent agir contre les règles douloureuses mais aussi les douleurs au cours des rapports sexuels (dyspareunie) et pelviennes.

Bien entendu, il est impossible de suivre ce traitement en cas de projet de grossesse.

La "ménopause artificielle"

L'autre solution hormonale est souvent surnommée la "ménopause artificielle". Il s'agit de médicaments agonistes de la GN-Rh, prescrits si la contraception a échoué ou lorsqu'une aide à la procréation médicale (AMP) est sollicitée.

"Ce sont des médicaments qui bloquent le fonctionnement ovarien, et qui provoquent les mêmes symptômes que la ménopause, résume Xavier Fritel. On les donne rarement sur du long terme."

Là encore, ces traitements doivent permettre de combattre les règles et autres manifestations douloureuses. Afin de limiter les effets secondaires, des approches complémentaires peuvent être utilisées.

Mais le Pr Fritel est formel sur un point : "Certaines endométrioses vont résister au traitement hormonal." En effet, si elles provoquent des symptômes en dehors des menstruations ("non cycliques"), ces médicaments ne suffiront pas.

Gérer la douleur chronique

Que ce soit par manque d'efficacité ou en raison d'un projet de grossesse, les traitements hormonaux ne sont pas toujours indiqués. La gestion de la douleur s'inspire alors des approches adoptées chez les personnes souffrant de manière chronique.

"On peut délivrer des antalgiques, mais les anti-inflammatoires ont un effet toxique pour les reins, sur le long cours", indique le Pr Xavier Fritel. Le recours à des méthodes non médicamenteuses présente alors un intérêt réel : yoga, ostéopathie, acupuncture semblent améliorer le vécu des patientes.

Plusieurs spécialistes sont alors associés à la prise en charge. Ces stratégies sont d'autant plus importantes que, chez certaines femmes, la souffrance chronique peut avoir des effets plus larges. "Une partie des douleurs est liée à une réaction du corps qui modifie les seuils de douleur", explique le gynécologue. On parle alors d'hypersensibilisation.

L'ablation des lésions

Si les médicaments ne suffisent pas, la chirurgie peut être proposée, selon la localisation des lésions et leur gravité. Là encore, un échange précis est nécessaire, en raison des risques de l'intervention et des effets secondaires possibles.

"Il faut prendre en compte de nombreux éléments : l'âge, les antécédents, le projet de reproduction, l'intensité de la douleur, la taille des lésions, les complications à craindre, la sévérité du geste chirurgical…, liste Xavier Fritel. C'est une décision complexe."

Lorsque seules les lésions sont opérées, on parle de chirurgie conservatrice. Cela signifie que les organes reproducteurs, la vessie ou encore le rectum ne seront pas touchés.

"On enlève du péritoine, qui est un revêtement, des ligaments… toutes les parties qui ne sont pas indispensables au bon fonctionnement de la vessie, du rectum ou des organes reproducteurs", détaille le gynécologue-obstétricien.

Des chirurgies plus invasives

Mais l'endométriose est une maladie profonde, qui peut infiltrer certains organes. Les symptômes dépendent alors de la localisation : troubles de la miction ou de la défection, douleurs nerveuses… La chirurgie est proposée aux cas les plus complexes et résistants.

Les médecins tentent, autant que possible, de limiter ces opérations mutilantes, car elles peuvent provoquer des effets secondaires difficiles à vivre.

"Il y a deux ans, une enquête a montré qu'un millier de femmes avaient été opérées du côlon, illustre Xavier Fritel. C'est une situation difficile car les femmes s'exposent à un risque de dérivation des selles, une stomie, des complications parfois graves."

Des récidives peuvent survenir si des lésions n'ont pas été retirées. Là encore, leur prise en charge dépend des projets de la femme concernée, car des opérations répétées peuvent entraîner des troubles à long terme.

L'assistance médicale à la procréation

On estime que 40 à 50 % des femmes ayant une endométriose souffrent également d'infertilité, sans que l'on puisse réellement expliquer cette association. Les patientes peuvent alors accéder aux différentes techniques d'aide médicale à la procréation (AMP).

Les résultats sont plutôt positifs : d'après le Pr Michel Canis, cité par un document de l'association EndoFrance, plus d'une femme sur quatre accouche dès la première FIV. L'infertilité n'est donc pas une fatalité. D'ailleurs, avant la chirurgie, une conservation des ovocytes est souvent proposée.

Sources

Endométriose, une maladie gynécologique fréquente mais encore mal connue, Inserm, consulté le 16 mai 2018

Définition de l'endométriose, association EndoFrance, consulté le 16 mai 2018

Recommandations sur la prise en charge de l'endométriose, HAS et CNGOF, décembre 2017

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