Docteur : ma tension est-elle bonne ?
7 millions de Français sont ainsi hypertendus ce qui est à la fois beaucoup et normal dans une population dont la durée de vie augmente constamment. Mais au fait qu'est-ce que l'hypertension artérielle?
Bien comprendre la notion de tension artérielle
Depuis William Harvey, on sait que le sang part du cœur par les artères et y revient par les veines. Il s'agit concrètement d'une tuyauterie en circuit et comme dans tout tuyau il doit y régner une certaine pression. La pression initiale est la pression artérielle. Elle va permettre de pousser le sang dans toutes les différentes parties de l'organisme. Ceci explique pourquoi, quand la tension artérielle est trop basse nous nous sentons si faible.
Cette pression artérielle dépend de deux facteurs:- la force de la pompe cardiaque,- la résistance des vaisseaux sanguins.
Le cœur est une pompe qui bat de façon rythmique. A chaque fois que le sang est éjecté des ventricules, la tension devient maximale. On parle de pression artérielle systolique ou de maxima car elle est liée à la systole, c'est-à-dire à la contraction des ventricules.
Au moment de la diastole, quand le cœur se remplit de sang pour préparer le prochain battement des ventricules, la pression devient minimale: on parle de pression diastolique ou de minima.
En pratique, quand le médecin vous place le brassard autour du bras et qu'il le gonfle, il se produit un phénomène de garrot: le sang ne passe plus et le médecin n'entend rien avec le stéthoscope qu'il a placé en aval, sur le pli de votre coude, en regard de l'artère radiale. Petit à petit il dégonfle le brassard jusqu'à entendre les premiers bruits en provenance du cœur. Cela signifie que la pression du sang est suffisante pour forcer le barrage du brassard et cela correspond à la pression maximale. Puis le médecin continue à dégonfler le brassard et à entendre les battements du cœur: le sang s'écoule normalement. Descendu à une certaine pression, le brassard ne s'oppose plus à la circulation sanguine et la pression artérielle s'équilibre avec celle des vaisseaux (ou des tuyaux pour garder l'image en tête): le médecin n'entend presque plus rien avec son stéthoscope et il s'agit de la pression artérielle minimale, celle en dessous de laquelle aucune circulation n'est possible car elle est inférieure à la résistance des vaisseaux. Elle n'est donc plus capable de faire progresser le sang.
Les deux chiffres tensionnels s'expriment en millimètres de mercure (mmHg) car les tensiomètres mesurent la hauteur à laquelle la tension artérielle est capable de faire monter une colonne de mercure. En ce sens il s'agit de même principe de mesure de pression que celle mise au point pour les baromètres ! Les chiffres de tension artérielle doivent ainsi être inférieurs à 160 mmHg pour la maxima et à 90 mmHg pour la minima.
Comment prendre une bonne mesure ?
En pratique, la tension artérielle et naturellement fonction de notre activité physique. Elle peut monter ainsi très haut lors de la pratique d'un sport violent. Il faut donc la mesurer en position allongée, après au moins deux minutes de repos, à distance d'un effort. Mais les émotions peuvent aussi faire monter notre tension ! Il en est ainsi du fameux "effet blouse blanche" qui fait monter la tension de certaines personnes. C'est probablement pour cette raison que 15 à 30% des gens sont traités inutilement.
Conscients de ce problème, des autorités médicales internationales comme l'OMS (Organisation Mondiale de la Santé) ont cherché à redéfinir la façon de pratiquer, dans de bonnes conditions, la mesure de la pression artérielle. Il a été ainsi déterminé qu'il fallait toujours pratiquer deux mesures (voire 3) à quelques minutes d'intervalles, après une période de repos suffisante. L'usage des procédures d'automesure a été favorisé car elles ont l'avantage de gommer l'effet blouse blanche. Dans certain cas cette automesure peut même se pratiquer directement au cabinet du médecin.
Pourquoi se soigner ?
Une trop forte tension artérielle peut à la longue être très destructrice. Soit elle illustre l'effort que doit produire le cœur pour forcer les résistances artérielles, et au bout du compte, il finit par s'épuiser: c'est l'insuffisance cardiaque ou l'hypertrophie du ventricule gauche (qui est devenu anormalement musclé dans cette tache usante). Soit la surpression qu'elle génère se répercute dans les vaisseaux distaux, c'est à dire les plus petits et leur souffrance devient pathologique. Peuvent alors être observés des accidents vasculaires cérébraux, des angines de poitrine ou des infarctus du myocarde (le muscle du cœur qui est également nourri par ses propres vaisseaux distaux), des atteintes des reins (néphropathies), des yeux (rétinopathies) ou des jambes (artériopathies périphériques). La tension artérielle anormalement élevée peut donc avoir des conséquences redoutables.
Ces conséquences seront d'autant plus redoutables que d'autres facteurs de risques cardiovasculaires lui seront associés. Il en est ainsi des excès de cholestérol sanguin ou de triglycérides, du tabagisme, du diabète, et de la ménopause. D'autres facteurs sont à prendre en compte même s'ils sont dits indépendants par manque de solution thérapeutiques: il s'agit de l'âge supérieur à 60 ans, le sexe masculin et les antécédents familiaux de complications cardiovasculaires.
Quelle sont les causes de cette hyperpression ?
Les causes principales sont de deux ordres:- soit les vaisseaux ne sont pas assez souples (durcis par de l'artérosclérose liée au cholestérol) et ils opposent de fortes résistances à la progression du flux sanguin. Le cœur doit alors augmenter la force de ses contractions,- soit les vaisseaux sont trop remplis de liquides ce qui comme dans tout tuyau augmente la pression. Le mécanisme de ce sur-remplissage est maintenant bien connu. L'un des rôles clés du rein est à la fois d'éliminer l'eau en trop dans l'organisme et de faire varier la pression des vaisseaux pour maintenir une tension idéale. Cette régulation est le fait d'hormones qui sont le fruit d'un échange d'information entre le cerveau et le rein.D'autres causes plus rares doivent être recherchées.
Quand se soigner ?
Reste à déterminer quand se soigner. En pratique trois groupes de patients ont été définis en fonction du niveau de risque:- en dehors de votre hypertension tout va bien: vous ne présentez aucun autre facteur de risque cardio-vasculaire et vous ne souffrez d'aucune complication,- vous présentez au moins un facteur de risque (à l'exception du diabète) et vous ne souffrez d'aucune complication,- vous êtes diabétique ou vous souffrez de complications cardiovasculaires.
Le traitement va bien entendu dépendre de votre groupe d'appartenance:- dans le premier l'objectif sera de baisser votre tension artérielle en dessous de 140 mmHg pour la maxima et de 90 mmHg pour la minima,- dans le deuxième il faudra en plus traiter vos autres facteurs de risque,- dans le troisième il faudra prendre en charge la pathologie associée. En cas de diabète ou d'insuffisance rénale, l'objectif tensionnel devra être plus strict et descendre en dessous de 130/85.
Dans tous les cas il est essentiel de bien suivre son traitement car il va vous permettre de mener une vie normale et de mettre toutes les chances de votre côté. Votre probabilité de faire un accident cardiovasculaire va se normaliser et votre durée de vie sera plus longue. C'est bien tout ce que l'on doit attendre d'une médecine moderne.