Cancer du sein : on avance…

C’est encore le cancer le plus fréquent de la femme française. « Si l’on tient compte à la fois de l’augmentation de l’espérance de vie et du dépistage de plus en plus précoce du cancer du sein, sa mortalité est tout de même en diminution », précise le docteur Marc Espié, oncologue à l’hôpital Saint-Louis où il dirige le centre des maladies du sein. Lorsque la taille de la tumeur est inférieure à un centimètre, les chances de survie sont d’au moins 90%. On recense tout de même 49.000 nouveaux cas et 12.000 décès par an. Un dépistage plus systématique du cancer du sein aurait épargné nombre de ces vies.
Un dépistage généralisé et gratuit du cancer du sein
Le cancer du sein surgit surtout chez la femme ménopausée, avec un pic de fréquence à 56/57 ans. Le dépistage organisé du cancer du sein concerne toutes les femmes de 50 à 74 ans. Elles reçoivent tous les deux ans une invitation à effectuer une mammographie. Sécurité supplémentaire de ce dépistage : la lecture par deux médecins.
«Toutes les femmes doivent commencer à surveiller leurs seins auprès d’un gynécologue à partir de la quarantaine », recommande cependant le docteur Espié et, selon leurs antécédents, associer la mammographie à une échographie. « Si l’on a eu des microcalcifications, une surveillance annuelle s’impose. » Les microcalcifications sont de minuscules points blancs que l’on regarde à la loupe sur la mammographie, dans 30% des cas elles peuvent révéler des cancers débutants ou des états pré-cancéreux.
Cancer du sein : une surveillance précoce pour les personnes à risque
« Si l’on appartient à une famille où la grand-mère paternelle ou maternelle, la mère, la tante, la sœur ont eu un cancer avant la ménopause (l’oncle aussi car la lignée paternelle compte autant), il faut se faire surveiller cinq ans plus tôt que l’âge de l’apparition du cancer chez cette personne. Si votre mère a eu un cancer à 40 ans, faites une mammographie dès 35 ans, puis tous les ans », avertit notre spécialiste. Elle sera complétée par une échographie et une IRM. Et consultation chez le gynéco tous les six mois. L’échographie visualise des zones que la radiographie définit mal, à la périphérie du sein. Et les seins jeunes, plus denses, donnent de moins bonnes images mammographiques.
Des cancers du sein très variés
La classification des cancers et particulièrement du sein ne cesse de se développer. On cerne mieux leur diversité, ce qui permet d’opposer une thérapeutique spécifique. « Il faut tenir compte des caractéristiques de la tumeur, de l’état général de la patiente, de son âge », explique le docteur Anne Vincent-Salomon, médecin au service de pathologie et chercheuse dans l’unité de recherche génétique et biologie des cancers de l’Inserm (U 830) à l’Institut Curie, Paris.
Cancers du sein hormono-dépendants : une hormonothérapie efficace
Les « hormono-dépendants » représentent 80% des cancers du sein. Dans cette grande catégorie, les hormones féminines, oestrogènes et progestérone ont favorisé la croissance tumorale. Dans ces 80%, on distingue encore des sous-groupes, par exemple les cancers « luminaux A et B », précise le docteur Marc Espié. Les A, soit la majorité, sont peu proliférants. Hormonosensibles ils réagiront bien à un traitement antihormonal. Les B, plus agressifs, seront soignés différemment. Le traitement repose souvent sur la chimiothérapie classique plus une hormonothérapie. Celle-ci consiste en des antihormones à prendre en comprimés, pendant cinq ans, qui bloquent l’action des hormones au niveau de leurs récepteurs. Selon que la femme est ou non ménopausée, ils diffèrent. Hélas ils déclenchent des bouffées de chaleur, et chez la femme ménopausée provoquent des douleurs articulaires, musculaires et font craindre une ostéoporose. Une surveillance du risque est mise en place.
Cancers du sein peu ou pas réceptifs aux hormones : des thérapies ciblées
Certains cancers sont peu ou pas hormono-dépendants. Leur traitement repose alors le plus souvent sur des thérapies plus spécifiques, les « thérapies ciblées ». Celles-ci s’ajoutent à la chimiothérapie générale et ne la remplacent pas. Environ 10 à 15% des cancers du sein, qu’ils soient ou non hormonaux sensibles, expriment une protéine HER2/ERBB2 qui est un facteur de croissance. De quoi s’agit-il ? Ces cancers se développent parce que cette protéine est présente à la surface des cellules mammaires en grand excès. Cette forme de cancer autrefois redoutable, bénéficie d’une molécule efficace : l’herceptine qui va annihiler l’activité d’HER2/ERBB2. Si des patientes ont à la fois un cancer hormonosensible et cette protéine elles seront doublement traitées. Les thérapeutiques ciblées se font en injections intraveineuses toutes les trois semaines pendant un an. Elles nécessitent une surveillance cardiaque toutes les trois, quatre injections pour vérifier que la force de contraction cardiaque reste stable. Sinon elles n’ont pas d’effets secondaires.
Cancer du sein : de nouvelles molécules à l’étude
«L’importance de la sensibilité aux oestrogènes, la présence ou pas d’une protéine HER2/ERBB2, la vitesse de prolifération, permettent d’identifier de nombreux sous-groupes de cancers du sein et entraîneront des traitements différents», résume le docteur Vincent-Salomon. Autre catégorie, le cancer triple négatif, lorsqu’il n’est pas hormono-dépendant, et ne présente pas la protéine HER2/ERBB2 en excès. On le traite toujours par chimiothérapie générale, et de nouvelles molécules sont à l’étude. Enfin on ne saurait oublier les cancers héréditaires et familiaux, 5% des cancers du sein. On les distingue selon les gènes impliqués, que l’on isole de plus en plus : BRCA1, BRCA2, ATM, P53, etc. Les femmes qui ont des mutations héréditaires des gènes BRCA1 et 2 ont 70% de risque de développer un cancer. À chaque fois que l’on séquence le génome des tumeurs cela permettra de développer de nouveaux traitements. Comme ces nouvelles substances qui vont inhiber par exemple une autre protéine, Pi3K. La molécule est en cours d’essai.
La chirurgie du sein : incontournable
Tout d’abord retirer chirurgicalement la tumeur, traitement de base actuel. On privilégie la conservation du sein, sauf quand la tumeur est trop avancée, et si elle est répartie dans plusieurs endroits du sein. «Ce n’est pas forcément plus grave mais plus étendu, dans la dizaine de canaux de la glande mammaire», souligne le docteur Espié. La technique du ganglion sentinelle est majoritairement pratiquée. Lorsqu’une tumeur se développe, des cellules cancéreuses peuvent migrer en passant par les vaisseaux lymphatiques. Les ganglions situés dans le creux de l’aisselle sont les premiers à être infiltrés. Le chirurgien retire le premier ganglion, «ganglion sentinelle» et l’analyse pour vérifier la présence de cellules cancéreuses. S’il en est exempt, il n’est pas utile d’ôter la chaîne ganglionnaire. Mais si l’on observe des cellules malignes on pratique un curage axillaire qui a pour effet secondaire, l’apparition éventuelle d’un lymphoedème ou gros bras qu’il faudra drainer et protéger. Mais une tumeur très précoce n’a pas eu le temps d’envahir les ganglions. S’il faut retirer le sein, une reconstruction mammaire est proposée, immédiate, dans la même intervention, ou à distance s’il faut réaliser des séances de radiothérapie.
La radiothérapie : elle épargne les tissus sains des organes avoisinants
Les progrès dans l’imagerie, permettent de ne cibler que la tumeur et de protéger les tissus sains. Les rayonnements détruisent les cellules cancéreuses et ont pour but d’éliminer tout risque de rechute.
Chimiothérapie et thérapies ciblées : une association efficace
La chimiothérapie aussi succède à la chirurgie. Elle est indiquée dès qu’une tumeur a plus d’un centimètre, et si les ganglions sont atteints. Elle est toujours pratiquée si le cancer a des récepteurs hormonaux négatifs et si HER2/ERBB2 est surexprimée. Un cancer d’un centimètre a cinq, six ans de vie derrière lui. Les cellules se promènent peut-être déjà. D’où le traitement à visée destructive d’éventuelles cellules dormantes. Le traitement peut être cumulatif : chimiothérapie plus hormonothérapie plus thérapeutiques ciblées. Les perfusions de chimio sont administrées en hospitalisation de jour, au rythme de six séances toutes les trois semaines. On installe sous la peau un cathéter pour éviter de piquer une veine à chaque fois. La chimio est quelquefois pratiquée avant la chirurgie pour diminuer le volume de la tumeur, ce qui permet de conserver le sein.
Traiter les effets secondaires de la chimiothérapie
Il existe des molécules destinées à agir préventivement contre les nausées et les vomissements. Des médicaments pour contrer la chute des globules blancs et rouges. Diarrhées et constipations se traitent. Contre la chute des cheveux, le casque cryo-protecteur fonctionne, mais pas toujours. La Sécurité sociale rembourse un forfait de 125 € une perruque qu’il est bon de s’acheter avant de débuter le traitement. On portera des moufles et des chaussons réfrigérants contre le décollement des ongles et les fourmillements des doigts et des orteils. Et il existe des vernis à ongles ultra-protecteurs. Il faut souvent utiliser des crèmes très nourrissantes contre la sècheresse cutanée.
Je surfe sur…
- Le centre d’appel Cancer : www.e-cancer.fr et 0810 810 821 mis en place par l’Institut National du cancer (INCA).
- www.ligue-cancer.net (ligue contre le cancer).
- www.saint-louis-reseau-sein.org
- www.vivrecommeavant.fr et 01 53 55 25 26.
Sources
Côté Santé.