Air, pollution et cancer : trop d'idées reçues

Les questions d'environnement font l'objet de débats contradictoires et passionnés. Il semble opportun de clarifier certaines vérités et de chasser les idées reçues. Faut-il aérer pendant les pics de pollution ? La situation s'aggrave-t-elle encore ? Le port de masque est-il efficace ? La pollution atmosphérique est-elle responsable de plus de cancers que le tabagisme ? Etc.

1. Existe-t-il un seuil en dessous duquel la pollution de l'air n'a pas d'effet sur la santé ?

Non. Il n'existe pas de seuil, ce qui rend difficiles les décisions en termes de réglementation. En contrepartie, cela signifie que toute baisse des niveaux de pollution se traduit par une baisse de la mortalité.

2. Les véhicules diesels sont-ils plus polluants que les véhicules à essence ?

Oui. Les véhicules diesels sont les principaux responsables de l'émission de particules fines dans l'atmosphère. Ces particules fines sont impliquées dans la genèse des cancers du poumon. Pour lutter contre ce danger, des normes européennes rendent obligatoire l'utilisation de filtres à particules pour les moteurs diesels. Ces véhicules émettent également bien plus d'oxyde d'azote que les véhicules à essence et fragilisent les personnes atteintes de maladies respiratoires (asthme, emphysème). Par contre, ils émettent nettement moins de dioxyde de carbone.

3. La pollution augmente-t-elle dans les villes ?

C'est globalement faux dans les pays industrialisés d'Europe. En revanche, la pollution augmente dans des lieux spécifiques comme les grands aéroports internationaux du fait, notamment, de l'augmentation du trafic aérien et du trafic routier induit.

4. En ville, dois-je porter un masque contre la pollution ?

Il faut savoir que les masques chirurgicaux ou les foulards ne sont pas plus efficaces que le nez (qui joue un rôle de « filtre naturel »). Seuls les masques avec filtre à charbon peuvent avoir une certaine efficacité bien qu'ils n'arrêtent ni les particules fines ni de nombreux gaz. De toute manière, le port du masque ne peut s'envisager que lors des pics de pollution, il ne protège donc pas des effets de la pollution de fond. Il existe des masques destinés à certaines pollutions professionnelles (solvants, poussières), mais ces masques sont efficaces contre des émanations spécifiques et ne constituent pas une protection contre la pollution urbaine.

5. La situation s'aggrave-t-elle ?

Non, mais en réalité, la pollution atmosphérique d'aujourd'hui a changé de nature par rapport à celle d'il y a trente ans. L'évolution de la pollution atmosphérique témoigne des actions engagées sur la réglementation et des progrès technologiques. D'énormes progrès ont été réalisés dans l'industrie et le chauffage, permettant de réduire très fortement leurs émissions de polluants. Depuis les années soixante-dix, la pollution due aux transports est devenue préoccupante. Les analyses décèlent moins de dérivés soufrés et de fumées noires (particules de carbone), mais une plus grande quantité d'ozone et de ses précurseurs, ainsi qu'une proportion plus importante de particules fines potentiellement cancérigènes.

6. Sommes-nous tous égaux devant la pollution ?

Non. Il existe une grande variabilité individuelle dans la susceptibilité aux polluants atmosphériques. Certaines populations sont plus concernées par les effets de la pollution de l'air : soit parce qu'elles sont fragilisées (enfants, femmes enceintes, personnes âgées ou atteintes d'une affection respiratoire ou cardiovasculaire), soit parce qu'elles sont particulièrement exposées professionnellement. A Paris, il a également été montré que les populations défavorisées sont plus vulnérables à la pollution et aux pics de pollution, avec un taux de mortalité accru.

7. Faut-il aérer lors des pics de pollution ?


 


 

Même en cas de pics de pollution, il faut continuer à aérer. Les recommandations émises par le Conseil supérieur d'hygiène publique de France indiquent de ne pas modifier les habitudes d'aération ou de ventilation des logements, en privilégiant toutefois les heures « fraîches » c'est-à-dire tôt le matin ou en soirée. Rappelons qu'aujourd'hui, la pollution est en moyenne plus élevée à l'intérieur des logements qu'à l'extérieur.

8. La pollution reste-t-elle localisée là où elle a été émise ?

Non. Par exemple, le nuage de pollution produit par l'agglomération parisienne peut s'étendre sur plus de 50 km pour les oxydes d'azote et sur plusieurs centaines de kilomètres pour l'ozone.

9. En ville, dans quelles conditions suis-je le plus exposé à la pollution atmosphérique : à pied, en vélo ou en auto ?

L'auto. Dès 2006, une étude menée par le Laboratoire d'hygiène de la Ville de Paris (LHVP) a montré qu'entre un automobiliste, un cycliste et un piéton, c'était dans son véhicule que l'on était le plus exposé à la pollution.

10. La pollution atmosphérique est-elle responsable de plus de cancers que le tabagisme ?

Le tabagisme actif reste le plus grand pourvoyeur de cancers. Mais des travaux nord-américains ont montré que la pollution atmosphérique provoque un nombre de cancers comparable à celui des cancers causés par le tabagisme passif.

11. Pollution de fond ou bien pics de pollution : quelle est la situation la plus dangereuse ?

La question des risques pour la santé de la pollution atmosphérique ne se résume plus à celle de l'impact des pics de pollution. Selon Airparif, réseau de surveillance de la qualité de l'air en région parisienne, la manière dite traditionnelle de concevoir la prévention en surveillant les alertes est encore pertinente, mais c'est par la réduction générale, tout au long de l'année, des niveaux moyens de pollution que l'on aura l'impact de santé publique le plus important. Cela ne signifie pas, pour autant, que la gestion des pics de pollution soit sans intérêt.

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Source : Institut Lilly