Vieillir ou conduire : quand faut-il choisir ?

Le vieillissement normal influe forcément sur la conduite
Conduire est une activité complexe mettant en jeu les capacités d'apprentissage, de perception, d'attention visuelle et auditive, de coordination fine des mouvements et d'adaptation du comportement aux évènements imprévus. Toutes ces capacités se modifient avec l'âge, mais de façon variable d'un sujet à un autre. Lorsque les déficiences sont d'apparition progressive et relativement bien compensées, un risque réel peu passer inaperçu. Pourtant, toute baisse de la perception visuelle ou sonore, des amplitudes articulaires, ou encore de l'attention, sont autant de limites à la conduite chez le sujet âgé.Cependant, il n'existe pas de règles et il n'est pas facile d'établir l'inaptitude d'un senior à conduire. Le médecin de famille peut représenter une aide en recherchant le degré de défaillance des trois principaux types de fonction pouvant interférer avec la conduite. Les résultats lui permettront de formuler des arguments objectifs autres que l'âge.
Les défaillances visuelles
Les performances visuelles, qui diminuent inéluctablement avec l'âge, seront évaluées avec précision. A 70 ans, l'acuité visuelle se situe généralement vers les 7/10ème, puis chute pour n'être plus que de 5/10ème à 85 ans. De plus, le champ visuel se rétrécit, les contrastes sont moins bien perçus, la vision de nuit est moins performante et l'éblouissement est moins bien toléré. L'ensemble de ces paramètres permettront déjà d'orienter le degré d'aptitude de la personne. Se rajoutent parfois à ces phénomènes, de vraies pathologies oculaires, comme la cataracte (extrêmement fréquente), le glaucome ou la dégénérescence maculaire. L'ophtalmologue en fera le bilan et comme certaines de ces affections sont curables, des traitements pourront éventuellement être proposés.
Les défaillances de l'oreille interne
Il existe dans l'oreille interne des sortes d'appareils de mesure du mouvement (appareil vestibulaire otolithique), dont les dysfonctionnements sont à l'origine de beaucoup de problèmes en voiture. En effet, ils créent des troubles rendant la conduite très délicate: la trajectoire devient difficile à apprécier, rendant périlleuse chaque tentative de dépassement ou de rabattement, dans les courbes on a l'impression de prendre la tangente, et enfin, dans les bouchons ou à un feu rouge, la sensation que la voiture continue de se déplacer donne envie de se mettre debout sur les freins !Le spécialiste ORL pourra évaluer le degré de déficit otolithique par un examen du fonctionnement vestibulaire et des tests spécifiques. Certains médicaments anti-vertigineux, associés autant que possible à un travail de rééducation adapté, sont susceptibles dans certains cas d'améliorer ces troubles. La reprise du volant pourra alors se faire de façon plus sereine après 2 mois d'entraînement régulier.
La défaillance intellectuelle
Selon une étude française portant sur 1.053 sujets, 20% des personnes considérées comme démentes continuent de conduire. C'est à peu près la même situation dans le reste de l'Europe. Pourtant, lors d'un syndrome démentiel modéré, le sujet âgé peut présenter des troubles de reconnaissance des lieux et des itinéraires peu familiers, ainsi que des difficultés à s'adapter à des situations imprévues. Cependant, il garde ses automatismes de conduite, ce qui masque longtemps les problèmes. Le médecin doit s'informer auprès des proches sur la façon de conduire de la personne par quelques questions simples, qui permettent souvent de dépister les difficultés: A-t-il tendance à se perdre? Est-il coléreux au volant? Comment cela se passe-t-il pour les autres activités de la vie courante (au téléphone, gestion des comptes, préparation des médicaments, etc.).
Lorsque le médecin repère l'une ou plusieurs de ces défaillances, il doit rendre son patient attentif aux risques encourus, pour lui et pour les autres. En pratique, en absence de critères médicaux, lesquels feraient l'unanimité, l'abandon de la conduite se décide le plus souvent par choix personnel du conducteur, sous la pression des familles ou de celle des assurances. Mais cette décision a souvent de lourdes conséquences sur l'organisation de la vie de tous les jours, surtout en milieu rural.
Huit conseils pour garder le volant quand on est senior
1. Conduire le plus régulièrement possible pour préserver les automatismes.2. Eviter de conduire la nuit.3. Ne pas prendre le volant par mauvais temps.4. Limiter les déplacements aux trajets connus et de courte distance.5. Eviter les heures où la circulation est dense, ainsi que les autoroutes.6. Privilégier la conduite accompagnée, le copilote permet de diminuer les tâches à effectuer.7. Modérer sa vitesse.8. Adapter son véhicule à ses capacités: direction assistée, boite automatique, etc.