Peut-on prendre de l'aspirine pendant la grossesse ?

Publié par Dr Philippe Presles
le 27/08/2003
Maj le
3 minutes
Autre
Les résultats de cette étude préliminaire sont à confirmer au plus vite car il sèment le doute : la prise d'aspirine pourrait majorer de 80% le risque de fausse couche.

AINS (anti-inflammatoires non stéroïdiens), aspirine et grossesse

Les AINS, pour anti-inflammatoires non stéroïdiens, dont le plus connu est l'aspirine, font partie des médicaments les plus utilisés dans le monde.

D'autant plus qu'ils sont délivrés en pharmacie sans ordonnance. Cette grande famille de médicaments utilisés dans le traitement de la douleur, de la fièvre et de l’inflammation, comprend outre l’aspirine, l’ibuprofène et le kétoprofène.

Ils sont officiellement contre-indiqués par les autorités sanitaires chez les femmes enceintes à partir du 6e mois de grossesse.

En revanche, leur innocuité en début de grossesse est régulièrement remise en cause...

Jamais d’aspirine ni d’AINS à partir du 3e trimestre

Des études menées chez l’animal ont montré un effet tératogène de l’aspirine (risque de malformations). Depuis des données cliniques ont confirmé ce risque de malformation fœtale en cas de prise d’aspirine et d’autres AINS mais uniquement à partir du 6e mois de grossesse.

C’est ainsi que tous les AINS sont contre-indiqués à partir du 6ème de grossesse, notamment l’aspirine (dès 500 mg par jour) pour ne pas exposer le fœtus à un risque de toxicité cardio-pulmonaire et rénale.

Encore une fois, ce risque n’est pas documenté en début de grossesse, mais uniquement à partir du début du 6e mois de grossesse et le risque de survenue de ces effets est d’autant plus important que la prise d’AINS est proche de la date prévue d’accouchement, même s’il s’agit d’une prise très ponctuelle.

On peut donc prendre de l’aspirine jusqu’au 5e mois inclus ?

Entre le 2e mois et le 5e mois révolu, un traitement ponctuel semble sans conséquence néfaste. En revanche, il est déconseillé de prendre un AINS au long cours.

Comme l’automédication est déconseillée pendant la grossesse, il faut dans tous les cas demander l’avis du médecin, qui peut prescrire d’autres types de médicaments pour soulager les douleurs.

L’aspirine est-elle associée à un risque de fausse-couche ?

Une première étude qui associe aspirine et fausse couche...

Il y a une dizaine d’années, une étude portant sur les facteurs de risque d'avortement spontané, a permis d’interroger plus de 1.000 femmes enceintes sur leur usage d'AINS dès la réponse positive de leur test de grossesse (1). Un total de 53 sujets ont affirmé avoir eu recours à des AINS. Par la suite, 162 fausses-couches ont été enregistrées jusqu'à la 20ème semaine. Après analyse des différents paramètres susceptibles d'intervenir, les auteurs ont observé une augmentation du risque de fausse-couche de 80% chez les femmes ayant consommé de l'aspirine en début de grossesse. En revanche, cette relation n'est pas constatée avec le paracétamol, un antalgique également très utilisé.

Une seconde étude qui ne confirme pas les résultats de la première...

Depuis, cette association constatée sur un petit échantillon et sur un faible nombre d'évènements n’a pas été prouvée par d’autres études. Citons par exemple cette analyse américaine ayant porté sur plus de 54.000 femmes enceintes qui conclut que « l'utilisation de l'aspirine pendant la grossesse n'entraîne pas un risque accru de fauss-couche » (2).

Reste que cette association est plausible dans la mesure où l'aspirine cible la production de prostaglandines, des substances indispensables à l'implantation du fœtus.

Que penser de tout cela ?

Premier point complètement certain : pas d'aspirine ni d'AINS à partir du 6ème mois.

Avant le 6ème mois : la plus grande prudence est de mise.

Et plus généralement, dès le début de la grossesse (et idéalement peu avant la conception), il faut se méfier de tous les médicaments (sur ordonnance ou sans) et ne jamais recourir à l’automédication. L’avis du médecin s’impose y compris pour des médicaments qui peuvent sembler anodins de prime abord.

Sources

Li D.K. et coll., British Medical Journal, 327 : 368-371, 2003.

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