Pelade, alopécie : risquez-vous de devenir chauve ?

Séances chez le coiffeur, produits capillaires, accessoires… Prendre soin de ses cheveux nécessite un budget pour le moins conséquent. Il faut dire qu'en moyenne, 50 à 80 brins se régénèrent chaque jour.
Quand on sait que 150 000 d'entre eux composent notre chevelure, un peu d'attention s'avère donc nécessaire. Lorsque les cheveux chutent en grande quantité, c'est donc la catastrophe – et ce que l'on soit homme ou femme. Surtout si cela provoque un manque de cheveu, la fameuse alopécie.
"On distingue plusieurs types d'alopécie, indique le Dr Philippe Assouly, dermatologue au centre Sabouraud (hôpital Saint-Louis, Paris). Lorsque les cheveux chutent sous formes de plaques, la cause peut être cicatricielle (sans repousse possible) ou non. Lorsque la chute est diffuse et durable, on pense avant tout à une alopécie androgénétique."
Mais alors qu'est-ce qui favorise une alopécie ? Panorama des différentes causes.
Le poids majeur de l'hérédité
"Tel père, tel fils", dit l'adage. En ce qui concerne les affaires capillaires, ce dicton se confirme malheureusement. Comme son nom l'indique, l'alopécie androgénétique – qui se caractérise par une chute de cheveux diffuse, surtout sur le sommet du crâne – a une forte composante familiale.
En fonction des études, le risque de développer un tel trouble est augmenté de 5 à 10 fois si l'un des parents est lui-même touché par une alopécie. "Cela dit, on peut avoir des antécédents familiaux et être épargné, et vice versa", tempère le Dr Philippe Assouly.
Derrière ce terme complexe, un mécanisme précis se produit. Parmi les hormones mâles – qu'on trouve en moindre quantité chez les femmes –, la testostérone qui se transforme en DHT. Cette protéine accélère le cycle de production du cheveu, épuisant le follicule.
Le cheveu est alors plus fin, sa durée de vie plus courte et il ne couvre plus autant le cuir chevelu. Les femmes ne sont pas épargnées, mais souffrent parfois d'autres symptômes associés (acné, hyperpilosité, troubles des règles,…). A 40 ans, une femme sur cinq est ainsi concernée contre environ un homme sur deux.
La pelade, maladie auto-immune qui provoque une chute de cheveux - parfois des poils - par plaques, touche elle aussi plus souvent les personnes souffrant d'antécédents familiaux. Mais contrairement aux idées reçues, les facteurs psychologiques ne jouent pas de rôle décisif dans la survenue de cette pathologie.
Chagrin, stress, deuil… accusés à tort
Le rôle du stress, du chagrin ou de tout autre choc psychologique est largement surestimé en ce qui concerne la chute de cheveux. "Les gens accusent souvent le stress, à tort, confirme le Dr Philippe Assouly. C'est une erreur car on passe à côté des causes réelles."
Dans les faits, aucune étude n'a fait ressortir de facteur psychologique spécifique. Et pour cause. "Les maladies auto-immunes sont déterminées par de multiples causes, et la pelade ne fait pas exception, rappelle le dermatologue. En pratique, il s'agit d'une perte du privilège immunitaire dont bénéficient les follicules pileux." Et notre santé mentale n'a pas de rôle majeur à jouer dans ce domaine.
Il en va de même pour les chutes de cheveux diffuses. "Si correspondance il y a, alors elle sera secondaire, parce qu'une personne a cessé de manger après un choc majeur", illustre le Dr Assouly.
Ces maladies qui attaquent le cheveu
Outre la pelade, certaines maladies peuvent favoriser une fragilisation du cheveu et donc une alopécie diffuse. C'est le cas des différents troubles de la thyroïde, une glande au rôle essentiel dans la régulation de l'organisme.
Qu'elle soit trop active, ou au contraire pas assez, la thyroïde risque de perturber les cycles de fabrication des cheveux et, par conséquence, être responsable d'une chute importante.
Toujours sur le plan hormonal, les maladies provoquant une sécrétion excessive d'androgènes (cancers, syndrome des ovaires polykystiques, etc) auront un impact négatif sur le développement de notre chevelure.
Des pathologies induisant un stress majeur pour l'organisme, comme un infarctus, peuvent aussi s'accompagner d'une chute de cheveux.
Certains médicaments mis en cause
Parmi les causes récurrentes de chute de cheveux, les médicaments figurent en bonne place. A commencer par les chimiothérapies. En ciblant les cellules qui se multiplient rapidement, ces traitements attaquent aussi les cheveux.
Un effet généralement temporaire et qui n'est pas systématique. Si une alopécie se produit, elle débute dans 2 semaines suivant la première cure de chimiothérapie. La repousse se produit après l'arrêt du traitement.
"Les chutes définitives sont rares et surtout associées à des anticancéreux spécifiques, comme les taxanes indiqués dans le cancer du sein", indique le Dr Philippe Assouly. Jusqu'à 5 % des patientes seraient concernées par une alopécie définitive, dans ce cas précis.
Anticoagulants et médicaments destinés à réguler la thyroïde sont également associés à une chute de cheveux. De même, une pilule contraceptive mal adaptée peut s'accompagner d'un tel effet. "Ce risque est inscrit sur la notice, souvent de manière excessive car de nombreux traitements ne déclenchent pas de chute de cheveux contrairement à ce qui est inscrit", souligne le dermatologue.
Attention aux changements alimentaires trop brusques
Dans la mesure où les cheveux se régénèrent en permanence, ils sont particulièrement sensibles aux variations brutales des habitudes de vie. Un régime trop drastique favorisera donc une chute diffuse.
"Concrètement, si quelqu'un devient vegan du jour au lendemain ou fait un régime drastique, une chute de cheveux diffuse est possible. Les anorexies favorisent aussi l'alopécie", illustre le Dr Philippe Assouly.
Si ces modifications s'inscrivent dans la durée, le corps peut finir par s'adapter. Une carence brutale en fer, par exemple, sera associée à une chute de cheveux. Mais ce phénomène semble moins marqué chez les femmes en souffrant de manière chronique.
Deux aliments potentiellement toxiques
Les placards de la cuisine peuvent aussi abriter des aliments aux effets potentiels sur la masse de cheveux. Le premier, ce sont les cucurbitacées (courgette, butternut, etc). Le Dr Assouly a récemment constaté que, dans de rares cas, ces légumes contiennent une toxine (cucurbitacine) qui peut faire brutalement tomber les cheveux après une intoxication alimentaire.
Un goût amer permet de savoir si la cucurbitacée en contient ou non. "La chute de cheveux semble exceptionnelle, mais l'intoxication aux cucurbitacées n'est pas si rare, souligne le dermatologue. On recense environ 35 cas par an, dont 3 où une chute massive a été répertoriée."
Et la courge n'est pas le seul aliment à avoir un tel effet sur la chevelure. Une noix du Brésil, appelée coco de mono, abrite de grandes quantités de sélénium. Or, un excès de cet oligo-élément s'avère toxique pour l'organisme. Cela se traduit, d'abord, par une chute des cheveux mais aussi des poils sous les bras et au niveau de l'aine.
Ne pas trop tirer les cheveux
Être tiré.e à quatre épingles peut avoir ses risques, au moins sur le plan capillaire. "Les tractions fortes et répétées vont altérer le cheveu de manière durable", avertit Philippe Assouly. Les chignons, queues-de-cheval et autres coiffures trop serrées sont donc à éviter.
En imposant une traction trop forte, nous fatiguons les follicules. Une alopécie peut alors se développer au niveau des zones de tension, comme les tempes ou le haut du front. "Chez les femmes aux cheveux crépus, la principale cause d'alopécie ce sont les tresses. Dans les autres cas, ce sont plutôt les chignons", indique le dermatologue.
La chaleur a aussi tendance à aggraver les choses. Le sèche-cheveux doit donc être maintenu loin du cuir chevelu et l'usage du casque chauffant doit rester anecdotique. "L'effet est moins intense mais reste progressif, surtout s'il est associé à une traction", avertit le Dr Assouly.
Les cheveux chutent après l'accouchement
Pendant la grossesse, la chevelure se fait plus dense. Cela s'explique par un mécanisme précis : sous l'effet des oestrogènes, davantage de cheveux connaissent une phase de croissance et ceux qui chutent sont en faible nombre. "A partir du quatrième mois, c'est une période faste", résume Philippe Assouly.
Avec la chute des hormones de la grossesse, un retour à la normale s'effectue. C'est une des grandes causes de ce qu'on appelle l'effluvium télogène, une chute de cheveux diffuse qui fait ici office de rééquilibrage.
"Le phénomène est similaire à celui qui suit l'arrêt de la pilule contraceptive", indique le dermatologue. D'autres facteurs peuvent s'ajouter et amplifier le phénomène : un peu moins de soin apporté à sa santé avec l'arrivée du bébé, un régime pour perdre ses kilos de grossesse, une carence en fer liée à une hémorragie de la délivrance…
Les facteurs sont nombreux. Mais cela reste temporaire : après une phase de remise à l'équilibre, la croissance des cheveux retrouve un rythme normal. Il suffit donc de se montrer patiente.
Sources
Fiche thématique sur l'alopécie, Société Française de Dermatologie
Le dermatologue et la chute de cheveux – alopécie, Syndicat National des Dermatologues-Vénéréologues