Meghan Markle révèle sa fausse-couche pour briser les tabous

Meghan Markle se démarque une nouvelle fois de la très secrète famille royale britannique. Dans un long texte publié dans le journal américain New York Times, elle révèle avoir fait une fausse-couche en juillet dernier, et parle sans tabou de ce drame que son mari et elle ont traversé.
Fausse-couche de Meghan Markle : “C'était un matin de juillet…”
L’ancienne actrice se souvient : "c'était un matin de juillet qui commençait aussi normalement que n'importe quel autre jour : préparer le petit déjeuner. Nourrir les chiens. Prendre des vitamines. Trouver cette chaussette manquante". "J’ai coiffé mes cheveux en queue de cheval avant de sortir mon fils de son berceau", poursuit-elle, avant de révéler sa fausse-couche. "Après avoir changé sa couche, j'ai ressenti une forte crampe. Je me suis laissée tomber au sol avec lui dans mes bras, fredonnant une berceuse pour nous garder tous les deux calmes, la mélodie joyeuse contrastant fortement avec mon sentiment que quelque chose n'allait pas. Je savais, en tenant mon premier-né, que je perdais mon deuxième".
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Par ces quelques lignes, la femme du Prince Harry dépeint le drame traversé par 10 à 20% des femmes enceintes chaque année.
Si ces pertes sont finalement assez fréquentes, elles sont rarement des sujets de conversation, comme le reconnaît la maman d'Archie, 19 mois. "Dans la douleur de notre perte, mon mari et moi avons découvert que dans une pièce de 100 femmes, 10 à 20 d'entre elles auraient souffert d'une fausse couche. Pourtant, malgré le caractère commun stupéfiant de cette douleur, la conversation reste taboue, criblée de honte (injustifiée) et perpétuant un cycle de deuil solitaire".
Briser le silence du deuil de l’enfant à naître
"Perdre un enfant signifie porter un chagrin presque insupportable, vécu par beaucoup, mais dont peu de gens parlent”, ajoute Meghan Markle. Avec sa tribune, elle veut briser un silence, dénoncé aussi récemment par un autre couple de célébrités frappé par la perte d’un bébé : Chrissy Teigen et John Legend. Comme eux, la Duchesse de Sussex ne cache ainsi rien de son passage à l’hôpital et de ses souffrances.
Meghan Markle et Harry : des heures sombres à l’hôpital

Dans son texte poignant, Meghan Markle se rappelle la terrible attente pendant les soins alors que la fausse-couche était confirmée.
Elle écrit : "Quelques heures plus tard, je me suis allongée sur un lit d’hôpital, tenant la main de mon mari. Je sentis la moiteur de sa paume et embrassai ses jointures, humides de nos deux larmes. En regardant les murs blancs et froids, mes yeux se sont embués. J'ai essayé d'imaginer comment nous guéririons".
Déjà par le passé - alors que sa belle-famille se montre très pudique sur leurs sentiments - la femme du prince Harry avait fait part de ses difficultés de jeune maman à un journaliste. Il lui avait simplement demandé si cela allait.
Elle confie : "Je lui ai répondu honnêtement, ne sachant pas que ce que ma réponse résonnerait auprès de nouvelles mamans et plus âgées, et quiconque qui à sa manière souffre en silence. Ma réponse spontanée semblait donner aux gens la permission de dire leur vérité. Mais ce n’est pas la réponse honnête qui m’a le plus aidée, c’est la question elle-même".
"Assis dans un lit d’hôpital, regardant le cœur de mon mari se briser alors qu’il essayait de retenir mes morceaux brisés, j’ai réalisé que la seule façon de commencer à guérir était de demander d’abord : «Ça va?»", se rappelle-t-elle.
Elle appelle tout le monde à s’intéresser à son prochain en ouvrant le dialogue. Elle assure : "En étant invités à partager notre douleur, nous faisons ensemble les premiers pas vers la guérison".
La prise de parole de Meghan Markle ne sera pas inutile, selon Zoe Clark-Coates, directrice générale du Mariposa Trust (une association londonienne venant en aide aux parents qui ont perdu un enfant). Elle a confié au New York Times que des pics de demandes d’aide de la part de familles endeuillées sont enregistrés lorsque des célébrités témoignent.
"Les gens admettent soudainement à eux-mêmes et aux autres qu'ils ont souffert et qu'ils souffrent", explique la représentante de l'organisation.
Pour la gynécologue Odile Bagot, le tabou n'est pas la première raison du silence des parents. Il est plutôt lié aux difficultés d'en parler et à faire comprendre son deuil. "Il y a un décalage entre la femme touchée qui perd plus qu’un embryon de quelques cm - mais un enfant en devenir dans lequel elle s’est déjà projetée - et l’entourage qui ne prend pas la mesure de la tristesse que représente cette perte pour elle. Il faut un vrai temps de deuil à ses femmes", rappelle l'experte auteure de plusieurs livres dont Ménopause, pas de panique ! et Vagin et Cie, on vous dit tout ! aux éditions Mango.
Des risques de fausses-couches plus importants avec l'âge

Entre les études et le travail, l’âge des premières grossesses recule depuis plusieurs années. Toutefois, un point important est à retenir sur la fertilité féminine : elle diminue avec l’âge tandis que les risques de fausse-couche augmentent. Si les trentenaires ont entre 10 et 15% de risque d'en faire une, le taux est entre 30 et 35% après 35 ans.
Généralement pour les patientes de plus de 35 ans comme Meghan Markle, les fausses-couches ont lieu avant 12 semaines de grossesse. Elles sont principalement dues à une anomalie chromosomique du fœtus liée à la qualité de l'ovocyte qui est vieillissant.
"La plupart des fausses-couches sont le plus souvent génétiques, et non hormonales comme on pouvait le penser auparavant. Il y a tout simplement un raté. Il y a fécondation, mais l'embryon n'est pas viable, car les choses ne se sont pas déroulées correctement au niveau chromosomique", avait déjà expliqué le Dr Marie-Claude Benattar, gynécologue médical et obstétrique à Esante.fr.
Par ailleurs, l’utérus peut avoir été fragilisé au cours des années par des maladies ou des opérations. L’organe est alors moins apte à soutenir une grossesse.
Dompter la peine et le stress
Les fausses-couches sont particulièrement difficiles pour les femmes de plus de 35 ans. Outre la peine et le deuil, elles font face à une difficulté supplémentaire : le stress de l’horloge biologique qui tourne. "Psychologiquement, les femmes de 35 ans peuvent être très atteintes par leur fausse-couche. Elles sont au courant que leur fertilité n'est pas au top. Cela accroît leur angoisse", ajoute la médecin.
Toutefois, il est primordial de rappeler que mener une grossesse à terme n’est pas impossible après 35 ans."Le plus important est d'avoir un œuf de bonne qualité. Si la maman n'a pas de soucis de santé sous-jacent, elle a toutes les chances de mener sa prochaine grossesse à terme au même titre que les femmes dans la vingtaine".
Sources
The losses we share, tribune de Meghan Markle dans le New York Times, 25 novembre 2020
Meghan, Duchess of Sussex, Shares Her Miscarriage Grief, New York Times, 25 novembre 2020
Merci à Odile Bagot, Gynécologue