Narcissisme : son impact sur la psychothérapie

Vous êtes-vous déjà demandé comment les personnes narcissiques se comportaient face à leur psychothérapeute ? “Le trouble de la personnalité narcissique se caractérise par une tendance omniprésente à la grandiloquence, au besoin d'adulation et au manque d'empathie. Le diagnostic repose sur les critères cliniques. Le traitement repose sur la psychothérapie psychodynamique”, indique le manuel médical MSD.
En ce sens, il est logique de s’interroger sur la réception des traitements psychothérapeutiques par les personnes qui présentent ce trouble. Essaient-elles de berner leur psychologue ? Et, si oui, le professionnel de santé tombe-t-il dans le panneau et n’arrive-t-il pas à soigner son patient ?
Comprendre comment le narcissisme affecte la psychothérapie
Des chercheurs du Jena University hospital et de l’Université de Münster (Allemagne) se sont intéressés à cette problématique. Leur étude a été publiée dans la revue The Lancet Psychiatry le 13 octobre 2023. Pour leurs travaux, les chercheurs ont recruté plus de 2000 participants bénéficiant d’une psychothérapie à l’hôpital et en cabinet.
Les chercheurs ont ainsi essayé de comprendre dans quelle mesure les traits de personnalité narcissique affectent le traitement du patient. À cette fin, ils ont évalué les niveaux de narcissisme chez les participants, mais aussi leurs symptômes dépressifs, avant et après la psychothérapie. Ils ont pour ce faire utilisé deux méthodes : la psychothérapie comportementale (TCC) et cognitive et la psychanalyse.
“Le postulat de base des TCC considère un comportement inadapté (par exemple une phobie) comme la résultante d'apprentissages liés à des expériences antérieures survenues dans des situations similaires, puis maintenus par les contingences de l'environnement. La thérapie visera donc, par un nouvel apprentissage, à remplacer le comportement inadapté par un comportement plus adapté correspondant à ce que souhaite le patient. Le thérapeute définit avec le patient les buts à atteindre et favorise ce nouvel apprentissage en construisant une stratégie thérapeutique adaptée”, explique l’Association française de thérapies comportementales et cognitives.
Une forte rivalité narcissique a été associée à plus de symptômes dépressifs sévères
Quant à la psychanalyse, cette méthode “se réfère à une forme précise de traitement de la souffrance psychique et s'appuie sur une méthode qui cherche à traduire la signification des conflits restés inconscients”, indique le site psychanalyse.be.
Une forte rivalité narcissique a été associée à davantage de symptômes dépressifs sévères avant le début de la psychothérapie dans les deux groupes. En revanche, le besoin d’être admiré a été associé à des formes moins graves de dépression.
“Dans le groupe de patients traités via une TCC, le narcissisme a été associé à une réponse plus faible au traitement, même lorsque que le trouble de la personnalité narcissique n’était pas complètement développé”, a résumé dans un communiqué de presse l’auteur principal de l’étude, la chercheuse en psychologie Maike Richter. La rivalité, parmi tous les traits de personnalité narcissique, avait l’impact le plus négatif sur l’efficacité du traitement.
“Les effets négatifs du narcissisme sont basés sur une relation plus superficielle entre le thérapeute et son patient”
Cependant, en ce qui concerne le traitement par psychanalyse - pensé surtout pour les personnes éprouvant des difficultés dans leurs relations interpersonnelles - les effets négatifs du narcissisme n’étaient pas observés. Les auteurs de l’étude pensent que cela est dû à la différence de relation entre le praticien et le patient selon que l’on suit une TCC ou une psychanalyse.
D’après le professeur de psychiatrie Nils Opel, qui a participé à l’étude, d’autres études sont nécessaires pour soutenir cette hypothèse. “Nous avons découvert que les effets négatifs du narcissisme sont basés sur une relation plus superficielle entre le thérapeute et son patient”, développe le professionnel de santé.