Les médicaments génériques sont-ils vraiment équivalents ?

Publié par Dr Philippe Presles
le 10/05/2013
Maj le
4 minutes
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Maintenant que les génériques sont quasiment devenus obligatoires, nous sommes en droit de nous dire qu’ils sont identiques aux médicaments qu’ils remplacent. N’est-ce pas ce que sous-entendent les pharmaciens qui les substituent quasi systématiquement sur notre ordonnance ? Mais est-ce bien vrai ?

Les génériques sont-ils vraiment équivalents ?

La réponse à cette question est simple : ils ne sont pas équivalents aux médicaments qu’ils remplacent, ou princeps, c’est-à-dire qu’ils ne sont pas strictement identiques.

Pas équivalents mais similaires

  • Ils disposent du même principe actif à une dose variant de plus ou moins 20 %.
  • Ils sont composés d’excipients pouvant être différents.
  • Ils sont sous une forme différente, un comprimé pouvant être remplacé par une gélule.
  • Ils ont un nom différent pouvant porter à confusion.

De plus, ils sont théoriquement similaires, car aucune étude de bioéquivalence n’est vraiment demandée. On ne sait donc pas si le générique a strictement le même effet que le médicament qu’il remplace.

Génériques et allergies : les doutes sont réels et souvent fondés

Le doute le plus couramment décrit est celui de personnes allergiques à un générique alors qu’elles supportent très bien le médicament princeps. C’est qu’elles sont allergiques à un excipient contenu uniquement dans le générique. Si c’est votre cas, signalez cette allergie à votre médecin et à votre pharmacien pour que ce dernier ne vous donne qu’un générique sans l’excipient possiblement en cause… Cela ne sera pas simple pour lui car les génériques ont souvent des excipients différents d’une marque à l’autre.

Génériques et formes problématiques : les doutes se rencontrent aussi

Dans les génériques, une forme peut être remplacée par une autre, une gélule par un comprimé, etc. Outre que cela peut changer son efficacité, il est des cas qui ne fonctionnent pas. Par exemple certains patients prenant de l’Imovane de temps en temps pour dormir, n’arrivent pas à s’endormir avec son générique zopiclone, car les comprimés n’étant presque plus pelliculés, le goût métallique du zopiclone est tellement désagréable qu’il les empêche de s’endormir…

D’autres ont beaucoup de mal à avaler le comprimé du générique de l’Elisor, car il se détruit tout de suite au contact de la salive. C’est bien de la pravastatine pourtant, mais dans un comprimé très différent. Les exemples ne manquent pas.

Génériques et inefficacité : les doutes sont documentés

Certaines personnes ne se sentent pas bien soignées par le générique alors que leur médicament princeps marchait bien. J’ai personnellement rencontré le cas d’une patiente diabétique qui était très déséquilibrée avec son générique alors que la reprise du médicament princeps a tout normalisé. Dans son livre sur les Médicaments génériques, le Dr Sauveur Boukris rapporte des problèmes graves liés à des génériques contre l’épilepsie, l’hypothyroïdie, certains morphiniques, certains antibiotiques. Là encore, c’est la bioéquivalence qui est en cause.

Génériques : des doutes partagés par le grand public

L’an dernier, en 2012, un sondage du Figaro a montré que 48,78 % des Français faisaient confiance aux génériques. Ils sont donc nombreux à avoir rencontré des problèmes de toute sorte, même s’ils sont une très grande majorité à suivre les autorités dans leur volonté de faire des économies.

Oui pour les génériques, mais les bons !

En tant que médecin, ce phénomène des génériques m’amène à deux interrogations :

La première est que je me demande pourquoi toute la pharmacologie qu’on nous a enseignée à la faculté, et dont les pharmaciens sont les principaux dépositaires, n’est-elle plus valable ? Comment un comprimé peut-il être l'équivalent d’une gélule ? Pourquoi un pelliculage n’est-il plus nécessaire ? Pourquoi des formes retards peuvent-elles être remplacées par des formes simples ? Pourquoi les excipients n’ont-ils plus d’importance ? Pourquoi les différents sels d’un même principe actif sont-ils considérés comme similaires ? Etc.

La deuxième est que je me demande pourquoi on considère que tous les génériques sont similaires ? Déjà qu’ils ne sont pas strictement équivalents au médicament princeps, ils diffèrent beaucoup entre eux. Pourquoi ne pas dire qu’il y a des bons et des mauvais génériques et ne serait-ce pas le rôle des autorités et des groupements de pharmaciens de nous le dire ? Donnons-nous les moyens de faire la différence entre les bons et les mauvais produits et écoutons les patients.

Alors disons « oui » pour les génériques pour faire tous ensemble un maximum d’économies, disons « oui », mais pour les bons !

Source : Dr Sauveur Boukris. Médicaments génériques, la grande arnaque. Editions du Moment 2013.

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