Les médecins la disent constipée, son utérus était sur le point d’exploser

Publié par Sophie Raffin
le 12/10/2020
Maj le
6 minutes
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Madeleine Janes, aujourd’hui âgée de 21 ans, a commencé à ressentir de vives douleurs à l’estomac en aout 2015. Les médecins lui ont assuré qu’elle était juste constipée. En réalité, elle avait un deuxième utérus sur le point d’exploser !

Alors âgée de 16 ans, Madeleine James a commencé à souffrir de violents maux de ventre en août 2015. Toutefois les médecins consultés n’ont pas pris ses douleurs au sérieux.

Les médecins ont assuré qu’il s’agissait d’une constipation

La Britannique, alors adolescente, a pris rendez-vous chez son médecin afin de lui faire part de l’immense peine qu’elle ressentait au niveau de l’estomac. Sans lui faire passer aucune analyse, le généraliste a assuré qu’elle souffrait de constipation. Il lui a alors prescrit du Buscopan, médicament utilisé pour traiter les spasmes des voies digestives. 

Mais les crampes ne se sont pas estompées. La jeune fille a commencé à dormir sur le canapé du salon pour pouvoir regarder la télé lorsque les douleurs la maintenaient réveillée. Ses souffrances toujours vivaces, elle est retournée chez son médecin traitant et s’est rendue plusieurs fois aux urgences, sans jamais avoir véritablement été prise au sérieux.

Madeleine Janes a expliqué à la presse anglaise : "Je me souviens d'avoir été examinée par une infirmière qui m'a qualifié d’"hystérique" et a commencé à dire "vous savez à quel point les jeunes filles sont énervées”. Elle m'a fait une injection de Buscopan et nous sommes rentrés à la maison - encore une fois, aucun autre test". Elle ajoute : "pendant un moment, j'avais l'impression d'être folle, comme si j'inventais, tout comme ils l’insinuaient. Je n'avais jamais vraiment été en contact avec les médecins avant cela, alors j'ai juste supposé que ce qu'ils disaient était un fait, car ce sont eux qui ont la qualification derrière eux - je ne vois pas ça comme ça maintenant".

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Elle pensait de son côté que le gluten pouvait être en cause

Si les médecins l’ont fait douter d’elle-même, l’adolescente savait intrinsèquement que quelque chose n'allait pas. Elle a ainsi décidé de supprimer le gluten de son alimentation au cas où elle aurait une maladie cœliaque (ou intolérance au gluten). Toutefois, les douleurs étaient toujours importantes.

Quelques semaines après sa première visite chez le médecin généraliste, Madeleine est partie en vacances dans le Devon avec sa famille pour le 50e anniversaire de sa mère Jane. 

Les maux de ventre étant devenus insupportables pour la jeune fille, elle s'est rendue à l'hôpital local où ils l'ont immédiatement branchée à une perfusion intraveineuse pour soulager la douleur. Elle a également reçu de l’oxygène. L’équipe médicale ont remarqué qu’elle semblait souffrir autant qu’une femme enceinte sur le point d’accoucher. Elle a alors été transférée aux soins intensifs pour être surveillée de près. Les docteurs de cet établissement ont décidé de lui faire passer des tests sanguins, des radiographies et des échographies. Ces différents examens ont permis de révéler l’origine surprenante des vives douleurs de Madeleine Janes…

Elle avait un deuxième utérus remplis de sang menstruel !

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Elle avait un deuxième utérus remplis de sang menstruel !

Les différentes analyses passées dans l’hôpital du Devon ont révélé que Madeleine Janes avait une anatomie particulière. Elle avait deux utérus, deux cols de l'utérus et deux ovaires. Par ailleurs, il lui manquait un rein. 

Une seconde IRM a mis en lumière plus précisément la source de sa douleur. Son deuxième utérus plus petit était bouché et s’était rempli de sang menstruel au cours des quatre dernières années. Si les médecins n’avaient repéré le problème, l’organe aurait pu exploser à cause de la pression provoquée par le liquide accumulé. 

Une chirurgie d’urgence a été rapidement effectuée. L’équipe médicale a drainé plus de 100 ml de sang dans le second utérus. La patiente a pu sortir de l’hôpital sept jours plus tard puis elle a été envoyée vers un spécialiste.

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De nouvelles analyses ont montré qu’un morceau de peau avait poussé au-dessus de son deuxième col de l'utérus, provoquant le blocage du sang menstruel. Elle a dû subir une intervention chirurgicale supplémentaire pour le retirer.

Désormais âgée de 21 ans, Madeleine Janes ne souffre plus. Si elle est heureuse de savoir ce qui se passe réellement dans son corps, elle doit vivre avec les conséquences de sa maladie rare. En effet, les femmes atteintes de cette pathologie ont entre autres un risque accru de fausse-couche ou d’accouchement prématuré.

La douleur des femmes souvent minimisée par les médecins

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La douleur des femmes souvent minimisée par les médecins

Madeleine Janes a décidé de témoigner dans la presse afin d’encourager les femmes à insister auprès du corps médical si elles sentent que quelque chose ne va pas. "Ce mois de septembre a marqué le 5e anniversaire de la découverte de ma maladie et depuis lors, il y a encore tellement de femmes rejetées qui luttent pour obtenir un diagnostic et recevoir un traitement approprié et d’être soulagées de leurs souffrances. C’est si répandu dans la communauté des maladies chroniques". 

La jeune britannique a raison. Elle n’est pas le premier témoignage de femmes repris par Esante.fr montrant la mauvaise prise en compte des douleurs féminines par les médecins. 

Ce phénomène avait également mis en lumière par la journaliste du New York Times Camille Noe Pagán, en mai 2018. Elle pointait du doigt la minimisation de la douleur des femmes par le corps médical. L’Américaine avait expliqué alors  "Je savais pertinemment qu’être incapable de mener une vie normale était un signe alarmant et qu’il fallait que je me fasse aider. J’appelais à l’aide. Le docteur n’avait pas l’impression que j’en aie besoin". Il lui a prescrit du yoga et de la méditation alors qu’elle souffrait en réalité de dépression

Plusieurs études sont venues confirmer les observations des patientes. Un article scientifique publié en 2003 indiquait que le personnel soignant a tendance à prescrire moins d’antidouleurs aux femmes qu’aux hommes après une chirurgie, et même si les femmes se plaignent de douleurs sévères. Une autre recherche réalisée par l’Université de Pennsylvanie montrait que les malades féminines attendaient en moyenne 16 minutes de plus que les hommes pour recevoir des antidouleurs par rapport aux hommes quand elles attendent aux urgences. 

Il est ainsi important de défendre sa propre santé. "Vous connaissez votre corps mieux que quiconque - n’importe quel infirmier, médecin ou spécialiste. Écoutez votre instinct et ce que votre corps vous dit et continuez à persister même si vous rejetez par les médecins. Finalement, la bonne personne vous entendra et vous obtiendrez l’aide dont vous avez besoin. Cela peut prendre un peu de temps pour y arriver, mais ne laissez personne vous dire que tout est dans votre tête", conclut Madeleine Janes dans les pages du Mirror. 

 

Sources

Woman who was branded ‘hysterical’ actually had a second womb on the verge of exploding with four years’ of period blood, Mirror, 11 octobre 2020

The Girl Who Cried Pain: A Bias Against Women in the Treatment of Pain, SSRN, 27 février 2003

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