Femmes enceintes : elles sont 99% à prendre des médicaments !

Publié par Dr Philippe Presles
le 27/11/2000
Maj le
2 minutes
Autre
En France, pratiquement toutes les femmes consomment des médicaments au cours de leur grossesse. Or les femmes enceintes étant exclues systématiquement des essais cliniques de médicaments, leurs effets sur les futurs bébés sont généralement méconnus !

Peut-on suivre un traitement sans danger en cours de grossesse ?

Selon les données des laboratoires pharmaceutiques, moins de 1% des médicaments sont tératogènes (entraînant des risques de malformation fœtale). Par conséquent, il devrait être logique de pouvoir prescrire à une femme enceinte certains traitements utiles et sans danger pour son enfant. Or ce n'est pas toujours vrai voire plutôt rare. En effet, dans la mesure où les femmes enceintes sont systématiquement exclues des essais cliniques de médicaments, les risques potentiels ne sont pas bien connus. En règle générale, il est donc préférable de ne pas suivre de traitement pendant une grossesse.

En moyenne chaque femme reçoit huit prescriptions pendant sa grossesse !

Une étude française menée en 1995 révèle que 74% des femmes suivent un traitement pendant leur grossesse. Plus récemment une analyse sur 1.000 femmes enceintes âgées de 17 à 47 ans (moyenne d'âge: 29 ans) montre que 8.135 ordonnances ont été prescrites à ces femmes et 18.860 prescriptions leur ont été délivrées par les pharmaciens. Seules dix femmes n'ont pris aucun médicament, et à l'opposé, elles sont six à avoir reçu plus de 50 prescriptions pendant les 40 semaines de grossesse !

Quels sont ces médicaments prescrits aux femmes enceintes ?

Le fer est le médicament le plus prescrit avec 75% des femmes (sans danger et universellement recommandé en prévention des carences), viennent ensuite les produits à visée gastro-intestinale pour 69%, les spécialités dermatologiques (63%) et les analgésiques (contre la douleur) pour 62%. Si le bénéfice de leur emploi chez la femme enceinte rend leur utilisation acceptable, elles sont 1,6% à prendre des médicaments pour lesquels des études chez l'homme ont rapporté un effet tératogène, rendant leur prise totalement déconseillée (misoprostol, clomifène ou estradiol).Par ailleurs, ces chiffres sont vraisemblablement sous-estimés car ils ne prennent en compte que les substances délivrées sur ordonnance. Or il faut y ajouter les prescriptions hospitalières, les produits en vente libre sans ordonnance et à un degré moindre les médicaments déjà prescrits et disponibles à domicile. Ces prises médicamenteuses, qui concernent 99% des femmes enceintes, sont très préoccupantes. Elles devraient faire l'objet d'une véritable réflexion de santé publique.

Sources

Lancet, 2000, vol. 356, p 1704, 1735-1736.

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