Faut-il craindre le paracétamol et le riz suite aux alertes de la FDA ?

Publié par Dr Philippe Presles
le 12/08/2013
Maj le
3 minutes
fournitures médicales, pilules et capsules
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La Food and Drud Administration (FDA), en charge de la sécurité alimentaire et médicale aux États-Unis, a lancé ce mois d’août 2013 une alerte sur le paracétamol qui pourrait donner des atteintes cutanées, rares, mais graves. Faut-il écouter de telles alertes ? Pourquoi les grandes administrations cherchent-elles à effrayer les populations ?

Après le riz, le paracétamol

Déjà en septembre 2012, la FDA s’en prenait au riz qui pourrait contenir de l’arsenic. Cette alerte poussa le Ministère la Santé danois à publier une recommandation en mai 2013 que nous avions relayée et analysée dans nos pages dans l’article de Paule Neyrat « De l’arsenic dans notre assiette » (https://www.e-sante.fr/arsenic-dans-notre-assiette/actualite/1835). Nous avions bien entendu essayé d’en dégager des conseils pratiques pour continuer à manger du riz comme avant : il n’y a vraiment pas lieu de se faire peur pour un peu d’arsenic, composé qui est très commun dans la nature.

Ce mois d’août, la FDA pousse le bouchon encore plus loin de mon point de vue : elle signale que des cas graves d’atteintes cutanées ont été observés avec le paracétamol, l’antalgique le plus utilisé au monde et donné à tous les patients, sans aucune contre-indication en dehors des exceptionnelles allergies. Elle aurait ainsi colligé, entre 1969 et 2012, 91 cas de syndrome de Lyell et 16 cas de pustulose exanthématique aiguë généralisée (PEAG). Ces 107 cas ont entraîné 67 hospitalisations et 12 décès. Si je calcule bien, 12 décès en 43 ans, cela fait un décès tous les 3-4 ans aux États-Unis, soit un cas tous les 18 ans en France ou encore un tous les siècles en Belgique.

Autrement dit, on peut continuer tranquillement à prendre notre paracétamol, sans aucune arrière-pensée et on peut aussi jouer au loto, car les chances de gagner le gros lot sont nettement supérieures à celles de subir une telle complication, même mortelle. En effet, on observe pratiquement un nouveau millionnaire grâce au loto chaque semaine !

Le même prétexte pour retirer du marché le Dextropropoxyphène

Ce que je trouve inquiétant avec ce qu’il faut bien appeler une dérive de la peur, c’est que ces arguments sont ensuite repris soit par des Cassandres de la presse à sensation médicale, soit par les autorités à la recherche de prétextes pour interdire un médicament. C’est ainsi que l’an dernier de nombreux rhumatologues nous ont avertis que les autorités retiraient du marché le Dextropropoxyphène, l’anti-inflammatoire le plus puissant du marché, jusque là indispensable pour soulager les formes graves de polyarthrite rhumatoïde.

Là encore c’était le syndrome de Lyell qui était mis en exergue, bien que les rhumatologues affirmaient n’en avoir jamais vu de leur carrière. Pis, faute de Dextropropoxyphène, les spécialistes sont maintenant amenés à prescrire des molécules nettement plus puissantes, plus chères, et moins bien tolérées.

Se méfier de l’abus du principe de précaution

On se demande bien de quoi les administrations veulent nous protéger. À moins qu’il faille mettre ces excès sur le compte du principe de précaution, dont l’usage deviendrait progressivement abusif.

Concernant le paracétamol, il s’agit bien d’une fausse alerte et il ne faut pas en tenir compte. La FDA pourra toujours dire que cette information était destinée aux professionnels de santé, mais elle était accessible à tous sur son site, et reprise par les agences de presse. Ce qui est sûr, c’est qu’elle voulait faire parler d’elle et qu’elle a réussi ! Finalement, les alertes sanitaires, cela devient de la com : CQFD.

Source : Acetaminophen: Drug Safety Communication - Association with Risk of Serious Skin Reactions. FDA 1er août 2013.

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