Dans votre assiette : la pomme de terre

La pomme de terre est un tubercule farineux, denrée majeure de l'alimentation occidentale. Sous forme de légume frais, de produit transformé, utilisée en distillerie et en biscuiterie, elle est présente partout.
Histoires de pommes de terre
Elle est originaire d'Amérique. Les Incas la cultivaient. Il s'agissait de "papas" que l'on faisait sécher au soleil et qui se conservaient longtemps. L'Empereur en ordonnait le stockage pour les distribuer aux paysans durant les famines.C'est là, au Pérou, que la pomme de terre fut découverte par Pizarro et parvint en Europe en 1534. Cinquante ans plus tard, en 1586, elle fut à nouveau découverte en Virginie, par Walter Raleigh, favori de la reine Élisabeth 1re d'Angleterre. Défaut de communication, probablement. Rapportée en Angleterre par Sir Francis Drake, elle fit rapidement partie du quotidien du royaume, malgré son goût assez fade. L'Irlande s'en empara bien plus tard, lors de la grande famine de 1845. Les Anglais la baptisèrent "potato", les Espagnols "batata", puis les Italiens "tartufola", c'est-à-dire "petite truffe" puisqu'elle poussait aussi sous la terre. Il y a de grandes chances que la Tartiflette savoyarde trouve là son origine. Quant aux Allemands et aux Suisses, ils optèrent pour "kartoffel".
Elle fut d'abord une plante ornementale, supplantant le dahlia, puis s'implanta assez vite en Europe pour nourrir les populations décimées par les guerres et les disettes. La pomme de terre était une nourriture bas de gamme, celle des pauvres et des manants. Elle avait vraiment tout contre elle car en même temps, elle jouissait d'une mauvaise réputation d'aliment toxique.
En France, il fallut tout l'acharnement et les ruses de Parmentier pour qu'enfin, à la fin du XVIIIe siècle, les Français affamés consentent à en manger. Doté d'un solide sens du marketing, il organisa en 1785, une cérémonie présidée par le couple royal, Louis XVI portant des tiges fleuries de pomme de terre à la boutonnière tandis qu'elles ornaient la coiffure de Marie-Antoinette. On sait qu'ils ne moururent pas de ridicule. Le Roi autorisa une plantation sur 54 arpents (environ 2 hectares) dans un champ de manœuvres militaires situé dans la plaine des Sablons à Neuilly-sur-Seine. Est-ce une légende ? On ne sait trop. Toujours est-il que, pour bien signifier à quel point ce légume était précieux, Parmentier aurait fait garder cette culture par les soldats du roi, de jour, de façon à inciter les vols la nuit. C'était une bonne stratégie publicitaire.
Instituteurs et prêtres en furent les premiers cultivateurs. La grande famine de 1789 élargit le domaine de cette culture. C'est seulement à partir de 1840 qu'elle devint le produit de base de notre alimentation. Nous en consommons environ 80kg par an en moyenne. Chez nos voisins belges, c'est 200kg par an et par habitant.
Les différentes pommes de terre
Les variétés ont pris le pas. On achète des bintjes, des rattes ou des charlottes, plutôt que des pommes de terre. On distingue :
- celles à chair ferme. Certaines ont une saison : Belles de Fontenay (mars à juin), BF 15 (juillet à mars), Francines (septembre à avril), Pompadours et Rattes (septembre à mai), Rosevals et Rosines. Tandis que Charlottes et Nicolas sont produites toute l'année.
- les courantes. Ce sont les Bintjes, Estimas, Manons, Monalisas, Sambas, Urgentas cultivées et récoltées de l'automne au printemps. Quant aux primeurs ou pommes de terre nouvelles, elles sont récoltées avant leur pleine maturité. Leur peau est fine, elle se détache au grattage. Cette appellation est autorisée du début de la récolte (avril, mai) jusqu'au 31 juillet et à contre-saison pour les pommes de terre d'importation. Celles de Noirmoutier, les plus réputées, atteignent des sommets dans les prix. Celles de l'Ile de Ré, qui bénéficient d'une AOC, ont récemment emboîté ce créneau marketing. Les pommes de terre dites “grenailles” doivent avoir un calibre inférieur à 28mm pour les primeurs et de 28 à 40mm pour les autres.
Comment les choisir ?
Sachez que les pommes de terre arrivent rarement directement de leur champ natal sur les étals des marchés. Beaucoup sont stockées avec des inhibiteurs chimiques et des germicides (mention obligatoire sur l'étiquette). Elles peuvent être aussi irradiées pour empêcher la germination : il est aussi obligatoire de l'indiquer.Une bonne pomme de terre est ferme avec une peau lisse, des “yeux” superficiels, pas de germe. Sa couleur doit être uniforme, sans taches ni reflets verts. Ceux-ci viennent de la solanine, substance qui se développe rapidement à la lumière. Elle est toxique à fortes doses. Mais comme elle rend les pommes de terre amères, il est rare qu'on en consomme. Il est maintenant difficile de trouver des pommes de terre qui ne soient pas lavées. Elles se conservent moins bien et verdissent plus vite que les pommes de terre terreuses. Il faut donc toujours les garder à l'abri de la lumière pour éviter le développement de la solanine : soit dans un placard, soit dans le compartiment légumes du réfrigérateur. Surtout celles qui sont vendues en filets.
Bonnes pour tout le monde ?
Oui. Quand elle n'est pas noyée de gras, elle est très digeste.
Nutrition
La pomme de terre risque de faire grossir seulement lorsqu'on abuse des frites et des chips, qui sont gorgées de gras. C'est un aliment qui ne contient pas de lipides à l'état naturel mais des protéines (2%) et 18 à 20% de glucides. D'où un apport faible de calories : 78 pour 100g quand elle est cuite à l'eau. Tandis que les frites fournissent 275 calories et 15g de lipides. Le record est battu par les chips : 520 calories et 36g de lipides.On comprend pourquoi les enfants qui ne cessent d'en grignoter devant la télé deviennent obèses. Sans compter l'apport de sel (600mg de sodium pour 100g)Sa teneur en vitamine C est intéressante :10mg pour 100g. C'est un apport non négligeable dans notre alimentation. Elle renferme aussi un petit peu de vitamines du groupe B.
Comment les accommoder ?
Si vous les épluchez, faites-le au dernier moment, sinon elles noircissent. Impossible de se lasser de ce légume tant les façons de le préparer sont nombreuses. Elles se coupent de diverses façons : cubes, rondelles, bâtonnets, se cuisent aussi bien à l'eau ou à la vapeur que sautées, ou en papillote, gratins, ragoûts. Sans oublier ce plat de ménage si pratique pour utiliser des restes de viande ou de poisson : le Hachis Parmentier, que nos grands chefs ont remis à la mode. Celles de "consommation courante", dont la chair est plus farineuse, conviennent plutôt pour les soupes, les frites et les purées. Tandis que celles à chair ferme vont mieux pour d'autres formules : robe des champs, sautées, gratins, salades. Quant aux pommes de terre nouvelles, tout leur va sauf la friture et la purée. Les pommes de terre font une purée merveilleuse, mais il est inutile d'y mettre autant de beurre que Joël Robuchon (250g pour 1kg de pommes de terre). Et il ne faut jamais la passer au mixeur sinon elle devient gluante. Elles peuvent accompagner toutes les viandes, volailles et poissons, ainsi que les œufs. Chaque région a son ou ses plats à base de pommes de terre.