Comment parler de sexualité à son enfant ?

Publié par Dorothée Duchemin
le 3/10/2018
Maj le
5 minutes
beautiful blonde caucasian smiling woman talking with her cute daughter
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De "Comment on fait les bébés ?" à "C’est quoi une fellation ?", les enfants sont tous taraudés par la Chose. En tant que parents, comment bien réagir et répondre aux interrogations de sa progéniture. On a posé la question à Sandra Franrenet, auteur de Osez parler de sexe à vos enfants, qui s’est entourée de psychologues, sexologues, gynécologues, pour offrir les clés d’un dialogue sain et ouvert. E-santé.fr fait le point, pour les plus petits.

Laisser l’enfant venir et ne pas rentrer dans les détails

"Il faut laisser venir les questions sans les susciter. Et lorsque les questions viennent, y répondre le plus simplement possible. Il est inutile, voire contre-productif de rentrer dans les détails", indique Didier Lauru, président du centre médico-psycho-pédagogique à Paris, dans le livre de Sandra Franrenet. Pour le spécialiste, il est important de "ne pas abreuver trop tôt [les enfants] d’informations qu’ils ne sont pas prêts à entendre", sous peine de les traumatiser et de nuire à leur bon développement.

Ne pas expliquer par le menu à un petit enfant ce que sont les rapports sexuels est aussi la garantie de le laisser à des activités de son âge : imaginer et se raconter des histoires. Plutôt que d’être dans la technique, "on peut d’abord lui expliquer, que papa et maman voulait qu’il naisse, que c’est un bébé qui est né de l’amour. Cette histoire l’intéressera beaucoup plus que la technique. Ne pas rentrer dans les détails est une manière de leur conserver leur imaginaire d’enfant dont ils ont surtout besoin pour bien grandir !"

Savoir profiter des bonnes occasions

Votre enfant se touche le sexe dans le salon ? Profitez-en pour lui expliquer qu’il a le droit de le faire mais seulement lorsqu’il se trouve seul dans sa chambre. Il s’agira alors de poser les bases de la pudeur et de l’intimité. S’il recommence dans le bain, ce sera alors l’occasion de lui expliquer que son corps lui appartient, que lui seul est autorisé à toucher son sexe (ou son zizi) ou papa et maman pour le laver. "En tant qu’adulte, on a l’impression que parler sexe aux enfants, c’est aborder frontalement la sexualité. Faux, il y a 1 000 façon de parler de sexe aux enfants, sans jamais parler de rapport sexuel", assène Sandre Franrenet.

Que faire en cas de questions gênantes ?

Les parents ont tout à fait le droit de prendre du temps pour réfléchir afin de formuler la meilleure réponse possible à leur enfant. "Il peut lui expliquer qu’il préfère lui répondre plus tard et par exemple s’appuyer sur un livre pour lui apporter la meilleure réponse possible. Mais il ne faut surtout pas botter en touche ou sembler offusqué par une question. Ce qui compte avant tout c’est asseoir un climat de confiance pour que l’enfant comprenne qu’il n’est pas jugé par son parent et qu’il peut lui poser toutes les questions qu’il veut", commente Sandra Franrenet. Cela se joue très tôt. Laisser son jeune enfant sans réponse, c’est prendre le risque de le voir plus tard se tourner vers d’autres personnes que ses parents pour se confier et trouver des solutions.

Faut-il répondre à toutes les questions de son enfant ?

"Le mieux est de répondre par une autre question afin d’évaluer où en est l’enfant. Parfois ils sont très en avance et en savent beaucoup plus que ce qu’on peut le croire. Ou au contraire ils sont à des années-lumière de ces sujets", pose Sandra Franrenet. On adapte alors son discours afin de donner à l’enfant une réponse qui lui convient, sans chercher plus loin. S’il faut toujours répondre, il est important de ne pas rentrer dans les détails ou la technique. Par exemple, à la question qu’est-ce qu’une fellation, on peut tout simplement leur répondre que c’est "un truc que font les grands quand ils en ont envie et qui leur fait plaisir mais tu es un peu petit pour le savoir". Pas besoin d’en savoir plus !

Que faire si son enfant joue à touche-pipi avec un autre ?

Ne pas paniquer ! "Apprenons à distinguer ce qui est de l’ordre du jeu et de la découverte consentie et ce qui relève de l’abus, voire du jeu forcé", précise le Dr Brigitte Letombe, co-auteur de "Et si on parlait de sexe à nos enfants ?". L’expérimentation et l’observation, quitte à toucher pour regarder, sont des étapes tout à fait normales chez les jeunes enfants. Il faut tout simplement expliquer que ça ne se fait pas, sans toutefois dramatiser la situation. "Cela fait partie de ces dogmes à inculquer aux enfants. Ils ne doivent pas toucher le zizi du copain ou de la copine, mais si ça arrive ce n’est pas grave", insiste Sandre Franrenet.. "Il faut bien penser que l’enfant ne projette pas les mêmes choses que les adultes dans le fait de toucher le sexe de l’autre. Il est vraiment dans une logique de découverte", poursuit-elle.

Les bisous et les câlins pour expliquer la sexualité

"Baisers et câlins constituent les préliminaires ; une préparation à la montée du désir. Ils reposent sur les mêmes prérequis que ceux du rapport sexuel. Ce n’est donc pas rien ! Il est important d’apprendre aux enfants dès la maternelle que ça ne se fait pas n’importe où ni devant n’importe qui. De même, ils doivent être consentis : celui qui les donne doit en avoir envie, celui qui les reçoit aussi", assène Samuel Comblez, psychologue clinicien, et psychothérapeute pour adolescent dans "Osez parler de sexe à vos enfants". Là encore, il est n’est pas question de rapport sexuel, pourtant l’adulte pose des principes qui vont ensuite être déclinables dans le domaine sexuel. "Ce qui est valable petit pour des bisous, est valable plus tard en matière de sexe, on est en a train de parler du consentement, du respect de soi et du respect de l’autre", souligne Sandra Franrenet.

Sources

Osez parler de sexe à vos enfants, paroles d’experts, de parents et d’enfants, éd. La Musardine, 2016.

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