Cauchemars : une thérapie pour ne plus en souffrir

Publié par Brigitte Bègue
le 5/04/2016
Maj le
4 minutes
young woman is scared in the night
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Dans la majorité des cas, les cauchemars sont occasionnels mais, chez certaines personnes, ils sont récurrents et source de souffrance. On peut s’en débarrasser par la visualisation répétée d’images positives, une thérapie destinée à transformer le cauchemar en rêve mais encore peu répandue. L'Observatoire B2V des Mémoires s'est penché sur la question.

Tout le monde fait des cauchemars

Les cauchemars ne sont pas le lot de quelques personnes, tout le monde en fait. D’ailleurs, les rêves agréables ne sont pas les plus courants : environ 80% sont négatifs. Mais pourquoi faisons-nous des cauchemars ? Antonio Zadra, directeur du Laboratoire de recherche sur les rêves et les cauchemars à l’université de Montréal : « Pour la grande majorité, il n’y a pas une cause identifiable. Cependant, les personnes très réactives au stress ou à l’anxiété en font plus que les autres. Par exemple, les gens font faire des cauchemars avant un mariage, un licenciement, un examen pour les étudiants... De même, les femmes font plus de cauchemars que les hommes probablement parce qu’elles s’en souviennent plus mais surtout parce que la prévalence de l’anxiété et de la dépression est plus élevée chez elles ».

Ces mauvais rêves peuvent être liés aussi à un traumatisme (violences, accidents, guerre...), à une maladie neurodégénérative, à certains médicaments. La prise de psychotropes ou de bêtabloquants est même la cause à rechercher en priorité chez un adulte qui se met à faire subitement des cauchemars alors qu’il n’en faisait pas auparavant.

Cauchemars : seule une minorité de personnes en souffre

Selon les théories, les cauchemars pourraient servir à assimiler certaines expériences récentes ou passées, à refouler des émotions, à stimuler certaines menaces pour apprendre à se défendre... On les fait pendant le sommeil paradoxal qui a lieu tous les 90 mn et souvent dans le dernier tiers de la nuit car c’est là que cette phase est la plus longue.

« Pendant le cauchemar, notre cerveau voit des images comme si elles étaient réelles. Lorsque l’intensité de l’émotion est trop forte, le cerveau n’est plus capable de maintenir le sommeil et on se réveille avec un sentiment de peur, en colère ou en pleurs », explique le spécialiste.

Environ 5 à 8% de personnes sont gênées par leurs cauchemars. Pour Antonio Zadra : « L’important n’est pas la fréquence mais la détresse que les gens vivent. Il y a des personnes qui font des cauchemars une fois par semaine depuis des années et pour lesquelles ça ne pose aucun problème, cela fait partie de leur vie. Et d’autres qui en font une fois tous les trois semaines et qui en souffrent car les images négatives restent gravées dans leur mémoire et les perturbent ».

Un traitement contre les cauchemars efficace

La plupart du temps, les cauchemars n’ont pas d’incidence sur la vie quotidienne mais chez les personnes qui en font beaucoup ou depuis longtemps, ils peuvent devenir un calvaire et provoquer des insomnies. Certaines personnes retardent le moment d’aller au lit pour les éviter.

« Généralement, les patients subissent les cauchemars comme une fatalité en pensant que l’on ne peut rien faire, précise Antonio Zadra. Or, on peut les traiter par la répétition d’imagerie mentale visuelle. Cette thérapie, mise en place depuis une quinzaine d’années et recommandée par l’Académie de médecine du sommeil aux États-Unis, est très efficace».

Le principe : noter son cauchemar par écrit et visualiser des images positives (ou faire des dessins pour les enfants) dans la journée qui vont transformer le scénario négatif en scénario positif. La visualisation doit être répétée 5 à 10 mn par jour pendant une semaine par cauchemar.

Selon Antonio Zadra, « Certains inventent une nouvelle fin, d’autres imaginent qu’ils sont sauvés par un ami ou qu’ils ont des pouvoirs surnaturels, d’autres encore ne changent qu’un détail comme la couleur d’un mur... Le choix est laissé aux rêveurs ».

Traitement anti cauchemars : à qui s’adresser ?

La thérapie par répétition d’imagerie mentale doit être pratiquée à chaque fois que l’on fait un cauchemar en commençant par le moins bouleversant. Elle a été validée par 15 études internationales sur des personnes atteintes de stress post-traumatique (victimes de viols, blessés de guerre, etc.) mais aussi chez monsieur et madame tout le monde faisant des cauchemars récurrents.

Dans plus de 80% des cas, le nombre de cauchemars diminue ou alors ils sont moins traumatisants et les patients retrouvent une meilleure qualité de sommeil. La technique peut être pratiquée par la personne seule chez elle à condition d’y avoir été entrainé par un professionnel ou en groupe. Le problème est de trouver le bon thérapeute. Pour Antonio Zadra : « En consultation, on reçoit parfois des patients qui font des psychothérapies depuis 15 ans. Ils passent leur temps à chercher la cause de leur cauchemar -dont on leur dit souvent qu’elle est liée à l’enfance alors que l’on a très peu d’évidence clinique et empirique- mais ils continuent à en faire. Il n’y a pas de raison de les laisser souffrir ». Le mieux est de s’adresser à un centre du sommeil disposant de spécialistes des cauchemars mais il y en a peu.

A l’hôpital de la Pitié Salpetrière (Paris), le service des pathologies du sommeil du Pr Isabelle Arnulf propose des consultations spécifiques.

Sources

Entretien avec Antonio Zadra,  directeur du Laboratoire de recherche sur les rêves et les cauchemars à l’université de Montréal.

Conférence de presse « Rêves et Mémoire », organisé par l'Observatoire B2V des mémoires, le 24 mars 2016.

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