Pourquoi je ne suis pas favorable aux médicaments en grandes surfaces

Trouver dans les grandes surfaces des médicaments qu’il est possible d’acheter sans ordonnance, a priori, l’idée mérite réflexion.Les prix pourraient baisser et on pourrait les acheter en les ajoutant dans le caddy.Mais à y regarder de plus près, les conséquences sont potentiellement redoutables avec fermeture de nombreuses pharmacies de proximité et la fin de notre modèle d’accès à tous aux médicaments le soir et le week-end.Sans oublier les indispensables conseils du pharmacien.
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Qu’il semble loin le temps où la France était à la pointe de la production de médicaments, de l’industrie du diagnostic médical, de la recherche scientifique. Aujourd’hui 50 % des médicaments produits dans le monde le sont en Chine ou en Inde et 80 % de la recherche médicale est réalisée aux États-Unis. Il ne nous reste que l’industrie du vaccin, mal en point dans un pays qui se vaccine de moins en moins. Même les génériques ne sont plus fabriqués en France et nous avons perdu notre savoir-faire en chimie industrielle.

De fausses économies

Derrière cette logique infernale, toujours le même constat : un pays dont l’économie de santé est trop encadrée n’offre pas un écosystème favorable à ses industriels qui ne disposent pas d’un marché intérieur fort pour se développer. On fait des économies à court terme, mais on les paye très cher à long terme.

C’est au tour de la distribution pharmaceutique de passer sous les fourches caudines de la rigueur budgétaire. Elle l’est déjà depuis longtemps avec l’obligation de substituer les produits génériques et ses marches lissées. Mais la perspective de voir les grandes surfaces autorisées à vendre les médicaments est un nouveau coup dur qui pourrait s’avérer être le coup de grâce.

Des déserts médicaux partout en France

Je me souviens d’une petite ville de l’Anjou : Durtal, son château, son marché et son centre-ville dynamique avec tous ses commerçants. Et puis une grande surface s’est installée dans sa banlieue. Durtal est devenue en moins de six mois une ville quasiment morte. Il ne restait plus que le pharmacien, un boulanger appauvri, un boucher attendant sa retraite avec impatience. Un autre exemple plus récent doit nous faire réfléchir : avec Amazon les libraires ferment partout dans le monde.

Arrêtons de nous faire croire que ces jeux sont sans conséquences et ne sont pas mortifères. On veut nous faire gagner 10 % sur notre boîte de paracétamol à moins de 2€ ? Soit. Mais à quoi nous servira ce « nouveau » pouvoir d’achat, quand les médecins de notre département seront partis à la retraite, que le pharmacien de notre petite ville aura mis la clé sous la porte et que nous serons malades le soir ou le dimanche ? C’était pourtant pratique de pouvoir parler au pharmacien pour savoir si l’on devait aller consulter en urgence ou s’il pouvait nous proposer une solution provisoire. Après les petites villes mortes, le désert médical ? C’était pourtant l’honneur de la France de pouvoir proposer à tous ses citoyens un accès aux soins partout. Et le pharmacien assure aujourd’hui un rôle clé dans ce dispositif.

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