Souffrez-vous d’allergie alimentaire, d’intolérance alimentaire, ou êtes-vous juste hypersensible ?

Publié par Paule Neyrat
le 13/04/2016
Maj le
7 minutes
concept d'allergie alimentaire - pain, lait, fruits, noix, œufs et haricots sur fond blanc
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Allergies et intolérances alimentaires occupent la scène médiatique à cause de leur spectaculaire multiplication. Nombreuses sont les informations, souvent contradictoires. D’autant plus qu’aux allergies et aux intolérances, s’ajoutent maintenant les hypersensibilités. On fait le point. 

L’allergie alimentaire, c’est quoi ?

L’allergie alimentaire, c’est le refus brutal et obstiné de votre corps d’intégrer et de métaboliser une substance que vous aviez pourtant déjà avalée avant sans problème car, normalement, elle n’est pas dangereuse.

Un beau jour, votre organisme, à votre insu, décide que cette substance est dangereuse pour lui et il en fait un allergène. Il déclenche alors sa réaction de défense habituelle pour vous protéger en secrétant des masses d’anticorps alors qu’en fait vous n’en avez pas besoin.

Vous devenez alors allergique à cette substance devenue dangereuse et lorsque vous allez de nouveau l’avaler, les symptômes spectaculaires de l’allergie vont se déclencher. Car ces anticorps se sont fixés sur certains de vos globules blancs appelés mastocytes qui se trouvent dans votre peau et dans vos muqueuses. Et qui contiennent de l’histamine, un médiateur chimique.

C’est cette histamine qui va vous donner toutes les abominables manifestations de l’allergie : asthme, diarrhées, gratouilles et/ou urticaire, rhume, conjonctivite, gonflement des paupières, lèvres, langue, gorge (œdème de Quincke) et le pire, le choc anaphylactique qui peut être mortel s’il n’est pas immédiatement traité.

Autrement dit, l’allergie alimentaire ça peut être un truc vraiment abominable.

C’est pourquoi l’allergène doit être systématiquement éliminé de l’alimentation.

Quels sont les allergènes ?

Ils sont légion. Des acariens en passant par les pollens, les moisissures, des médicaments, les poils de chat, les venins d’insectes, le latex, certains métaux, certains additifs etc.

Et les aliments.

Une liste des 14 allergènes majeurs a été officiellement établie et que tous les professionnels de l’alimentation doivent afficher dans leur établissement ou sur les produits qu’ils fabriquent. Ce sont les crustacés, les mollusques et les poissons, l’œuf, le lait, l’arachide, le soja les fruits à coque, le céleri, la moutarde, le sésame, le lupin, l’anhydride sulfureux (sulfites qui donnent aussi une intolérance) et le gluten.

Si l’allergie au gluten est relativement rare, cette protéine est hélas beaucoup plus souvent à l’origine de la maladie cœliaque (voir ci-dessous). D’où sa présence dans la liste des allergènes majeurs.

Mais en fait, tous les aliments peuvent devenir allergènes puisque ce sont des corps étrangers à votre organisme.

Et le problème se complique encore avec les allergies croisées quand certains fruits ou légumes ont des protéines semblables à celles d’autres substances allergènes. Vous êtes par exemple allergique au pollen du bouleau et vos lèvres s’irritent et gonflent quand vous croquez une pomme.

Ces allergies croisées sont un véritable casse-tête pour les allergologues tant elles sont nombreuses et compliquées.

L’intolérance alimentaire, c’est quoi ?

C’est l’incapacité de votre intestin à digérer un composant d’un aliment.

L’intolérance alimentaire ressemble à une allergie, mais ça n’en est pas une car votre système immunitaire n’est pas impliqué.

Si vous êtes allergique, vous ne supportez pas la moindre quantité d’un allergène sans faire une crise brutale. Tandis que si vous êtes intolérant (e), vous êtes victime de malaises essentiellement digestifs qui ne mettent pas votre vie tout de suite (ou pas du tout) en danger, quelle que soit la quantité de lactose, de gluten ou de sulfites que vous avalez.

Les intolérances alimentaires les plus fréquentes sont celles au lactose, au gluten et aux sulfites (voir ci-dessous).

L’hypersensibilité, c’est quoi ?

L’hypersensibilité alimentaire se manifeste par toutes sortes de réactions désagréables après que vous eussiez mangé l’aliment auquel vous êtes hypersensible : malaises digestifs divers, gratouilles, asthme, rhinite, migraine, douleurs etc. qui fatiguent.

Ces symptômes mettent toujours du temps à se manifester et comme ils peuvent être aussi dus à autre chose, il est d’autant plus difficile et long de les identifier comme venant d’une hypersensibilité.

L’hypersensibilité alimentaire n’est pas vraiment une allergie encore qu’elle se développe souvent chez une personne qui est déjà allergique.

Ce n’est pas non plus une intolérance bien que, en ce qui concerne le gluten, elle soit trop souvent confondue avec la maladie cœliaque qui est une véritable intolérance au gluten.

L’hypersensibilité alimentaire - et surtout celle au gluten - se développe de plus en plus depuis quelques temps. Mais pour le moment, on n’a pas vraiment d’explication scientifique, bien qu’un grand nombre de chercheurs s’activent pour en trouver.

Le gluten : intolérance et hypersensibilité

Dans le passé, la maladie cœliaque a malheureusement été baptisée « intolérance au gluten ». D’où toutes les confusions actuelles.

Dans la maladie cœliaque, le gluten, quand il arrive dans votre intestin grêle, déclenche une réaction immunitaire et la production d’anticorps. Cela crée une inflammation qui détruit peu à peu les villosités intestinales et empêche l’absorption des éléments nutritionnels. Ce n’est donc pas une intolérance puisque dans celle-ci, il n’y a pas de réaction immunitaire.

Principales manifestations : diarrhées, douleurs, ballonnements. Mais aussi fatigue et parfois douleurs articulaires, dépression. Et, si la maladie cœliaque n’est pas jugulée par l’élimination totale du gluten de l’alimentation, on en arrive à une dénutrition catastrophique qui met la santé en danger.

Les manifestations de l’hypersensibilité au gluten sont à peu près les mêmes avec une intensité variable selon les personnes. Mais, heureusement, les parois de l’intestin grêle ne sont pas abîmées.

Cettehypersensibilité au gluten, faussement et dangereusement baptisée intolérance dans le langage courant, est quasiment devenue un phénomène de société conduisant aussi à la mode débridée du régime sans gluten.

Danger du régime sans gluten : masquer une maladie cœliaque

Le diagnostic de la maladie cœliaque se fait d’abord grâce à un test sanguin qui permet de détecter les anticorps. Puis, si ceux-ci sont présents, il se confirme avec un prélèvement de tissu intestinal (biopsie).

Ensuite, le seul et unique traitement de la dramatique maladie cœliaque est l’éviction totale du gluten de l’alimentation. Les villosités de l’intestin se reconstituent alors très vite et tout s’arrange.

Mais si vous plongez dans le régime sans gluten pour céder à la mode actuelle et/ou que vous avez des problèmes digestifs, vous pouvez alors masquer la maladie cœliaque qui vous habite peut-être. Elle s’est calmée puisque vous n’absorbez plus de gluten, mais quand vous en aurez marre de ce régime très contraignant, et que vous mangerez du pain et d’autres céréales, elle ressurgira inévitablement.

C’est pourquoi il est absolument indispensable de consulter un gastro-entérologue avant d’entamer un régime sans gluten !

Mieux vaut savoir si vous avez vraiment une maladie cœliaque, ce qui n’est pas impossible car elle semble se développer de plus en plus, ou une hypersensibilité au gluten qui est plus facile à gérer car de petites quantités de cette protéine se supportent facilement, d’où un régime moins contraignant.

Sulfites : allergie et intolérance

Les sulfites sont peu médiatisés, pourtant ils font partie de la liste des 14 allergènes majeurs bien qu’ils suscitent le plus souvent une intolérance.

Les sulfites se trouvent dans tous les vins, surtout dans les blancs. Ils sont un produit naturel des levures responsables de la vinification. On en ajoute parfois aussi pour améliorer celle-ci.

Ils sont aussi très employés comme conservateurs : crevettes, fruits secs, plats industriels etc. pour empêcher leur oxydation. On les trouve aussi dans des médicaments.

Ils sont codés de E220 à E228 et E539.

Les sulfites peuvent donner des maux de tête, des difficultés respiratoires, des éternuements, le nez qui coule ou qui se bouche, des troubles digestifs, des gratouilles. Tout cela en même temps ou séparément, selon les quantités absorbées et la sensibilité de chacun.

Comme pour les allergies, les intolérances et les hypersensibilités, le traitement est un régime sans. Bizarrement, il n’est pas à la mode.

Régime « sans » : quand faut-il l’adopter ?

Toujours après avoir consulté son médecin généraliste !

Il vous aiguillera ensuite sur un allergologue ou un gastro-entérologue qui saura débrouiller une situation toujours très compliquée car les manifestations des allergies, des intolérances, et même de l’hypersensibilité sont à peu près les mêmes.

Même si le traitement consiste à éliminer le ou les aliments que vous ne supportez pas, le fait de plonger dans un régime « sans » de votre propre initiative parce que c’est actuellement à la mode, peut masquer une autre maladie.

Sources

- Directive 2007/68/CE de la Commission du 27 novembre 2007 : Accessible à : http://eurlex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2007:310:0011:0014:FR:PDF

http://allergo.lyon.inserm.fr/ALLERGIE_ALIMENTAIRE/8_Pollinose_allergie_alimentaire.pdf

- Carrocio A, Brusca I, Mansueto P, Pirrone G, Barrale M, Di Prima L, Ambrosiano G, Iacono G, Lospalluti ML, La Chiusa SM, Di Fede G. A cytologic assay for diagnostis of food hypersensitivity in patients with irritable bowel syndrome. Clin Gastroenterol Hepatol. 2010 Mar; 8 (3): 254-60.

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