Sécheresse vaginale : deux techniques pour révolutionner la vie sexuelle des femmes

Le point avec le Dr David Elia*, gynécologue qui emploie les termes de « petite révolution médicale ».
Ménopause, chimio et cancer du sein = sécheresse vaginale et rapports sexuels douloureux
L’arrêt de la sécrétion des estrogènes à la ménopause s’accompagne d’une sécheresse vaginale. En effet, en l’absence de cette hormone, la muqueuse s’amincit, s’appauvrit en vaisseaux sanguins et se fragilise. Les rapports sexuels peuvent alors entraîner des blessures par déchirures et des douleurs à l’origine d’une diminution de la fréquence des relations. Parallèlement, précise le Dr Elia, « si les rapports se raréfient, l’orifice vaginal se rétrécit, rendant la pénétration d’autant plus difficile et douloureuse sur les premiers centimètres. Les rapports deviennent de plus en plus désagréables, voire douloureux, menant à un arrêt de sexualité avec introduction vaginale. »
Cette situation typique de la ménopause se rencontre également lors de certaines chimiothérapies, ou après un cancer du sein puisque les traitements visent à empêcher les estrogènes d’agir.
Contre l’atrophie vaginale, quelles sont les solutions ?
La solution numéro 1 est de prendre des estrogènes sous la forme d’un traitement hormonal substitutif (THS) ou par voie locale via un gel ou des gélules. Mais toutes les femmes ne peuvent pas suivre un tel traitement. C’est le cas par exemple des femmes qui ont un cancer du sein et pour lesquelles les estrogènes sont contre-indiqués. Et elles sont de plus en plus nombreuses. En effet, grâce aux progrès réalisés en matière de dépistage et de traitement, 80% d’entre elles sont vivantes dix ans après le diagnostic.
Dr Elia : « Dans la majorité des cas, le cancer du sein n’est plus une maladie fatale, mais une maladie chronique. Ces femmes ayant eu un cancer du sein ont d’autant plus d’années à vivre sans estrogènes et certaines vont souvent développer les problèmes d’atrophie vaginale décrits précédemment et en subir les conséquences, surtout si le diagnostic a été porté précocement, c’est-à-dire avant 50 ans... Les traitements antiestrogéniques (les antiaromatases) prescrits dans le cancer du sein sont eux-mêmes agressifs pour la muqueuse vaginale, renforçant son altération, d’autant plus qu’ils sont suivis sur de très longues périodes, 5 ans après la chirurgie du cancer et parfois sur une dizaine d’années. Ces femmes qui ne peuvent pas prendre de THS se retrouvent dans une impasse totale. C’est également le cas des femmes ménopausées sans contre-indication, mais qui refusent le THS, le considérant à tort à risque de cancer ou vasculaire. »
Aujourd’hui, deux nouvelles stratégies s’offrent à elles : le laser CO2 fractionné et l’acide hyaluronique.
Le laser CO2 fractionné
Cette technique est en place depuis 5-6 ans. Elle consiste à insérer un tube de 2 cm de diamètre dans le vagin jusqu’au col de l’utérus. Celui-ci est ensuite retiré progressivement, cm par cm à mesure qu’il envoie un rayon laser sur la paroi vaginale. Totalement indolore, cet acte se réalise en ambulatoire au cabinet du médecin sans anesthésie. Il faut compter 2 à 3 séances, parfois 4, espacées d’un mois, avec généralement une séance de rattrapage entre 8 à 15 mois plus tard.
Comment ça marche ?
Dans le vagin, le laser entraîne une microabrasion indolore, obligeant la muqueuse à refabriquer des fibres élastiques, des fibres de collagène, de l’acide hyaluronique et des micro-vaisseaux sanguins, lesquels jouent un rôle dans la lubrification.
Les résultats sont très positifs dès la première séance, avec une amélioration des symptômes de l’ordre de 30 à 40%, les séances suivantes en apportant en général encore 5 à 15% à chaque fois.
Les effets secondaires sont quasi inexistants et pour l’instant, aucune complication n’a encore été répertoriée, laissant présager qu’elles sont exceptionnelles. Les contre-indications sont peu nombreuses : muqueuse infectée (herpès, mycose) et cystite.
Chez certaines femmes dont l’orifice est très rétréci, il est nécessaire de commencer par des dilatations vaginales progressives à réaliser soi-même à domicile à l’aide d’une sonde spécialisée en silicone.
À noter que l’atrophie du vagin est souvent associée à des problèmes urinaires (impériosités, brûlures), qui sont en même temps améliorés par les séances de laser.
Il s’agit ici d’une « petite révolution médicale », ce traitement permettant à des centaines de milliers de femmes de retrouver une sexualité correcte.
« Le seul point négatif est le prix, tempère le Dr Elia. Les machines laser coûtent très cher, faisant grimper le coût des séances autour de 350-450 euros, non remboursés par la Sécurité sociale. »
Les infiltrations d’acide hyaluronique
Cette deuxième stratégie est plus récente et dérive elle aussi des techniques utilisées en médecine esthétique contre les rides. On a constaté que les infiltrations d’acide hyaluronique n’avaient pas qu’un simple effet de remplissage, mais également une action de régénération importante sur la peau. L’acide hyaluronique agit sur le vagin sur les mêmes cibles que le laser, en particulier sur les fibrocytes pour produire davantage de fibres, d’acide hyaluronique et de vaisseaux sanguins.
« Les infiltrations sont réalisées dans la paroi vaginale postérieure, sur quelques centimètres seulement, à l’aide d’un acide hyaluronique spécifique, français, dédié à cet usage avec pour indication l’atrophie vaginale. Deux heures avant, la patiente applique elle-même un anesthésique de contact dans le vagin. L’acte est ensuite réalisé au cabinet médical en ambulatoire. Une seule séance suffit souvent à redonner le confort sexuel perdu, avec un coût similaire à celui du traitement complet par laser C02 fractionné.
Dans un proche avenir, il sera peut-être proposé de mixer les deux stratégies, acide hyaluronique et laser.
« Ces deux stratégies très récentes doivent être proposées à toutes les femmes en carence estrogénique pour lesquelles le traitement hormonal est contre indiqué ou non souhaité, dont la sexualité est difficile ou douloureuse et qui souhaitent retrouver une vie sexuelle « comme avant », conclut le Dr David Elia.
Sources
* En collaboration avec le Dr David Elia, gynécologue, rédacteur en chef du magazine GENESIS.