Parkinson : les particules fines agressent aussi les neurones

En France, 177 624 personnes sont atteintes de la maladie de Parkinson, selon l’assurance maladie. Et en 2020, près de 26 000 nouveaux cas ont été diagnostiqués. Un nombre en constante augmentation en raison du vieillissement de la population.
Deuxième pathologie neurodégénérative la plus courante après la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson se caractérise par la destruction progressive de certains neurones du cerveau, les neurones dits à dopamine. Ce neurotransmetteur assure la bonne communication entre les neurones du cerveau et intervient notamment dans le contrôle des mouvements ou encore la cognition.
Parkinson, une cause majeure de handicap
Cette mort neuronale s’accompagne de l’accumulation d’amas anormaux (les corps de Lewy) d’une protéine toxique, l'alpha-synucléine. Un phénomène auquel s’ajoute une inflammation du tissu cérébral et une activité anormale des mitochondries, les usines à énergie des cellules, décrit l’Institut national de la recherche médicale (Inserm). Ces problématiques provoquent une série de symptômes, facteurs majeurs de handicap chez le patient : difficultés à se mouvoir, à marcher, à parler, à écrire, à dessiner (…), à coordonner les mouvements, troubles des fonctions cognitives (de la compréhension, du raisonnement, de la logique), atteinte des affects, de la motivation.
Parkinson : les facteurs de risque environnementaux
Le vieillissement apparaît comme le principal responsable de l’apparition de la maladie de Parkinson (elle touche avant tout les personnes de plus de 50 ans). Mais elle peut aussi profiter de prédispositions génétiques, bien que ce facteur de risque soit moins fréquent.
Des causes environnementales sont aussi identifiables. Les polluants figurent ainsi parmi les coupables du développement de cette maladie neurologique. Aussi l’exposition prolongée à des solvants organiques, à des métaux lourds (mercure, plomb, cadmium) dans le secteur industriel est considéré comme un facteur de risque. En milieu rural, l’exposition à certains pesticides pourrait aussi faire le lit de son développement. Depuis 2012, la maladie de Parkinson est d’ailleurs reconnue au rang des maladies professionnelles chez les agriculteurs exposés de manière prolongée aux produits phytosanitaires, rappelle la Fondation pour la recherche médicale.
Particules fines et Parkinson : une liaison dangereuse
Il semblerait que la pollution atmosphérique pourrait elle aussi jouer un rôle dans la survenue de cette pathologie. Les chercheurs du Barrow Neurological Institute de la Dignity Health Arizona, aux Etats-Unis, viennent de mettre le doigt sur une nouvelle association jusqu’ici méconnue, mais non moins inquiétante : la relation entre l’exposition aux particules fines et la maladie de Parkinson.
Leur étude, parue le 30 novembre 2023 dans la revue Neurology, révèle que les personnes vivant dans des régions présentant des niveaux médians de pollution atmosphérique courent un risque accru de 56 % de développer la maladie de Parkinson que celles vivant dans des régions moins polluées.
C’est la première fois qu’une telle corrélation est établie, font valoir les chercheurs dans un communiqué. "Des études antérieures ont montré que les particules fines provoquaient une inflammation dans le cerveau, un mécanisme connu par lequel la maladie de Parkinson pourrait se développer", explique Brittany Krzyzanowski, chercheuse à l'Institut neurologique Barrow, directrice de l’étude. "En utilisant des techniques d'analyse géospatiale de pointe, nous avons pu, pour la première fois, confirmer une forte association à l'échelle nationale entre la maladie de Parkinson et les particules fines aux États-Unis".
Des régions des Etats-Unis plus à risque que d’autres
Autre enseignement intéressant, les travaux donnent à voir des disparités entre les régions des Etats-Unis étudiées. Ainsi, dans certaines régions plus polluées telles que la vallée du Mississippi, l'Ohio, le centre du Dakota du Nord, certaines parties du Texas, le Kansas, l'est du Michigan et la pointe de la Floride, les habitants seraient plus susceptibles de développer la maladie de Parkinson. Dans ces régions, « la pollution dans ces zones peut contenir davantage de particules de combustion [issues] de la circulation et de métaux lourds provenant de l'industrie manufacturière, qui ont été associés à la mort cellulaire dans la partie du cerveau impliquée dans la maladie de Parkinson", analyse l’auteure de l’étude.
A l’autre bout du spectre, les Américains résidant dans la moitié ouest des États-Unis (des régions moins soumises à la pollution atmosphérique) seraient plus épargnés. Ils auraient un risque moindre de souffrir de la maladie de Parkinson par rapport au reste du pays.
"Dans certaines régions, les particules peuvent contenir davantage de composants toxiques que dans d'autres", subodore Brittany Krzyzanowski.
Parkinson : mieux considérer la pollution de l’air comme facteur de risque
En tout, les chercheurs américains ont identifié près de 90 000 personnes atteintes de la maladie de Parkinson, géolocalisées en fonction de leur quartier de résidence. Pour cela, ils ont décortiqué une base de données Medicare de près de 22 millions de participants. L’équipe a calculé les taux de la maladie de Parkinson dans chaque région, ainsi que les concentrations annuelles moyennes de particules fines.
Après avoir pris en compte d'autres facteurs de risque, notamment l'âge, le sexe, la race, les antécédents de tabagisme et le recours aux soins médicaux, une association claire a été établie entre l'exposition antérieure d'une personne aux particules fines et le risque de développer la maladie de Parkinson plus tard.
Alors que jusqu’ici les efforts de recherche se sont concentrés sur l’impact de l’exposition aux pesticides sur la maladie de Parkinson, les chercheurs espèrent que leurs travaux oeuvront à faire bouger les lignes, dans le sens d’une meilleure prise en considération de la toxicité de la pollution de l’air sur les maladies neurologiques comme Parkinson. " Des études géographiques basées sur la population comme celle-ci ont le potentiel de révéler des informations importantes sur le rôle des toxines environnementales dans le développement et la progression de la maladie de Parkinson ", conclut Brittany Krzyzanowski.