Complexes physiques : pourquoi si peu d'estime de soi ?

Ne pas supporter son image
Notre corps est un peu notre "vitrine" : il nous protège, et en même temps il nous expose aux regards de notre entourage. Le problème est que l'idée que nous nous faisons de lui est rarement en accord avec ce que les autres pensent de nous. "Si futile que cela puisse parfois paraître, des gens, absolument pas monstrueux, ont un rapport à leur image qui les parasite au point même de les empêcher de vivre une vie épanouie" note Gérard Guillerault, psychanalyste et psychothérapeute. "Certaines personnes souffrent même si profondément dans leur corps qu'elles ne peuvent parfois même plus se regarder dans une glace. Si cette souffrance est tellement disproportionnée par rapport à la réalité, c'est sans doute bien que la problématique, même si elle vient se focaliser sur le reflet de l'enveloppe corporelle, se joue en fait à un tout autre niveau de reconnaissance, d'acceptation et de valorisation de soi".
Difficile adolescence…
L'adolescence est la période où l'on entretient les rapports les plus difficiles avec son corps dans la mesure où l'adolescent quitte sa coquille d'enfant et n'est pas encore à même d'endosser une carapace d'adulte. C'est cette situation, dans laquelle l'adolescent est mis à nu face à ses émotions et aux regards des autres, que la célèbre psychanalyste Françoise Dolto a appelée «le complexe du homard». « On guette dans le miroir le surgissement de soi-même confronté à une image idéale », écrit-elle. Ses nouvelles réalités anatomiques alliées aux sensations de la puberté peuvent le perturber et l'amener à rejeter en bloc ou focaliser sur certaines parties de son corps. Mis en danger dans son univers affectif, ses désirs, sa sexualité, il a besoin, pour exister, d'être reconnu par d'autres. Alors l'adolescent se construit sur un modèle fondé sur les critères de la bande, de la mode, des valeurs du groupe.. Mais cette tyrannie du « look » et de l'apparence physique est toujours douloureuse, car parvenir à se rapprocher de son idéal est fortement dépersonnalisant, tandis que ne pas y parvenir est une souffrance sans cesse renouvelée.
Le corps valorisé par les parents
C'est donc à l'adolescence que commence à se faire le décalage entre une image idéale et celle de notre corps réel. Mais cette période est dépassée facilement si l'on a bénéficié d'un environnement propice à bien vivre l'image de son corps. L'enfant construit son estime de soi avec ce qu'il perçoit dans le regard de ses parents. Ils seront d'une aide précieuse s'ils sont eux-même à l'aise avec leur image, et valorisent à la fois leur enfant et son corps. C'est ainsi que les critiques parentales, ou de l'entourage, du type : «tu es grosse», «tu es mal coiffé» entament l'estime de soi de l'enfant. Ajoutons à cela la liaison intime entre l'image de soi et la sexualité, le corps étant l'expression et l'outil de la sensualité. Un climat familial détendu par rapport à la sexualité, non culpabilisé ou incestueux, permet de mieux accepter le potentiel de séduction de son corps à l'adolescence. Les complexes sont combattus en apprenant à se détacher peu à peu du regard des autres, et de l'image de soi acquise durant l'enfance et l'adolescence. Ce travail d'acceptation de soi est parfois long. Pour dépasser ses complexes, une thérapie peut aider à retrouver l'estime et l'amour de soi pour enfin être content(e) et satisfait(e) de son corps et de son image. Mais parfois, une rencontre amoureuse positive et valorisante, ou même un relooking suffisent pour remettre les pendules à l'heure !
En savoir plus :
- Paroles pour adolescents, ou le Complexe du homard, Françoise Dolto, éd. Hatier.- L'estime de soi, Christophe André et François Lelord, éd. Odile Jacob.- Avoir confiance en soi, Marie Haddou, éd. Flammarion.- La consultation psychosomatique, Dr Sylvain Mimoun, éd. Les Empêcheurs de penser en rond.- Le corps et la beauté, Jean Maisonneuve, Marilou Bruchon-Schweitzer, éd. PUF-Que sais-je ?