Mutilation sexuelle : l'excision perdure

e-sante : Voyez-vous des cas d'excision en France ?
Luce Caritoux : Oui, actuellement, on estime que 135 fillettes et adolescentes sont sexuellement mutilées ou menacées de l'être en France de l'avis d'experts (GAMS - Groupe de femmes pour l'abolition des mutilations sexuelles - et OMS). Elles sont issues de l'émigration d'Afrique noire, majoritairement de trois pays : Sénégal, Mali, Mauritanie, mais il y a aussi des enfants, fillettes et femmes du Bénin, d'Égypte, d'Éthiopie, de Gambie, du Ghana, de Guinée, du Kenya, du Liberia, du Nigeria, d'Ouganda, de Somalie, du Soudan et du Tchad.
En Ile-de-France, 19.000 fillettes sont concernées par les mutilations sexuelles. Les autres vivent dans les départements de Seine-Maritime, Ille-et-Vilaine, du Finistère, du Nord, de la Marne, de la Meuse et des Bouches-du-Rhône.
e-sante : Cette tendance tend à augmenter ou à diminuer ?
Luce Caritoux : Les mutilations sexuelles féminines constituent une atteinte aux droits de la femme et de l'enfant. Pour l'Organisation mondiale de la santé (OMS), ces pratiques constituent la tradition actuelle la plus dangereuse en matière de santé publique. Il est évident qu'elles ne cessent d'être pratiquées, bien que de nombreux pays aient adopté des lois contre ces pratiques. Une question se pose : la répression est-elle la seule solution ?
e-sante : En pratique, quelles sont les actions de prévention ?
Luce Caritoux : Il est nécessaire d'associer la répression à des campagnes d'information soutenues et patientes en direction de toute la population (féminine et masculine), ainsi qu'à la scolarisation féminine, dans les pays où les mutilations sexuelles sont réalisées. Les migrantes, dans la société occidentale, doivent aussi être informées. En France, plusieurs associations luttent, ensemble, contre ces pratiques. C'est le cas du GAMS qui mène une action d'information auprès des femmes immigrées, du personnel médical et paramédical, depuis 1982. Citons aussi la Commission pour l'abolition des mutilations sexuelles (CAMS) dans le domaine judiciaire. Cette commission se constitue partie civile en Cour d'Assises lorsque des cas de mutilations sont signalés. En effet, grâce à cette association, une vingtaine de procès ont eu lieu. En 1995, la CAMS a obtenu le prix des Droits de l'homme de la République Française.
* Puéricultrice et enseignante, Luce Caritoux est administrateur de l'ANPDE (Association Nationale des Puéricultrices diplômées et des Enseignantes). L'excision sera l'une des problématiques abordées lors du congrès annuel des puéricultrices qui se déroulera à Marseille, les 22 et 23 juin 2006.
Journées Nationales d'Études des Puéricultrices
Les 31e Journées Nationales d'Études des Puéricultrices rassemblent les professionnels de la petite enfance à Marseille, les 22 et 23 juin 2006. Ces deux journées de conférences mettront en lumière plusieurs problématiques comme l'excision, la circoncision ou le cancer de l'enfant. Un programme riche et varié à consulter sur le site www.anpde.asso.fr