Les retardateurs de flamme nous empoisonnent à petit feu

Publié par Rédaction E-sante.fr
le 17/05/2013
Maj le
4 minutes
mains tenant le moule de la maison
getty
Que sont les retardateurs de flamme et où les trouve-t-on ? Quels sont leurs effets sur la santé ? Le point sur ces substances chimiques « anti-feu » et quelques conseils pratiques pour s’en protéger.

Les retardateurs de flamme sont partout…

Un retardateur de flamme est une substance que l’on ajoute lors de la fabrication d’un matériau pour lui conférer une résistance au feu et répondre aux normes de sécurité incendie. On diminue ainsi le risque qu’un vêtement, un canapé, une télévision, un appareil électrique, électronique ou tout autre matériau de construction, ne prenne feu. À noter que le retardateur de flamme empêche le départ du feu mais aussi sa propagation en ralentissant la combustion.

Des retardateurs de flamme dans toute la maison

Aujourd'hui, la plupart des objets qui nous entourrent contiennent des retardateurs de flamme : matières plastiques d’appareils électriques, électroménagers et électroniques (câbles, ordinateurs, télévision), vêtements, tapis, tissus d’ameublement, mobiliers, mousses et matériaux de rembourrage, isolants, peintures, certains matériaux de construction, etc.

Quels sont les risques pour notre santé ?

Sol, air et eau : les retardateurs de flamme s'accumulent dans notre environnement

L’utilisation croissante des retardateurs de flamme au cours des dernières décennies s’est accompagnée d’une diminution des incendies résidentiels, mais parallèlement, ces substances se sont accumulées dans notre environnement (sol, air, eau) et dans les organismes vivants, notamment dans les graisses, ce qui conduit à une exposition de plus en plus importante de la population. Or ces substances ignifuges ont potentiellement des effets sur la santé, ce qui a mené l’Union Européenne à règlementer la fabrication et l’utilisation de certains de ces composés.

Atteinte du foie, de la thyroïde et troubles neurocomportementaux

Eneffet, certains retardateurs de flamme bromés sont des polluants organiques persistants auxquels les consommateurs peuvent être exposés, notamment via la consommation de denrées d'origine animale. D’autres retardateurs de flamme sont des perturbateurs endocriniens pouvant notamment affecter la reproduction. Selon l’Ineris, certains retardateurs de flamme (PBDE) « sont suspectés d’être des perturbateurs du système endocrinien des mammifères. Leur action, qui cible principalement le foie et la thyroïde, se traduirait par un retard dans le développement et la maturation sexuelle et par un effet sur le développement du système nerveux (troubles neurocomportementaux) des fœtus et nouveau-nés ».

Danger par accumulation

Mais à ce jour les effets sur l’homme ne sont pas clairement démontrés. En revanche, les multiples expositions auxquelles nous sommes soumis nous font suspecter un réel danger par accumulation. Pour l’heure, un suivi sur 10 ans des taux de polymères bromés dans l’environnement est en cours ainsi qu’une étude de bio-surveillance chez l’homme concernant le deca-BDE dans le sang et le lait maternel.

Qu’est-ce qu’un retardateur de flamme ?

Il existe différentes substances ignifuges utilisées comme retardateurs de flamme, que l’on choisit en fonction de chaque type de matériau à protéger car ils ont des comportements au feu variables. Le brome est l’additif considéré comme le plus efficace pour l’ignifugation. C’est ainsi que les retardateurs de flamme bromés représentent les substances chimiques les plus utilisées pour prévenir l’allumage ou le développement d’un incendie.

Parmi les plus courants :

  • Les hexabromocyclododécane (HBCD) qui, lors de la Convention de Stockholm 2013 qui vient de se dérouler à Genève, ont été interdits avec une période aménagée de 5 ans pour celui contenu dans les polystyrènes servant à l'isolation des bâtiments.
  • Les polybromodiphényléthers (PBDE) dont seul le déca-BDE (BDE-209) reste autorisé en Europe (hors appareils électriques et électroniques).
  • Le tétrabromobisphénol A (TBBPA).
  • Les polybromobiphényles (PBB), interdits en Europe et n’étant plus produits depuis 2000 (mais encore présents dans l'environnement).

Des retardateurs de flamme dans les aliments

L’alimentation est le principal vecteur d’exposition aux PBDE dans la population générale. En juillet 2006, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) a rendu un rapport d’évaluation des risques alimentaires liés à ces contaminants, confirmé depuis par l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire) en septembre 2012. Les PBDE dont le déca-BDE encore autorisé (BDE-209), s’accumulent avec une prédominance dans les produits alimentaires riches en lipides, en particulier les denrées d’origine animale (viandes et poissons). Mais cette accumulation « est relativement faible ». Par ailleurs, « les données toxicologiques sont jugées insuffisantes pour définir des valeurs toxicologiques de référence pertinentes. »

Viande, volailles et produits laitiers sous surveillance

En conséquence, les autorités recommandent la réalisation d'études de toxicité et une surveillance des concentrations de certains retardateurs de flamme (PBDE, HBCD, TBBPA) dans les denrées, en particulier les viandes et volailles, le lait et les produits laitiers.

Comment s’en protéger ?

Actuellement, les alternatives sont très limitées car il existe peu d’éléments capables d’interagir avec le feu. Les sels de bore constitueraient une alternative peu nuisible à l’environnement.

Aérer maison, bureau et voiture

Les retardateurs de flamme étant libérés progressivement dans l’air ambiant, ils se concentrent dans nos voitures, bureaux et logements : il est donc impératif d’aérer tous les jours, et encore plus après acquisition de matériels et produits neufs. Si vous êtes enceinte ou si avez de jeunes enfants, ce n'est peut-être pas le meilleur moment pour vous lancer dans des travaux de rénovation, de peinture et d'acquisition de mobilier neuf.

Sources

Anses, Avis du 14 septembre 2012, http://www.anses.fr/sites/default/files/documents/RCCP2010sa0225.pdf.  Afssa, 24 juillet 2006, http://www.anses.fr/sites/default/files/documents/RCCP2005sa0090.pdf.

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