Le syndrome de Raynaud : quand le froid rend les doigts douloureux

Le syndrome de Raynaud, dont la prévalence est estimée à 5-6% de la population, peut prendre deux formes différentes : la maladie de Raynaud, de loin la plus fréquente, et le phénomène de Raynaud. La première se caractérise exclusivement par une affection locale des vaisseaux des extrémités des membres, survenant de façon isolée, c'est-à-dire sans qu'elle soit associée à une autre maladie et dont la cause reste inconnue. Se traduisant par des symptômes similaires, le phénomène de Raynaud résulte, à l'inverse, d'une cause connue. Il survient dans de nombreux cas, notamment lors d'une infection auto-immune (le système de défense de l'organisme se retourne contre lui-même) faisant souvent partie des maladies dites « collagénoses ».
La maladie de Raynaud : bénigne mais sans cause décelable
Les femmes sont plus fréquemment touchées que les hommes, notamment les jeunes filles, au moment de la puberté et jusqu'à une vingtaine d'années (dans neuf cas sur dix). Cette affection bénigne des extrémités, qui atteint plus facilement les mains que les pieds, survient sans qu'aucune cause soit décelée. Parfois héréditaire, elle peut être attribuée à la présence d'une substance anormale dans le sang : la cryoglobuline.
Des signes caractéristiques : des doigts transitoirement pâles, froids et insensibles
Au cours d'une crise, le flux dans les artérioles, des doigts principalement et des orteils, s'arrête de façon brutale mais provisoire, généralement sous l'effet du froid ou de l'humidité et parfois d'un choc émotionnel. Il s'agit d'un rétrécissement soudain du diamètre des artères associé à une mauvaise fluidité du sang. Les extrémités d'une main, ou des deux, comprenant un ou plusieurs doigts et une ou plusieurs phalanges, pâlissent car elles sont brusquement privées de sang, deviennent ensuite froides et insensibles. Dans une seconde phase, elles prennent une coloration bleue (ou cyanose) et s'accompagnent de fourmillements, de picotements et de brûlures. La crise prend fin au bout d'une dizaine de minutes, lorsque la personne réussit à se réchauffer. Le sang affluant de nouveau, les extrémités deviennent rouges avant de reprendre leur aspect normal.
Un traitement essentiellement basé sur la prévention
Il est recommandé de ne pas s'exposer au froid et d'éviter la prise de certains médicaments dit « vasoconstricteurs », comme les bêtabloquants (même en collyre), les dérivés de l'ergot de seigle, les triptans, les méthylsergides et certains antimitotiques. Il est également essentiel de ne pas fumer car le tabac a lui-même un effet vasoconstricteur, en contractant les artères il empêche le sang de circuler surtout au niveau des fines artérioles des extrémités. Si la maladie est trop gênante, on peut faire appel à des médicaments de la classe des inhibiteurs calciques. En freinant l'entrée du calcium dans les cellules, ils augmentent le diamètre des petites artères.
La maladie de Raynaud est généralement bénigne et ne s'aggrave que rarement. Le risque de nécrose est nul. Toutefois, dans de rares cas, un épaississement des parois artérielles se produit, réduisant en permanence la circulation sanguine et pouvant alors occasionner des ulcérations localisées dont la cicatrisation est très difficile.
Le phénomène de raynaud : de nombreuses causes
Cette affection concerne des sujets plus âgés, essentiellement dans un contexte professionnel favorisant ou en présence de signes d'une maladie générale. Comparés à la maladie de Raynaud, les signes sont identiques mais en revanche les causes sont connues et nombreuses. Chez les femmes, des maladies auto-immunes comme des collagénases peuvent en être responsables. Par exemple, le phénomène de Raynaud peut faire partie des symptômes de la sclérodermie systémique, une sclérose progressive de la couche profonde de la peau et parfois des viscères. Chez l'homme il peut s'agir d'une athérosclérose, un durcissement anormal des artères. Par exemple, les personnes utilisant dans le cadre professionnel des engins vibrants sont soumises à des successions de petits traumatismes atteignant les doigts et les prédisposant ainsi à cette maladie.Certaines conditions anatomiques sont également susceptibles de déclencher un phénomène de Raynaud comme l'existence d'une côte surnuméraire, située au-dessus des côtes normales et pouvant compresser des vaisseaux. Et enfin, comme pour la maladie de Raynaud, certains médicaments vasoconstricteurs sont incriminés.
Là encore, un traitement avant tout préventif
Excepté la suppression des médicaments, des facteurs de risques tels que le tabac et l'alcool, et en cas d'athérosclérose d'un régime alimentaire adapté, le traitement repose sur la prévention : limiter l'exposition au froid et en cas de profession à risque (usage d'engins vibrants), envisager un reclassement.
Les professions à risques
A côté des ouvriers manipulant des marteaux piqueurs ou autres engins vibrants, les bûcherons ont également été identifiés comme sujets à risque. On estime à 60% le nombre de bûcherons touchés par cette affection. A un degré moindre, sont concernés les pianistes et les secrétaires, utilisant un clavier de piano, de machine à écrire ou d'ordinateur.
Sources
FMC Hebdo, N°97, 16 janvier 2001. Détecter les maladies systémiques auto-immunent. E. Hachulla et P-Y. Hatron, CoEdition Le Quotidien & Masson, Coll., Consulter/Prescrire.