Le dépistage prénatal est menacé !

Un outil formidable, avec ses propres imperfections
L'échographie obstétricale a fait d'énormes progrès et on estime aujourd'hui qu'elle permet de détecter en période prénatale environ 60% des malformations. Or, on oublie peut être trop souvent que cet outil présente des imperfections. On ne dépiste donc pas tout systématiquement. En effet, le dépistage dépend de nombreux paramètres comme la position de l'enfant, le type d'appareil utilisé, le type de malformations, la compétence du médecin.
Les accusations
Le 17 novembre 2000, la Cour de cassation a indemnisé Nicolas Perruche, un enfant né avec un handicap lourd en raison d'une rubéole non détectée chez la mère au moment de la grossesse. Les magistrats ont établi pour la première fois un lien direct entre la faute du médecin, en l'occurrence l'absence de dépistage, et le handicap du nouveau-né, ouvrant en grand la porte à de nombreuses autres plaintes en justice. Ainsi dans quelques mois, trois autres affaires relatives à des malformations fœtales non dépistées à l'échographie devront être tranchées. Seules ces décisions pourront alors confirmer ou infirmer la jurisprudence introduite par l'arrêt Perruche.
Les répercutions : considérables
Les compagnies d'assurance sont à juste titre préoccupées. Elles estiment que pour faire face aux demandes d'indemnisation qui ne vont pas manquer d'affluer, notamment dans les litiges en cours, elles seront contraintes d'augmenter de manière prohibitive les tarifs des cotisations. Mais outre ses considérations économiques, les répercutions éthiques pourraient être dramatiques. En effet, pour les médecins spécialistes, seules deux solutions s'offrent à eux: ne plus faire de dépistage, ce qui revient à faire un bond d'une trentaine d'années en arrière, ou au contraire, limiter le dépistage à certaines anomalies bien spécifiques, ce qui favoriserait les avortements thérapeutiques au moindre doute.Plusieurs syndicats professionnels ont déjà menacé d'arrêter les échographies de grossesse, mais nombre de spécialistes ne souhaitent pas s'enfermer dans ce dilemme car cette obligation de résultats, désormais imposée, se traduirait par un nombre important d'avortements d'enfants sains. Une conséquence supplémentaire, sur le plan symbolique cette fois: l'idée que le handicapé n'a plus droit de cité dans nos sociétés. En effet, au lieu d'être pris en charge solidairement par la société, la Sécurité sociale se porterait partie civile pour récupérer les frais auprès du médecin qui a permis sa mise au monde !Il est impératif que la profession se dote de règles déontologiques dans ce domaine et définisse ce qui est utile ou inutile de dépister.