Gastro-entérite : La prévention tous azimuts

Publié par Hélène Joubert
le 3/12/2015
Maj le par Camille Barault
4 minutes
close up of hands squirting disinfectant from a pump bottle
Istock
Prévenir la gastro-entérite c'est éviter les cas sévères entraînant une déshydratation grave chez le nourrisson avec un risque réel de décès. Le grand enfant ou l’adulte n’en subissent pour leur part que quelques "désagréments" comme la diarrhée ou les douleurs abdominales. Parmi les moyens à disposition, la vaccination contre le rotavirus chez le nourrisson et les mesures barrières pour tous !

Gastroentérite à rotavirus : la prévention passe par la vaccination

Malgré la suspension en France mi-2015 de la recommandation de vacciner contre le rotavirus- le virus responsable de 50% des gastro-entérites, cela reste un bon moyen de protéger le nourrisson des gastro-entérites aigües sévères. Une quinzaine de pays européens l’a adoptée et les spécialistes français aussi. La seule précaution est de surveiller étroitement les nourrissons dans les deux semaines post-injections, une période à risque d’un effet secondaire rare et bien connu, celui d’invagination intestinale aigüe.

Le grand enfant, voire l’adulte, bénéficie aussi de la vaccination lors des premiers mois de vie, du fait d’une protection durable contre les souches vaccinales.

Prévenir la déshydratation sévère, le rôle des solutés de réhydratation orale

Prévenir la gastro-entérite, c’est surtout prévenir la déshydratation sévère voire mortelle, qui n’existe que pour le nourrisson (7 à 17 décès annuels estimés en France) et jusqu’à l’âge de trois ans. L’utilisation des "solutés de réhydratation orale (SRO) de composition glucoélectrolytique" est la seule mesure ayant fait la preuve de son efficacité pour le traitement de la gastro-entérite aigüe du nourrisson. Le SRO vise à éviter la déshydratation induite par la diarrhée grâce à une réhydratation efficace. Il n’est pourtant pas encore utilisé de façon optimale (dans 75% des cas).

SRO, mode d’emploi :

  • Il est bien pris chez les nourrissons qui ont soif, c'est-à-dire qui ont déjà un début de déshydratation.
  • Il est utile dès lors que la diarrhée entraîne une perte d’eau.
  • En pratique, il doit être proposé très rapidement devant toute diarrhée significative (selles liquides, abondantes, répétées), en sachant que si l’enfant ne le prend pas, c’est en général parce qu’il n’est pas déshydraté.
  • Son utilisation peut être difficile voire impossible lorsque les vomissements sont importants. Mais des vomissements ne doivent pas empêcher leur utilisation car ils n’empêchent généralement pas la réhydratation.
  • Ces SRO doivent être administrés en petites quantités (40-50 ml) et à intervalles rapprochés (toutes les 15-20 minutes) car de trop grands volumes bus rapidement risquent d’entraîner des vomissements.

Gastroentérite : les mesures barrières essentielles

La propagation des gastro-entérites à rotavirus peut être limitée par la mise en place d’une politique de prévention forte vis-à-vis des mesures élémentaires d’hygiène personnelle. Si elles étaient correctement appliquées par la population et le corps médical, des milliers d’épisodes annuels de gastro-entérite seraient évités :

  • Se laver systématique les mains (après être allé à la selle, après nettoyage des fesses d'un nourrisson, avant de préparer les aliments et de manger) et des surfaces souillées.
  • Utiliser des solutions hydro-alcooliques.
  • Eviter les rapprochements tactiles avec des personnes saines quand on se sait infecté.
  • Chez le bébé, le conseil d’utiliser de l’eau bouillie pour reconstituer le lait en poudre n’est pas justifié, l’eau n’étant pas un réservoir du rotavirus.

Si ces mesures ont une certaine efficacité à l’échelle d’une population pour limiter la propagation virale, elles sont peu efficaces au sein d’une même famille tant la contagiosité de ces virus est grande.

L’ordonnance en cas de gastro-entérite : repos et réhydratation

Le grand enfant peut présenter des symptômes typiques de gastro-entérite (diarrhée, vomissements, fièvre, douleurs abdominales) pendant 24 h dans 90% des cas, mais ne court aucun danger. Antibiotiques, « antiseptiques intestinaux », médicaments agissant sur la motricité intestinale… n’ont pas lieu d’être prescrits. Les antalgiques sont rarement nécessaires.

Pr Patrick Tounian, chef du service de Nutrition et Gastroentérologie Pédiatriques, Hôpital Armand-Trousseau (Paris) : « Pas plus qu’avant 3 ans, chez l’enfant comme chez l’adulte, aucun antiémétique traditionnel (contre les vomissements et les nausées) n’a démontré son efficacité. Les deux médicaments disposant d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) -le racécadotril et la diosmectite- permettent de réduire de 12 à 24h la durée de l’épisode diarrhéique. Leur intérêt chez le nourrisson est discutable car ils ne le mettent pas à l’abri d’une déshydratation sévère. »

Gastro-entérite et probiotiques, à suivre

Parmi les probiotiques, la souche Saccharomyces boulardii aurait un intérêt chez les enfants en cas de diarrhée aiguë. Selon une analyse de plusieurs études parue en 2014 elle réduirait la durée de la diarrhée d’en moyenne 19,7 heures, la fréquence des selles au second jour et au 3ème jour ainsi que le risque de diarrhée au 3ème et au 4ème jour après l'intervention. Cette étude fournit des indices en faveur d’une éventuelle action bénéfique de cette levure, même si les auteurs soulignent eux-mêmes les disparités entre les études dans les définitions de la diarrhée, et la qualité de la méthode utilisée...

Pr Tounian : « Certaines souches de probiotiques peuvent néanmoins prévenir la pérennisation de la diarrhée sous forme d’intestin irritable. Mais délivrer systématiquement, sur ces seules données, des probiotiques à un enfant souffrant de diarrhée aiguë n’est pas justifié. En revanche, chez un enfant dont la diarrhée se prolonge, l’emploi de probiotiques qui ont démontré leur efficacité dans cette indication peut être intéressant ».

Sources

* Pediatrics Vol. 134 No. 1 July 1, 2014

D’après un entretien avec le Pr Patrick Tounian, chef du service de Nutrition et Gastroentérologie Pédiatriques, Hôpital Armand-Trousseau (Paris).

 

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