Fausse-couche : votre odorat peut dire si vous risquez de perdre votre bébé

Publié par Sophie Raffin
le 2/10/2020
Maj le
5 minutes
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Les femmes qui ont subi plusieurs fausses-couches inexpliquées, ne perçoivent pas les odeurs de la même manière que les autres. Elles sont plus susceptibles de reconnaître celle de leur conjoint !

Environ 50% des conceptions et 15% des grossesses aboutissent à une fausse-couche, mais seul un nombre limité peut être expliqué par les médecins. Une équipe scientifique israélienne pense que l’odorat pourrait aider à percer le mystère entourant ces drames.

L’odorat un allié de la reproduction

C’est peu connu, mais de nombreux mécanismes de la reproduction humaine sont liés à l’odorat. Par exemple, ce sens joue un rôle dans la synchronisation des menstruations des femmes qui vivent sous le même toit. De plus, les odeurs corporelles des mamans qui allaitent, sont susceptibles d’influencer l'ovulation et les menstruations chez d'autres. 

L'auteur principal de la recherche, Liron Rozenkrantz qui a étudié à l'Institut national Azrieli pour l'imagerie et la recherche sur le cerveau humain ainsi qu'à l’institut Weizmann Institute of Science, (Israël) - désormais chercheur postdoctoral au Massachusetts Institute of Technology (MIT) de Cambridge (USA) - a expliqué : "étant donné que l'odorat est associé à la reproduction humaine, nous avons émis l'hypothèse qu'il pourrait également être lié à des troubles de la reproduction. Nous avons cherché à tester l'hypothèse selon laquelle la perception de l'odorat - connue sous le nom d'olfaction - est altérée lors d'une fausse-couche inexpliquée, en particulier la perception des odeurs corporelles."

twitter.com/WeizmannCanada/status/1310992152667791363

Plus de 60 femmes ont dû reconnaître l’odeur de leur partenaire

Les chercheurs ont commencé par tester une fonction olfactive clé dans la reproduction : la capacité à identifier les partenaires par leur odeur. Ils ont demandé à 33 participantes ayant des antécédents de fausses-couches répétées et inexpliquées de sentir à l’aveugle trois pots d'odeurs corporelles : l’un contenait celle de leur conjoint, le second celle d’un inconnu et le troisième récipient était sans odeur. 

Le même nombre de femmes sans antécédent de fausses-couches était soumis à des épreuves similaires.

L’équipe a constaté que les patientes ayant vu plusieurs grossesses finir dramatiquement étaient deux fois plus susceptibles d'identifier correctement le “fumet” de leur conjoint que les participantes du groupe témoins.

Un meilleur odorat chez les femmes ayant eu des fausses-couches ? 

Après cette découverte, les scientifiques se sont demandés si les femmes ayant eu des fausses-couches répétées, avaient un meilleur sens de l'odorat. Ils ont ainsi voulu étudier leur capacité à sentir différents effluves comme les arachides et le savon. Les participantes qui avaient connu plusieurs avortements spontanés, étaient également meilleures pour distinguer les parfums. Toutefois, l’équipe reconnaît que leur capacité était - dans le cadre de cet exercice - supérieure de “manière marginale”.

Par ailleurs, il a été demandé à 36 femmes (dont la moitié avait fait des fausses couches) d’évaluer les odeurs corporelles humées en fonction de son intensité, son caractère plaisant ou de l’attirance sexuelle ressentie. Les victimes de fausses-couches ont jugé les odeurs corporelles des inconnus plus faibles que le groupe témoin.

Odeur et fausse-couche : comment expliquer les différences observées ? 

Odeur et fausse-couche : comment expliquer les différences observées ?

L’équipe scientifique israélienne a ensuite voulu comprendre les différences observées. Elle a ainsi réalisé des IRM pour examiner la structure et le fonctionnement du cerveau des participantes. 

Les chercheurs ont constaté que les femmes ayant subi plusieurs fausses-couches, avaient des bulbes olfactifs plus petits. Ce qui est surprenant étant donné leur plus grande capacité apparente à percevoir et à distinguer les différents parfums.

Ils ont aussi mesuré l'activité cérébrale des femmes lorsqu’elles regardaient l’extrait d’un film émouvant, avec ou sans la présence subliminale de l'odeur corporelle masculine d’un inconnu, les experts ont trouvé une réponse remarquable dans la région de l'hypothalamus. Alors que les effluves corporels augmentaient l'activité de cette zone du cerveau chez les femmes ayant des antécédents d’avortements spontanés, elles la diminuaient dans le groupe témoin.

"Nous avons constaté que les femmes qui subissent une fausse-couche inexpliquée sont beaucoup plus susceptibles de reconnaître leur conjoint à l'odorat et d'évaluer l'odeur corporelle des hommes différemment des autres femmes", indique l'auteur principal Noam Sobel, professeur en neurobiologie à l'Institut national Azrieli pour l'imagerie et la recherche sur le cerveau humain et l’institut Weizmann Institute of Science, 

"Nous avons également trouvé des différences dans les schémas cérébraux structurels et fonctionnels, qui n'avaient pas été auparavant associés à des fausses-couches inexpliquées. Nous espérons que nos résultats aideront à orienter la réflexion et la recherche sur cette condition, qui n'est actuellement pas bien comprise ou gérée.", conclut-il.

Fausse-couche : quels sont les risques ?

Fausse-couche : quels sont les risques ?

Toutes les femmes enceintes peuvent voir leur désir d'enfant finir de manière dramatique, et cela, même si elles ne présentaient pas de trouble de la fertilité. Néanmoins, bien avant la découverte de ce lien entre odorat et fausse-couche, certains facteurs permettent de les avertir d’un risque plus élevé pendant la grossesse.

  • l’âge : si les futures mamans de moins de 30 ans ont entre 12 et 15% de risque de perdre leur bébé, le taux atteint 20% chez les trentenaires et 40% chez les quadragénaires ;
  • l’exposition au tabac ;
  • la consommation d’alcool pendant la grossesse ;
  • la prise de certains médicaments ;
  • l’exposition régulière à des produits chimiques ;
  • un choc émotionnel trop important ;
  • la fécondation in vitro ;
  • certains examens comme l’amniocentèse ou la biopsie du placenta.

Fausse-couche : les signes d’alerte à repérer

Les signes pouvant indiquer la survenue d’une fausse-couche imminente sont : 

  • des saignements vaginaux ;
  • des pertes brunes ou rouges, de type fluide ou composées de caillots ;
  • des crampes dans le ventre ;
  • des douleurs dans le bas du dos.

Les futures mamans qui présentent ces symptômes, doivent rapidement consulter.

Dans le cas d’une fausse-couche avérée, une intervention n’est souvent pas nécessaire. L'évacuation se fait naturellement. Néanmoins, dans certains cas, le fœtus n’est pas expulsé. Le médecin est alors obligé d’agir de manière médicamenteuse ou par aspiration.

Sources

Study suggests link between unexplained miscarriages and how women perceive men’s body odour, Elife, 29 septembre 2020

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