Comment faire sans le Di-Antalvic ?

Mauvaise nouvelle pour les huit millions d'utilisateurs français du Di-Antalvic en prévision de son retrait, acté par l'Agence européenne du médicament (EMEA) et contre l'avis de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Apprendre à changer ses habitudes pour soulager ses maux, une gageure quand le choix en matière de prise en charge de la douleur reste restreint. Les médecins vont avoir la difficile tâche d'aiguiller leurs patients vers un nouveau traitement adapté. Il leur restera peut-être la possibilité de continuer à administrer du Di-Antalvic pour les malades ne se satisfaisant pas des solutions de substitution au Di-Antalvic.
Di-Antalvic et risque de surdosage
La décision de l'EMEA de retirer le Di-Antalvic du marché a été motivée par le taux élevé d'intoxication en Angleterre et en Suède. Le médicament a disparu des pharmacies pour ces deux pays à partir de 2005. En France, les chiffres de surdosage sont moindres. Parmi les hypothèses possibles, la présentation du médicament. 'En Angleterre, le médicament est vendu en flacon, ce qui facilite la prise massive de Di-Antalvic, explique le docteur Anne Castot, responsable du service de l'évaluation et la surveillance du risque et de l'information sur le médicament à l'AFSSAPS. En France, il est mis sous blister.' Les risques liés aux tentatives de suicide par Di-Antalvic restent rares côté français, qui préfèrent, de loin, l'utilisation des benzodiazépines. Quant au surdosage, il existe comme pour n'importe quelle prescription de médicaments.
Efficacité du Di-Antalvic est-elle en cause ?
Les détracteurs du Di-Antalvic prendront comme excuse que l'efficacité de l'association du dextropropoxyphène et du paracétamol n'a pas été démontrée. Et pour cause… Le médicament, mis sur le marché depuis 1964, a été l'objet de peu d'études qui s'appuient sur les critères actuels pour évaluer son efficience. Pourtant, les huit millions de malades qui ont recours au médicament ne peuvent que témoigner de son efficacité. La prise en charge de la douleur, notamment pour les maladies chroniques, relève souvent du parcours du combattant. Il faut du temps pour trouver un traitement adapté qui convienne et provoque peu d'effets secondaires. 'Bien souvent, avant de trouver le médicament qui va vous soulager, vous passez quelques mois, voire quelques années à tâtonner et votre médecin est là pour vous accompagner', souligne Martine Chauvin, présidente de l'Association Francophone pour Vaincre les Douleurs qui aide les malades à trouver des informations fiables sur la prise en charge de la douleur et à les aiguiller sur des structures adaptées à leurs besoins.
Les alternatives au Di-Antalvic
Le choix des armes contre la douleur est plutôt limité. La prise en charge peut se faire dans un premier temps par des médicaments à base de paracétamol. Quand ils se révèlent inefficaces face à l'intensité de la douleur, l'ibuprofène, qui est un anti-inflammatoire agissant sur les douleurs modérées, peut apporter un soulagement. Problème pour les maladies chroniques : un anti-inflammatoire pris sur la durée peut entraîner des troubles gastriques. Le codoliprane, qui associe paracétamol et codéine (un antalgique opiacé), est bien toléré mais il se heurte au danger de l'automédication et à la tentation d'augmenter les doses, car il se trouve en vente libre dans les pharmacies. Dans le cas de douleurs sévères, il reste le tramadol qui possède bien plus d'effets secondaires que le Di-Antalvic et qui est moins bien supporté (nausée, vomissement, hallucinations…). À ce jour, il n'existe pas de nouveaux médicaments dans le traitement de la douleur pour remplacer le dextropropoxyphène.
Un an de sursis
Un retrait progressif des pharmacies est prévu pour l'année 2010 pour ne pas pénaliser les malades. Le temps d'envisager avec le médecin d'autres alternatives. Les généralistes sont invités à ne plus prescrire de Di-Antalvic pour les nouveaux patients. L'annonce du retrait a créé un vent de panique chez les malades qui se sont empressés pour certains de faire leur stock de Di-Antalvic en prévision. La priorité reste de consulter son médecin pour faire le point sur ses douleurs et réévaluer son traitement. Le Di-Antalvic, qui contient un dérivé opiacé, peut créer une dépendance quand il est pris à forte dose. Un bon encadrement thérapeutique, qui vise une prise en charge globale de la douleur, permet une utilisation optimale de l'antalgique. Le malade apprend à mêler traitement médicamenteux, médecine douce et une bonne hygiène de vie qui agit en prévention.
Un espoir qui mobilise...
L'AFSSAPS était défavorable au retrait du Di-Antalvic mais s'est retrouvée en position minoritaire face au choix européen. Elle doit donc se plier sans pour autant renoncer à trouver une solution dérogatoire qui permettrait de continuer de prescrire le Di-Antalvic sous certaines conditions. 'Il faut étudier toutes les possibilités réglementaires qui offrirait un maintien sous condition du Di-Antalvic', insiste le docteur Castot. La mobilisation des malades a son rôle à jouer. Elle s'organise côté européen par l'intermédiaire des associations de patients qui ont pris la mesure des conséquences d'un retrait. Elle est encore désorganisée en France et peu fédérée. C'est pourtant un levier efficace dans la décision finale de la Commission européenne qui prend en compte l'avis des citoyens européens.
Je bouquine…
Vaincre la douleur, D'Alain Serrie, Éditions Michel Lafon, 19 €.
Sources
Côté santé