Circulation veineuse en été : quelles personnes sont fragilisées ?

Pourquoi certaines personnes souffrent-elles plus que d’autres de la chaleur ?
Dr Van Cleef : « En plus d’une aptitude toute personnelle à la vasodilatation du système veineux (qui permet d’augmenter les échanges avec l’air ambiant et refroidir ainsi le corps), le poids de la personne entre en ligne de compte. Plus celui-ci est important, plus le rapport surface cutanée/masse corporelle est faible et plus vous souffrez de la chaleur. En effet, les adaptations (production de sueur, dilatation veineuse) devront être plus importantes. Mais un autre problème survient : lorsque les veines se dilatent trop, la vitesse circulatoire ralentit. Cette stase (stagnation du sang) veineuse fait que l’oxygénation des tissus et leur nutrition sont modifiées, engendrant parfois une certaine souffrance, principalement une sensation de jambes lourdes. Celle-ci n’a aucun rapport avec la présence ou non de varices ou un système veineux déficient. Si certaines varices (celles de la veine petite saphène par exemple) peuvent provoquer des lourdeurs de jambe, d’importantes varices ne provoquent souvent aucune douleur.
Quant au gonflement des jambes, des chevilles, il s’agit plus d’une impression que d’un véritable œdème. Le fait d’avoir les chevilles dilatées le soir est tout à fait physiologique, sans conséquence sur le système veineux. Les vaisseaux lymphatiques sont chargés de drainer les liquides tissulaires, qui deviendront la lymphe. En position debout, un peu de ce liquide s’accumule parfois dans les parties déclives (situées en bas, chevilles, pieds..). A l’extrême, en cas de varices graves, on observe une mauvaise oxygénation des tissus avec des pertes de substance cutanée : les ulcères variqueux. Ces ulcères s’ouvrent plus facilement en été qu’en hiver, du fait de la chaleur.
A part cela, pas d’inquiétude, la dilation du système veineux impacte peu le système cardiovasculaire ou l’oxygénation des organes chez l’adulte sain. Il s’agit avant tout d’une adaptation physiologique de notre corps à la chaleur. »
Les femmes enceintes souffrent plus de la chaleur. Pour quelles raisons ?
Dr Van Cleef : « En fin de grossesse, elles sont plus enclines à souffrir de la chaleur principalement du fait de leur "surpoids", d’où une difficulté accrue pour refroidir leur masse corporelle. Par ailleurs, leur taux d’estrogènes est alors bien supérieur à la normale. Or l’ensemble du système veineux est tapissé de récepteurs aux estrogènes, ce qui fait que les veines ont tendance à être plus dilatées qu’habituellement. La vasodilatation lors de la grossesse n’a absolument rien à voir avec des raisons d’obstruction ou de compression dues au fœtus, c’est purement hormonal ! Une étude conduite chez les femmes enceintes a montré que les bains à 32 degrés sont bénéfiques pour limiter les œdèmes du troisième trimestre de grossesse. Pour les soulager, on peut aussi leur conseiller de dormir sur le côté gauche pour dégager la veine cave inférieure. Elles ne doivent pas non plus hésiter à porter en journée des mi-bas de compression de classe 2 ».
Comment prendre soin du système veineux des seniors ?
Dr Van Cleef : « Le souci principal avec les personnes âgées c’est qu’à la moindre chaleur, elles se cloitrent et restent immobiles. Elles devraient pourtant continuer de marcher dans des locaux frais pour éviter les "œdèmes d’immobilité", s’hydrater et porter, si besoin, des bas de compression, même si c’est difficile pour elles (manque de souplesse, arthrose …). En suivant ces conseils basiques, un senior sans risque variqueux personnel n’a pas plus de risque de souffrir de la chaleur qu’un adulte jeune ! Car contrairement aux idées reçues, l’âge n’est pas un facteur de risque de varices. Il y a autant de risque d’avoir des varices à 20, 40 ou 70 ans. L’âge est seulement un risque "cumulatif", c’est à dire qu’une personne ayant des varices et qui ne se soigne pas va voir son état variqueux se dégrader avec l’âge, et risquera d’autant plus d’en souffrir lors de fortes chaleurs. L’activité physique, la marche, entretiennent notre état circulatoire. Un senior de plus de 70 ans qui marche à une vitesse de 5 km/h, a une mortalité très faible. A une vitesse de 3 km/h et moins, on observe alors une surmortalité. Or, avec l’âge les seniors marchent moins vite ! Il convient donc d’inciter ceux qui le peuvent à marcher 4 km en 45 minutes. »
Sources
Entretien avec le Dr Jean-François Van Cleef, médecin vasculaire, membre de la Société Française de Phlébologie et chef de service de médecine vasculaire de l'institut Arthur Vernes (Paris)