BPCO : pourquoi la réhabilitation respiratoire est cruciale

Publié par Hélène Joubert
le 1/06/2017
Maj le
5 minutes
docteur, examen, tousser, patient
Autre
L’activité physique est le traitement le plus efficace pour traiter tous les aspects de l’obstruction chronique des voies aériennes provoquée par une maladie grave qu’est la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) : la maladie elle-même, le malade qui en souffre et son isolement social. L’activité physique, avec l’éducation thérapeutique et la maîtrise respiratoire à l’effort, sont les trois piliers de la « réhabilitation respiratoire », essentielle pour ralentir l’évolution de la maladie et conserver une certaine qualité de vie.

La réhabilitation respiratoire, avant même les médicaments

Trois millions de personnes en France souffrent de BPCO, cette tueuse silencieuse causée à 90% par le tabagisme. L’activité physique et l’éducation du malade BPCO (sur la maladie, les traitements et la vie au quotidien) constituent la « réhabilitation respiratoire ». Son but ultime est de soulager les symptômes de cette maladie chronique, à savoir les exacerbations (poussées d'aggravation des symptômes habituels) et l’essoufflement à l’effort (dyspnée) en améliorant la capacité respiratoire. C’est aussi de renforcer l’adaptation respiratoire, cardiaque et musculaire à l’exercice ainsi que l’autonomie de la personne pour une meilleure qualité de vie. Sans oublier son impact contre l’isolement social car il est souvent plus motivant de « faire du sport » ensemble.

Dr Mathieu Larrousse, pneumologue à Toulon (Var) : « L’activité physique doit être un des éléments centraux de la prise en charge des personnes BPCO. Les recommandations internationales (GOLD 2015) et nationales (SPLF 2016) confirment le rôle premier et prépondérant de la réhabilitation respiratoire, avant même les indications médicamenteuses. »

Un starter pour se prendre en main

A peine 5 à 10% des personnes BPCO bénéficient de la réhabilitation respiratoire. Un paradoxe : les centres dédiés sont peu nombreux mais faute d’information, les médecins ne pensent pas souvent à la prescrire. Au final, les centres ne tournent pas à plein régime ! Pour autant, le nombre de centres reste insuffisant sur le territoire.

Dans une enquête conduite pour l’Association BPCO*, 42% des patients BPCO ne connaissaient pas les programmes de réhabilitation respiratoire. Le chemin est encore long mais il y a de quoi se réjouir, comparé aux 70% d’il y a plusieurs années.

Fréderic Le Guillou, pneumologue et président de l’Association BPCO** : « La réhabilitation respiratoire est à la fois un soin et un outil de prévention car elle ne se réduit pas au réentraînement à l’effort. Elle englobe aussi l’aide au sevrage tabagique, une étude nutritionnelle, une éducation thérapeutique et une prise en charge psychosociale. Bien entendu, le séjour de réhabilitation respiratoire n’est qu’un starter : l’exercice physique régulier devant être poursuivi au long cours, sans quoi les progrès sont anéantis dans les six mois ».

La réhabilitation respiratoire en pratique

Tout malade BPCO qui est entravé par son manque de souffle dans les activités quotidiennes malgré les médicaments peut bénéficier de la réhabilitation respiratoire et subira un examen complet pour éliminer toute contre-indication cardio-respiratoire.

Suivant un programme établi au cas par cas, la réhabilitation respiratoire est conduite par une équipe pluridisciplinaire : médecin pneumologue, kinésithérapeute, éducateur en activité physique adaptée, diététicienne, psychologue, infirmière… Toutes les possibilités existent. La personne BPCO peut la réaliser en hospitalisation complète, dans une structure de proximité en ambulatoire ou même à domicile. Avec au programme, des activités physiques adaptées (jeux de ballon, vélo elliptique, bicyclette d’entraînement, tapis de marche, banc de musculation, cours collectifs de fitness, step, gymnastique, balnéothérapie etc.) mais aussi de la kinésithérapie respiratoire et des cours théoriques relevant de l’éducation thérapeutique.

L’Assurance Maladie ne prévoit pas de cotation de l’acte de réentraînement à l’effort. D’où une prise en charge de la personne par les centres qui fonctionnent pour la plupart sur le mode de soins de suite et réadaptation (SSR). En cabinet de kinésithérapie, le remboursement des séances dépend des activités effectuées.

Votre pneumologue connaît les structures proposant la réhabilitation respiratoire. Une carte existe, mise à jour par la Société de pneumologie de langue française (SPLF) : http://splf.fr/groupes-de-travail/groupe-alveole/la-carte-de-la-rehabilitation/

Témoignage : « +30% de capacité respiratoire grâce à la réhabilitation »

Jean-Pierre Jury (BPCO, 59 ans, Indre-et-Loire) se défend de posséder une volonté hors-norme. Il a juste « saisi sa chance », celle d’avoir été inclus dans un programme de réhabilitation respiratoire, peu de temps après l’annonce de son diagnostic. Asthmatique, ex-fumeur… le verdict est tombé après de longues années d’errance diagnostique : BPCO à un stade très avancé (40% de Volume Expiratoire Maximal en 1 Seconde/VEMS), c’est à dire moins de la moitié de la capacité respiratoire d’un adulte en bonne santé ! Prêt à tout, Jean-Pierre s’astreindra pendant deux ans à deux séances hebdomadaires, qui ont « réveillé son corps ». Il va même plus loin lorsqu’il répète qu’elles lui ont « sauvé la vie ».

L’effort a payé : sa capacité respiratoire, en passant de 40% à 68%, lui a permis de retrouver une vie "presque" normale. Il l’affirme : « la réhabilitation respiratoire fait beaucoup de bien à condition de la suivre avec détermination. Sans quoi, aucune possibilité de regagner de la capacité respiratoire. Mais notre volonté est aussi mise à l’épreuve au quotidien : c’est marcher plutôt que monter dans un bus, gravir les escaliers etc. L’enjeu est simple : la vie ou la mort ».

Selon lui, l’autre avantage de la réhabilitation respiratoire est de rompre l’isolement des personnes BPCO, porte d’entrée dans la sédentarité et le cercle vicieux qui aggrave la maladie. Aujourd’hui, en plus du karaté, son objectif est de courir cinq kilomètres d’affilée. Ceci afin de retarder au maximum le moment « d’avoir une bouteille d’oxygène pour compagnon ».

Sources

**Pour en savoir plus sur la BPCO et la réhabilitation respiratoire : http://www.bpco-asso.com

*Enquête 2016 NXA/Association BPCO « BPCO & Autonomie, Impact de la BPCO sur la qualité de vie au quotidien ».

D’après des entretiens avec les Drs Larrousse et Le Guillou, pneumologues, et Jean-Pierre Jury.

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