La chirurgie de l’obésité pour mieux soigner le diabète de type 2

La chirurgie de l’obésité -ou chirurgie bariatrique- a fait ses preuves vis-à-vis de la perte de poids chez les personnes obèses. Mais un effet collatéral très bénéfique a rapidement été découvert : elle améliore aussi la glycémie, au point que chez certains patients, elle fait disparaître un diabète de type 2 préexistant. Doit-on alors la proposer aux personnes diabétiques dont le diabète est très déséquilibré, même si elles ne sont pas obèses ? Au congrès européen de diabétologie (EASD, Munich ; 12-16 septembre 2016), les toutes dernières études vont en ce sens. A moyen terme, la chirurgie pourrait devenir un traitement du diabète parmi les autres.
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La chirurgie de l’obésité, une arme contre le diabète de type 2

La chirurgie bariatrique comprend plusieurs techniques chirurgicales, court-circuit gastrique (gastric by-pass), anneau gastrique ou gastrectomie longitudinale (sleeve gastrectomy). Globalement, avec cependant des différences entre les techniques, la chirurgie bariatrique a une efficacité inattendue et spectaculaire sur la mortalité toutes causes (-58%) et la mortalité cardiovasculaire (-59%) chez des diabétiques de type 2 à 5 ans de suivi (après un gastric by-pass) (1). Elle est aussi en mesure de corriger très rapidement les anomalies métaboliques dont le taux de sucre dans le sang : la glycémie. C’est pourquoi elle a été baptisée "chirurgie métabolique". La tentation est grande de la proposer aussi chez les diabétiques de type 2 en surpoids, même s’ils ne sont pas obèses lorsque les médicaments (comprimés ou insuline) ne parviennent pas abaisser le taux de glycémie dans la norme (définie par une valeur de HbA1c <7%, sans risque pour leur santé).

Si la glycémie s’améliore voire se normalise (dans ce dernier cas le diabète de type 2 disparaît, on dit qu’il est en "rémission") c’est dû à la perte de poids qui se maintient sur la durée mais aussi à l’amélioration de la résistance à l’insuline des tissus dont les muscles (insulinorésistance) et aux variations des taux de certaines hormones impliquées dans la régulation de la sécrétion de l’insuline.

Chirurgie de l’obésité et diabète de type 2, les nouveaux résultats

Avec 15 ans de recul et un suivi médian allant jusqu’à 19 ans, l’une des études phare en chirurgie bariatrique, la SOS Study (Sweedish Obese Study) suédoise, livrait ses tout derniers résultats à l’EASD 2016. La chirurgie cumule les avantages dans le diabète de type 2 :

  • La perte de poids est durable. Elle se maintient à 20 ans, entre -15 et -25% du poids total.
  • La chirurgie de l’obésité protège du diabète. L’apparition d’un diabète de type 2 est deux fois moins importante dans le groupe "chirurgie", même 15 ans après celle-ci.
  • La rémission du diabète de type 2 est durable. Après 15 ans de suivi, 30% des patients étaient en rémission de leur diabète.

Pr François Pattou, chef du service de chirurgie Générale et Endocrinienne, CHRU Lille, Inserm U859 - Biothérapies du Diabète, Univ. Lille Nord) : « Une méta-analyse parue en 2015 a montré un taux de rémission moyen à court terme du diabète de type 2 de l'ordre de 70%, que l’IMC (l’indice de masse corporelle qui définit le surpoids, l’obésité ou la maigreur) soit supérieur ou inférieur à 35 kg/m2. Ce taux de rémission s’altère avec le temps, comme c’est le cas pour tous les traitements, mais reste néanmoins très important. De plus, la plupart (> 90%) des diabétiques opérés, s’ils ne voient pas leur diabète disparaître, voient leur taux de glycémie s’améliorer, leur permettant de réduire leur traitement antidiabétique en conséquence ».

  • Les chances de rémission du diabète de type 2 sont d’autant plus importantes que la durée de diabète au moment de l’opération est faible, surtout inférieure à un an. Opérer plus tôt, avant que la maladie ne se soit compliquée, c’est mettre toutes les chances de son côté pour faire disparaître le diabète sur le long terme. Et le poids initial n’est pas le seul déterminant de la rémission du diabète.
  • La rémission durable du diabète de type 2 après chirurgie bariatrique est associée à une réduction des complications dites microvasculaires du diabète, c’est à dire la dégradation de la fonction rénale, les yeux et les nerfs. Chez les diabétiques en rémission depuis 15 ans, ce risque de complications microvasculaires est diminué de 80% chez les diabétiques en rémission, par rapport à ceux qui ne l’étaient pas.

Magdalena Taube, co-investiguatrice de la SOS Study (Dep Molecular and Clinical Medicine, Gothenburg, Suède) : « La chirurgie de l’obésité protège de l’apparition du diabète de type 2 sur le long terme. De plus, la rémission du diabète au long cours protège des complications microvasculaires ».

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Source : (1) Björn Eliasson et al. Lancet Endocrinol 29 sept 2015 ; (2) Gassenhuber J et al. Prediction of diabetes remission after gastric bypass, a direct study || ePoster #599 ; (3) Diabetes Care 2016;39:861–877
Depuis le congrès EASD 2016 à Munich (12-16 septembre 2016) et un entretien avec le Pr François Pattou, chef du service de chirurgie Générale et Endocrinienne, CHRU Lille, Inserm U859 - Biothérapies du Diabète, Univ. Lille Nord)