Cancer du sein : mieux combattre la maladie grâce à l’activité physique

L’activité sportive dévoile chaque jour davantage son lot de bienfaits pour la santé. Elle aide à combattre la maladie dès l’annonce du diagnostic, et se pose désormais non plus en simple « soin de support » (selon la définition de l’INCa*) mais en véritable maillon constitutif des thérapies : la Haute Autorité de Santé a reconnu en 2011 l’activité physique et sportive comme une « thérapeutique non médicamenteuse ». 
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L’enquête nationale Podium (octobre 2016) lancée par la fédération CAMI Sport et Cancer, qui s’adressait aux patients et aux soignants, vient de livrer ses précieux enseignements sur les conditions d’accès à l’activité physique et sportive en cancérologie. Nous avons recueilli les conseils du  Dr Mahasti Saghatchian, médecin cancérologue spécialiste du cancer du sein à l’Institut Gustave Roussy, mis en images par notre partenaire Macadam Tonic.

Activités physique et sportive : un précieux allié pour combattre le cancer

Les résultats de l’enquête Podium montrent que si 3 patients sur 4 pratiquent une activité physique ou sportive malgré leur cancer, 13 % des patients ont arrêté en raison de leur maladie : à cause de la fatigue (pour 51% d’entre eux), du manque de courage (41%), des douleurs (33%)… mais aussi à cause des idées reçues sur l’importance qu’il faut accorder au repos en cas de fatigue liée à la maladie et aux traitements.

A l’inverse, 17% des personnes interrogées ont démarré une activité physique suite au diagnostic de leur cancer, par adhésion à l’idée que la pratique sportive participait à leur combat contre la maladie : la majorité d’entre eux espèrent en retirer des bénéfices sur l’amélioration de la qualité de vie (99%), des chances supplémentaires de guérison (83%), un maintien du statut social (67%).

Dr Mahasti Saghatchian, cancérologue à l’Institut Gustave Roussy : « le sport a un impact positif sur l’état physique, bien sûr, et aussi des effets physiologiques comme la baisse de cette grande fatigue liée au cancer pendant et après les traitements. L’activité sportive fait diminuer le risque de rechute. Et enfin elle a un impact psychologique important… »

Activité physique : à initier dès le diagnostic de cancer du sein

Le cancer du sein a ceci de particulier qu’il impacte physiquement et psychiquement les patientes avec des répercussions sur l’image de soi et sur la féminité.

Selon le Dr Mahasti Saghatchian : « Il est fondamental de parler dès le début de ce corps qui va être mutilé, parfois, et subir des traitements lourds. Il faut donc mettre immédiatement en pratique, dès l’annonce de la maladie, de l’activité physique pour toutes les patientes, sportives ou non. Entre le diagnostic et le début du traitement, il va y avoir une période d’attente : c’est à ce moment-là qu’il faut commencer l’activité physique pour celles qui n’en faisaient pas, et mettre en place un nouveau programme d’adaptation pour les sportives. »

Car rapidement arrive la chirurgie du cancer du sein, qui va atteindre la poitrine et le bras, lorsqu'il y a ablation des ganglions, avec le problème de « gros bras », cet œdème qui peut apparaître suite à une chirurgie du cancer du sein.

Il s’agit donc de lancer le plus tôt possible un programme d’exercices physiques qui comportent de l’oxygénation, du cardio-training dont l’intensité va être adaptée à chacune, ainsi que de la musculation légère pour renforcer à la fois les muscles et les os, et du stretching pour assouplir préventivement les parties du corps qui vont être traitées, pour éviter ensuite les séquelles des traitements.

Dr Mahasti Saghatchian : « Les traitements comme la chimiothérapie et l’hormonothérapie vont entrainer de la fatigue, et une prise de poids dans le cas particulier du cancer du sein. Ils vont avoir un impact sur les muscles et sur les articulations. Donc il faut s’y prendre le plus tôt possible pour préserver tout ce capital. »

Autre aspect important dans l’activité physique : il est primordial que les patientes fassent ce qui leur plaît comme activité possible, mais qu’elles le fassent en groupe. L’effet de groupe a un rôle majeur dans le mieux-être au cours de la maladie.

Cancer du sein : du sport adapté aux différents traitements

L’activité sportive pendant un cancer du sein est conditionnée par les types de traitements subis par la patiente. Voici les conseils du Dr Saghatchian :

  • Chirurgie du sein et/ou des ganglions :

« Dans les suites de la chirurgie des ganglions, certains sports sont contre indiqués : selon le bras opéré il y a des sports contre indiqués car ils entrainent des mouvements brusques du bras, comme le golf ou le tennis.

Par ailleurs, il ne faut pas courir dans les suites immédiates d’une chirurgie du sein (au moins 4 semaines), et remplacer le running par le yoga par exemple.

Il faut aussi éviter de porter des charges lourdes. Il ne faut pas faire peser des charges sur l’épaule ou sur le bras car cela peut aggraver l’œdème. Mais au contraire, une gymnastique adaptée engageant le bras et l’épaule est recommandée, car le fait de contracter les muscles provoque un drainage lymphatique naturel ! ». La natation est en particulier particulièrement efficace pour cela.

Nicolas Leroux, coach à la Fédération CAMI Sport et Cancer : « Lorsqu’il y a eu une chirurgie du sein ou des ganglions, l’activité physique peut reprendre 1 mois après la cicatrisation. Il faut re-mobiliser l’épaule et le cou en prenant soin de retrouver une bonne posture et un bon placement de l’épaule et du dos. »

  • Chimiothérapie :

« Contrairement à la chimiothérapie des autres cancers, les produits traitant le cancer du sein font souvent prendre du poids pendant le traitement. De plus, la patiente s’adonne au grignotage à cause des nausées et de la perte du goût du sucré. La constipation est un problème fréquent, contre laquelle le running ou la gymnastique abdominale peuvent petre utiles.

Il existe aussi de l’appréhension face à certaines pratiques sportives. Par exemple, les patientes croient qu’elles ne vont pas pouvoir poursuivre la natation pendant la chimiothérapie parce que leurs défenses immunitaires baissent… Mais pas du tout ! La natation est recommandée pendant les chimiothérapies.

En conclusion, le fait de bouger permet de lutter contre cette prise de poids, et cela permet d’atténuerles effets secondaires du traitement grâce à l’oxygénation des tissus. »

Nicolas Leroux : « En natation, nous proposons des exercices divers avec la planche ou les frites. Les 3 nages sont à privilégier en alternance pour travailler les bras : crawl, dos crawlé et brasse, avec un niveau d’intensité adapté à la patiente et à ses aptitudes. »

  • Radiothérapie :

« Il y a des précautions particulières à prendre pendant le traitement pour protéger la peau sur les zones traitées :

  • Pas de natation
  • Pas de sudation excessive donc pas d’effort intensif.

De plus la peau étant irritée par les rayons, les tenues de sport sont moins bien tolérées.

Si on se trouve après une chimiothérapie en particulier, les patientes doivent adapter l’intensité du sport, pratiquer par exemple le fractionnement en phases de 10 mn d’efforts car elles ont moins d’endurance… »

  • Hormonothérapie :

« Fondamentalement, le problème majeur lié à l’hormonothérapie sont les douleurs et les raideurs musculaires et articulaires. Si on ajoute la prise de poids et la fatigue, 40% des patientes arrêtent leur traitement ! C’est très grave ! Il faut leur dire que faire du sport est ce qui va justement soulager leurs douleurs articulaires et musculaires, va les assouplir, et va les aider à supporter leur traitement qui va durer 5 ans voire 10 ans…

De plus le sport est aussi une solution pour lutter contre l’ostéoporose qui s’accroît : quand on contracte un muscle, l’os qui est relié à ce muscle va pouvoir emmagasiner le calcium nécessaire. »

  • Et la fatigue…

« C’est un problème majeur. Non seulement pendant le traitement où elle est très présente, cette fatigue va perdurer tout le long des années qui suivent. Elle peut vraiment être intense, et gâcher la vie des femmes ! Une réponse efficace à cette fatigue : l’activité physique ! Mais le plus difficile va être de trouver en soi la force, l’énergie et l’envie de la pratiquer… Mais il faut savoir que l’activité physique peut revêtir diverses formes, et que l’important est de bouger : si on ne peut pas marcher pendant une demi-heure d’affilée, on peut fractionner en 3X 10 mn.

Je le répète : le traitement de la fatigue se fait par l’activité physique ! Cela a été démontré dans de nombreuses études. Les patients chez lesquels on avait prescrit de l’activité physique avaient une meilleure récupération !

Mais dans les phases d’intense fragilité, en période d’anémie ou d’aplasie, il faut rester chez soi. Il faut proposer à la patiente des séances douces de 10 minutes et sous surveillance médicale. »

La fatigue va avoir également un impact sur le plan psychologique : elle est anxiogène, et déprimante. L’activité physique est aussi une solution anti-stress et anti dépressive. Car l’activité physique a une double action : sur la fatigue psychologique, elle agit en provoquant une sécrétion d’endorphines bénéfique; et sur la fatigue physiologique liée au cancer et aux traitements, elle agit sur le problème inflammatoire très important qui accompagne les chimiothérapies.

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Source : -D’après un entretien avec le Dr Mahasti Saghatchian, médecin cancérologue spécialiste du cancer du sein à l’Institut Gustave Roussy
-Etude d’avril 2015, « Randomized Exercise Trial of Aromatase Inhibitor–Induced Arthralgia in Breast Cancer Survivor » http://ascopubs.org/doi/full/10.1200/JCO.2014.57.1547 in Journal Of Clinical Oncology 
-D’après un entretien avec Nicolas Leroux, Educateur Médico-Sportif  à la CAMI Sport et Cancer
-Enquête Podium : http://www.sportetcancer.com/podium
*http://www.e-cancer.fr/Patients-et-proches/Qualite-de-vie/Soins-de-support/Definition