Les hypochondriaques, des malades imaginaires ?

Publié par Dr Catherine Feldman
le 19/02/2003
Maj le
3 minutes
Autre
Si vous êtes en permanence inquiet pour votre santé, si à la moindre blessure, vous imaginez que la gangrène vous guette, si vous consultez de nombreux médecins, tous incapables de vous rassurer et pire encore qui vous disent « vous n'avez rien ! », il est fort possible que vous soyez hypochondriaque.

Nous connaissons tous dans notre entourage (à moins qu'il ne s'agisse de nous-même) des personnes s'inquiétant en permanence du moindre « bobo », traquant le moindre petit signe du corps, la moindre petite rougeur, le moindre petit bouton pour aussitôt imaginer le pire.

Vite, un avis médical !

Dès lors, ces personnes, n'arrivant pas à être rassurées par leurs proches, se tournent vers les médecins pour demander un avis, un diagnostic et un traitement. Intrigué par les symptômes, perplexe devant la normalité de l'examen clinique, soucieux de rassurer et de soigner, le médecin prescrit des examens complémentaires. Et le plus souvent, la consultation se termine par un « verdict » insoutenable pour le patient inquiet « vous n'avez rien ! », « votre analyse de sang est parfaite », « votre radio ne montre aucune anomalie ».

" Vous n'avez rien ! "

Dès lors, le praticien est accusé d'être incompétent et le patient se tourne vers d'autres médecins de renom. Hélas, la ronde des spécialistes n'apaise pas l'anxiété et le diagnostic fatidique autant craint qu'espéré n'arrive jamais.« Les obsédés de la santé » comme les désigne le psychiatre Michel Lejoyeux dans son livre « Vaincre la peur de la maladie* », « sont du parti de la maladie ». Autrement dit, ils filtrent les informations médicales qu'ils reçoivent et ne conservent avec bienveillance que les plus inquiétantes. Ainsi en est-il de Fred, qui a entendu que les symptômes qu'il exprime ne révèlent une maladie neurologique qu'exceptionnellement. Depuis, il est persuadé que les médecins qu'il consulte ignorent cela et sont en train de passer à côté de ce diagnostic fatal.

L'hypochondrie, une forme majeure d'anxiété

En réalité, l'hypochondrie est une forme majeure d'anxiété dont le point de fixation porte sur le corps et la crainte de la maladie. Néanmoins, si les médecins connaissent bien cette forme d'anxiété, ils n'arrivent pas toujours à apaiser le patient hypocondriaque. En effet, ce dernier est enfermé dans sa quête insatiable de réassurance, et il n'arrive pas à reconnaître et à accepter la nature psychologique de son inquiétude, qu'il légitime par sa conviction d'être malade. Pierre, patient cité par le Pr. Lejoyeux l'explique bien « je passe la moitié de ma vie à souffrir et l'autre moitié à essayer de comprendre pourquoi je souffre ». Mais de l'affirmation de la souffrance à la reconnaissance de sa dimension psychologique, il y a un pas que Pierre ne peut pas franchir.

Des " Centre de soins pour malades imaginaires " ?

Pour ces malades imaginaires, dont la souffrance psychologique est bien réelle, il n'existe pas (encore) de « Centre de soins », comme le propose avec humour Michel Lejoyeux. Le principe du traitement de l'hypochondriaque repose en fait essentiellement sur un accompagnement que les médecins généralistes sont souvent en mesure de proposer. L'existence d'une relation de confiance, l'écoute, peuvent dans un premier temps aider le patient à prendre conscience de la dimension obsessionnelle de ses préoccupations corporelles. Dans certains cas, une psychothérapie plus spécifique peut être proposée quand l'angoisse de la maladie est trop envahissante.

* Vaincre sa peur de la maladie. Michel Lejoyeux. Editions de la Martinière, avril 2002.

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