La crise de la quarantaine : démoniaque ou salutaire ?

Marie a 40 ans, elle ne supporte plus l'univers professionnel dans lequel elle travaille depuis presque 20 ans. Elle vient de démissionner. Franck, 45 ans, a décidé de quitter femme et enfants. Il a pris une chambre en ville pour "faire le point". Sandrine, 42 ans, court d'institut de beauté en institut, à la recherche d'un soin anti-âge qui dissimulera ses ridules sur le visage. André, 48 ans, fidèle à sa femme depuis 20 ans, vit avec fougue une nouvelle relation passionnelle. Quant à Claudine, elle a décidé de faire une retraite spirituelle dans une communauté bouddhiste. Tous ces quadragénaires qui manifestent à leur façon, un malaise, une certaine remise en question dans leur vie, seraient-ils atteints par le même virus, la CMV, c'est-à-dire la "crise du milieu de la vie" ou "crise de la quarantaine" ?
40 ans, l'âge du bilan
A tous les âges de la vie, on se pose des questions sur ses choix dans l'existence mais tout se passe comme si vers 40 ans, on avait plus le droit à l'erreur. Les questions deviennent alors plus cruciales et les choix plus radicaux. A cette période, nombre d'adultes ressentent le besoin de faire un bilan intérieur : Qu'est-ce que je veux vraiment ? Que puis-je changer ? Qu'ai-je fait de ma vie jusqu'à présent ? Que puis-je encore faire ? A quoi dois-je renoncer ? Et c'est parfois sous la forme d'une "crise", plus ou moins prolongée, que cette remise en question s'exprime.
40 ans pour certains, c'est maintenant ou jamais...
La crise du milieu de vie peut s'exprimer par une simple tristesse passagère, par un sentiment d'inutilité, de vide intérieur, par une agressivité vis-à-vis de son entourage, par un moindre désir sexuel vis-à-vis de son (sa) partenaire. Parfois, le malaise se manifeste par de véritables passages à l'acte, comme une fuite du domicile conjugal, l'envoie d'une lettre de démission à son employeur, une relation extra-conjugale avec une femme de l'âge de sa fille (ou un homme de l'âge de son fils, etc.). Tous ces comportements sont en fait nourris par un sentiment d'urgence, lié à une prise de conscience que la vie est éphémère. Autrement dit, l'existence ne dure qu'un temps et l'envie de vivre pleinement sa vie, d'échapper à la monotonie se réveille. Le quadragénaire réalise que le compte à rebours a commencé et s'il n'a pas exprimé certains de ses désirs jusqu'à présent, c'est maintenant ou jamais qu'il peut encore le faire.
La crise de la quarantaine, une nouvelle crise d'adolescence ?
Selon des études américaines, cette crise surviendrait principalement entre 37 et 48 ans. L'âge de l'adolescence est donc bien révolu, pourtant, il existe des points communs avec cette première crise de la vie. Comme à l'adolescence, le quadragénaire, en proie à ce que certains nomment aussi le "démon de midi", remet en cause l'ordre établi. Après vingt ans passés à mener une vie sage et raisonnable, il cherche à s'affranchir de ce carcan qui l'étouffe (et qu'il a lui-même contribué à définir). Comme un adolescent, il se met à transgresser les règles et à vivre des expériences qu'il n'avait pas vécues jusqu'alors. Le (ou la) quadragénaire en crise devient aussi soucieux de vérifier sa séduction et n'hésite pas à rompre avec la fidélité, qu'il avait érigée comme valeur essentielle dans son couple. Comme à l'adolescence, chacun exprime à sa façon cette crise d'identité, avec plus ou moins d'intensité.
Le prix à payer du changement
Si la crise paraît jaillir du jour au lendemain, elle est en réalité le fruit d'une longue maturation. Elle se révèle souvent à l'occasion d'un événement particulier, comme le décès d'un parent, une maladie ou l'adolescence de l'un de ses enfants. Tout l'enjeu personnel et familial est de réussir cette "crise" qui est surtout le signal d'alarme d'un besoin d'évolution personnelle. A 40 ans, il est encore temps de faire certains choix professionnels ou affectifs. C'est aussi le bon moment de faire le point sur ses valeurs essentielles dans la vie, pour réagir, évoluer, changer, ajuster ses choix et ainsi donner plus de sens à son existence. Et la réussite de cette crise nécessite aussi de faire le deuil d'une jeunesse éternelle. Autrement dit, la crise du milieu de vie est une crise salutaire, nécessaire pour réussir sa deuxième moitié de vie. Antidote à la résignation, elle est l'occasion rêvée pour mieux mettre sa vie en harmonie avec sa personnalité et ses valeurs.
A lire
La Deuxième Chance, la Crise du Milieu de la Vie, Françoise Millet-Bartoli, Ed. Odile Jacob, septembre 2002.