Douleur : en finir sans médicaments !

Publié par Stéphanie Paicheler pour Côté Santé
le 20/02/2017
Maj le
5 minutes
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La douleur est le premier motif de consultation !  Ainsi, un Français sur trois souffre de façon chronique. Quand elle s’éternise au-delà de trois mois, la douleur devient une maladie à part entière. Et entraîne dans son sillage anxiété, dépression, troubles du sommeil... En bref, elle empoisonne la vie. Un mal de dos tenace, une fibromyalgie, de l’arthrose, des migraines à répétition... Quelle que soit son origine, la douleur chronique se soigne d’abord avec des médicaments. Avec plus ou moins de succès.

La musique adoucit les douleurs

Heureusement, quand le traitement médicamenteux échoue, on peut se tourner vers des thérapies plus atypiques. La musicothérapie est l’une d’elles. Et le docteur Patrick Giniès, qui l’expérimente depuis des années dans le Centre antidouleur du CHRU de Montpellier, est convaincu de ses bienfaits. À ses patients qui souffrent de douleurs chroniques résistantes aux traitements classiques, il propose une, deux ou trois séances de 20 minutes par jour, la durée de leur hospitalisation.

« Jazz, rock, reggae, classique... Ils commencent par choisir leur musique préférée », explique-t-il. L’idée n’est pas de leur demander de gratter les cordes d’une guitare, mais de leur faire écouter des morceaux conçus spécialement pour « diminuer l’intensité de la douleur. » Le secret : une courbe en U, tempo rapide en début de séance, plus lent et reposant au milieu – c’est le temps de la relaxation –, et à nouveau plus élevé à la fin, pour un éveil en douceur. La musique stimule la fabrication d’endorphines, détourne l’attention du patient de la douleur, augmente le bien-être, diminue l’anxiété. Tout bénèf’ !

Soulager par le (grand) froid

Vêtus d’un maillot de bain, ils ne filent pas à la plage, mais s’enfermer 3 minutes dans un gros congélateur réglé à -110°C. Des amateurs de sensations fortes ? Non, des particuliers qui ont compris l’intérêt du froid pour apaiser les douleurs rebelles. Pionnier dans le domaine, l’Institut national du sport (Insep) a mis en place le système de cryothérapie corps entier en 2009. Au départ exclusivement réservé aux sportifs de haut niveau venus booster leur récupération, il est désormais ouvert au grand public. Depuis, la cryothérapie corps entier, c’est son nom, est plébiscitée par des personnes souffrant de tendinites, d’entorses, de polyarthrite rhumatoïde, de fibromyalgie...

« Tout ce qui est inflammatoire », résume Jean-Robert Filliard, adjoint au responsable du département médical. Habillés d’un maillot, donc, mais aussi de sabots, de chaussettes de ski, d’un bandeau sur les oreilles, d’un masque de chirurgien et de gants pour protéger les extrémités, ils plongent, sous le regard attentif d’un kinésithérapeute, dans une cabine gelée. « La cryothérapie crée un choc thermique, en faisant passer la température cutanée de 32 à 10-15°C », décrypte-t-il. L’effet ? Anti-inflammatoire, et antalgique. Au dire des patients, ça marche. « Après 10 séances, beaucoup n’ont plus mal pendant 3 à 6 mois. »

Plongée dans le cerveau

Stimulation magnétique transcrânienne. Trois mots, et beaucoup d’espoir chez les personnes souffrant de douleurs neuropathiques. Rebelles aux traitements classiques, ces douleurs sont provoquées par des lésions du système nerveux. « On a déjà montré que cet outil marchait pour certaines douleurs chroniques », rappelle le docteur Didier Bouhassira, neurologue. « Pour la fibromyalgie, par exemple, on note une diminution de la douleur dans 30 à 40 % des cas. Nous cherchons maintenant à savoir si la technique peut connaître la même réussite pour les douleurs neuropathiques, et surtout si ses bienfaits peuvent être maintenus sur le long terme. »

Malgré son nom impressionnant, la technique est sans douleur, et non invasive. Le principe : « une bobine placée sur le crâne du patient envoie des ondes magnétiques, qui vont stimuler le cerveau en activant les centres de modulation de la douleur ». Une sorte de GPS du cerveau, se basant sur des IRM, permet de repérer très précisément la cible à atteindre.

Une recherche hyperactive

Partout dans le monde, des chercheurs cherchent à mieux comprendre les mécanismes de la douleur, pour mieux la soulager. Une foule de molécules sont actuellement testées. Récemment, des chercheurs américains et allemands ont publié dans la revue scientifique Nature les résultats d’une étude sur une molécule prometteuse. Son nom : PMZ21. Sa formule a été imaginée après avoir mis en concurrence plus de 3 millions de molécules ! Et les tests sur les souris sont intéressants : la molécule aurait des effets antidouleur comparables à ceux de la morphine, mais qui durent plus longtemps, et qui ne rendent pas « accros ».

Reste à passer le cap des tests sur les humains avant (d’éventuellement) retrouver la molécule miracle en pharmacie, ce qui devrait prendre plusieurs années... Autre avancée prometteuse : les injections de toxine botulique. Jusqu’ici réputé pour ses propriétés antirides, le Botox semble soulager les douleurs neuropathiques. Des chercheurs de l’Inserm ont dévoilé les résultats d’une étude clinique allant dans ce sens. « On recouvre la zone douloureuse avec des mini injections », décrit le docteur Bouhassira. « Les effets perdureraient 3 mois. »

Encore mieux, il semble que si les injections reprennent après ce délai, les effets antidouleur sont amplifiés. « Ça ne marche pas chez tout le monde », prend soin de préciser le spécialiste. Mais cette arme supplémentaire dans la panoplie antidouleur devrait en réjouir plus d’un...

Le droit de ne plus souffrir

Il n’y a pas si longtemps, on la considérait comme un symptôme « normal ». Il a fallu attendre la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades pour que le soulagement de la douleur soit reconnu comme un droit fondamental de toute personne. Ceci dit, la douleur est subjective, profondément personnelle. Et donc complexe, et difficile à quantifier.

Si l’on s’en tient à la définition officielle de l’Association internationale pour l’étude de la douleur (IASP), « la douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle, ou décrite dans ces termes. »

Sources

"Stop à la douleur !", Magazine Côté Santé, N° 106, Janvier/Février 2017.

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