Crise de la quarantaine, peut-on l'éviter ?

On l'appelle crise de la quarantaine. Parfois crise de milieu de vie. Quel qu'en soit le nom, ce moment est toujours synonyme de remise en question. Si certain.e.s souffrent d'une sérieuse déprime, d'autres s'en sortent par le haut.
Alors, la fameuse crise de la quarantaine est-elle un passage obligé ? A condition de prendre le recul nécessaire, cette transition peut tout à fait bien se dérouler. Explications, et conseils, avec le Dr Christophe Fauré, psychiatre à Paris passé par un monastère bouddhiste.
Les femmes semblent plus touchées
Le vieillissement est foncièrement injuste, c'est un fait. Avec les années, le corps perd de sa fermeté et se marque davantage. Les rides font leur arrivée, la vitalité diminue. Et justement, "le corps, c'est le support de la séduction et de notre rapport aux autres", souligne le Dr Fauré.
En la matière, le passage du temps est sans doute plus cruel envers les femmes – que ce soit pour des raisons physiques (grossesse, allaitement, etc) ou sociales (pression du regard extérieur). "Les femmes entrent progressivement dans la fin de la capacité à procréer, sans être encore dans la ménopause", confirme le psychiatre.
C'est peut-être pour cela que la population féminine est légèrement plus touchée par la crise de la quarantaine. Mais cela ne signifie pas que les hommes soient épargnés. Eux aussi voient apparaître des troubles – sexuels notamment – auxquels ils n'avaient jamais été confrontés.
Une période de grand chamboulement
Il n'y a pas que sur le plan physique que le cap de la quarantaine se fait ressentir. 45 an s, c'est l'âge du grand chamboulement. Les enfants quittent le cocon familial pour prendre leur indépendance. "Le couple parental redevient un couple conjugal, ce qu'il avait peut-être mis de côté pour s'occuper des enfants", note Christophe Fauré.
Il faut alors se retrouver mais aussi, parfois, se séparer. "C'est une période à risque de relations extraconjugales, parce qu'on s'interroge sur la relation", admet le psychiatre. Dans le même temps, il faut revoir son rôle de parent – ascendant comme descendant.
"Nos propres parents sont plus âgés, et ils peuvent avoir besoin d'une assistance alors qu'ils étaient des piliers", résume le Dr Fauré. Et comme si cela ne suffisait pas, la vie professionnelle atteint elle aussi un tournant. On devient "senior". Cela peut se produire au point culminant de sa carrière. Mais d'autres vont s'interroger. Et, pourquoi pas, se réorienter.
La crise n'est pas systématique
Il faut l'admettre, tous les éléments sont réunis pour déstabiliser un individu. "Ce cumul peut d'autant plus fragiliser qu'on n'a pas toujours les réponses à son questionnement intérieur", souligne Christophe Fauré. Mais la crise est loin d'être automatique. Ce serait même plutôt le contraire.
"La crise se produit quand la transition ne se déroule pas bien, indique le psychiatre. Une étude américaine a montré que seuls 8 % des gens en souffrent vraiment." Se sentir chamboulé, entamer une réflexion sont, par contre, des sentiments normaux.
D'ailleurs, attention aux idées reçues. Les grands chambardements qui se produisent vers 45 ans ne sont pas toujours la conséquence de cette fameuse crise. Un divorce n'est pas forcément le témoin d'un mal-être.
Savoir prendre du recul
La transition peut, en réalité, représenter une opportunité : celle de prendre du recul sur son existence et ses envies. "Si on négocie bien ce virage, il peut être véritablement bénéfique", confirme Christophe Fauré. Pour résumer, l'idée est de retrouver sa boussole interne et de trouver une solution créative à son questionnement.
"Puisque la transition va se produire, autant l'aborder avec intelligence et conscience, recommande le psychiatre. On arrêter d'ajuster sa vie en fonction de ce qu'autrui attend de nous." Mais ce conseil soulève une interrogation : comment faire la distinction entre ce que l'on souhaite, et de ce que les autres exigent ?
"Il faut savoir se poser, et regarde attentivement ce qui se passe en nous", tranche le spécialiste. Il conseille de suivre quatre axes de réflexion sur son existence et son évolution.
Les quatre axes de développement à explorer
Le premier axe à examiner, c'est ce qui va bien dans sa vie et que l'on souhaite conserver. "Ces choses, il ne faut pas y toucher car elles rendent heureux", indique Christophe Fauré. Ces sources d'épanouissement constituent, en partie, le "nord" de la boussole interne. Mais celle-ci peut avoir besoin d'ajustements. Ces ajustements nécessaires forment le deuxième axe de réflexion.
Il porte sur les choses qui sont agréables mais ont besoin d'être calibrées car elles ne nous correspondent pas exactement. "Les règles du jeu de la première moitié de vie ne sont pas toujours adaptées à la deuxième partie, pour paraphraser Carl Jung", explique le psychiatre. Un parent fusionnel devra, par exemple, ajuster sa relation avec sa progéniture – devenue indépendante.
Une fois ce travail réalisé, arrive le moment de l'exclusion. "On prend la décision d'arrêter certains modes de fonctionnement, de mettre fin à des comportements et des attitudes dont on ne veut plus", résume le spécialiste. Si le problème est lié au mariage ou au métier, une séparation peut être nécessaire.
Enfin, il s'agit de définir ce qu'on souhaite introduire dans son existence pour lui donner du sens. Du bénévolat, par exemple, mais aussi des activités de loisir. "Une de mes patientes a dû se mettre au sport pour son cœur, se souvient Christophe Fauré. Elle a fini par adorer cela, parce qu'elle s'épanouissait."
Ces disciplines qui vous aideront
Pour réussir ce travail de réflexion sur soi, savoir prendre de la distance est essentiel. Certaines disciplines aident particulièrement à y parvenir : celles dites "du corps et de l'esprit". Yoga, Qi Gong, Tai Chi ou encore méditation en pleine conscience sont conseillés.
Ces pratiques "permettent de décanter l'agitation mentale, de laisser émerger une clarté d'esprit, souligne Christophe Fauré. Il faut en profiter pour entrer dans une dynamique plus respectueuse de son fonctionnement interne."
Le yoga, par exemple, aide à mieux comprendre le fonctionnement de son corps. La méditation, elle, permet d'avoir un autre regard sur son esprit, la gestion de ses émotions. Et de gagner la sérénité nécessaire à cette réflexion sur soi.
Sources
S'aimer enfin ! Un chemin initiatique pour retrouver l'essentiel, Christophe Fauré, éditions Albin Michel
Maintenant ou jamais!, Christophe Fauré, éditions Albin Michel
Comment bien vivre sa crise de la quarantaine ?, France Inter