Cancer colorectal : pourquoi il ne faut pas bouder le dépistage

Publié par Hélène Joubert
le 12/02/2016
Maj le
5 minutes
Autre
« Attention, vous êtes peut-être assis sur un cancer ! » Le "Côlon day" joue la carte de l’humour pour marquer les esprits. Comme chaque année, la journée d’information sur le cancer colorectal aura lieu mardi 1er mars. Un cancer du côlon se guérit dans 9 cas sur 10, à condition de le détecter précocement. Passé l’âge de 50 ans, aucune raison de bouder le dépistage, d’autant que dans 80% des cas il consiste en un simple test chez soi. Qui est concerné ?

Seuls 30% des Français procèdent au dépistage pour le 2ème cancer le plus mortel

42 000 nouveaux cas de cancer colorectal chaque année... 17 500 victimes soit 330 personnes chaque semaine en France… des chiffres qui devraient nous faire réagir (1). Et pourtant, même si le cancer du côlon est, avec celui du poumon, l’un des cancers les plus mortels, moins d’un Français sur trois se fait dépister ! Le cancer du côlon les inquiète peu (46% ne se déclarent pas inquiets). Résultat : lorsqu’il existe des symptômes, 50% des cancers diagnostiqués sont métastatiques, c’est à dire qu’ils ont déjà essaimé dans le reste du corps. Or, à ce stade du diagnostic, le risque d’en mourir est de 80 %. En revanche, lorsque le cancer colorectal est pris tôt (avant l’apparition de symptômes, grâce au dépistage) la guérison avoisine les 90% voire 100% (au stade dit "T 1 superficiel" sans métastase ni ganglion).

Dr Éric Vaillant, gastro-entérologue à Lille, président du comité de pilotage de "Côlon day" : « Si seuls 30% des Français se font dépister pour le cancer du côlon, c’est avant tout par méconnaissance : pour près d’une personne sur deux « pas de symptôme = pas de cancer ». Seuls 53 % sont conscients que les symptômes du cancer colorectal (du sang dans les selles ou des maux de ventre) n’apparaissent qu’à un stade avancé. La majorité des Français (54%) ne se perçoit pas non plus comme à risque. Quant au caractère tabou de la localisation, c’est un frein tenace. Enfin, les médecins recommandent encore trop peu le dépistage du cancer colorectal ».

Personnes à risque moyen de cancer colorectal : un nouveau test immunologique

Dans le cancer du côlon, le risque "faible", c’est avant 50 ans. Après cet âge, on est soit à risque "moyen" soit à risque "élevé". Le cancer colorectal se forme sur plusieurs années à partir de polypes "poussant" sur la paroi tapissant l’intérieur du côlon et du rectum. C’est simple : enlever un polype bénin permet d'éviter un cancer du côlon. Rare avant 50 ans, sa fréquence augmente rapidement par la suite. C’est pourquoi le dépistage est préconisé tous les 2 ans dès l’âge de 50 ans pour les personnes à risque moyen, c’est-à-dire sans symptôme apparent ni antécédent personnel ou familial de cancer ou d’adénome colique (polype > 1 cm). Leur risque de cancer colorectal est de 4% au cours de leur vie. Tous les deux ans, elles reçoivent à leur domicile une invitation au dépistage pris en charge à 100 % par l'assurance maladie.

Depuis 2015, un nouveau test dit immunologique a remplacé l’ancien test Hemoccult®. Il vise à déceler la présence de saignement occulte dans les selles. Ce nouveau test, simple, rapide et efficace est à faire chez soi. Il consiste à prélever un échantillon de selles et à l'envoyer dans les cinq jours au laboratoire de biologie médicale indiqué pour des résultats dans les quinze jours.

Il est bien plus performant que son prédécesseur, avec une sensibilité de 70 à 80%, contre 50% pour l’ancien test Hemoccult®. Cela signifie qu’en cas de test immunologique positif, la présence d’un cancer est sûre à 70-80%. Un test positif (environ 4 % des cas) ne dénote pas forcément la présence d’un cancer mais la coloscopie s’impose pour le confirmer ou l’infirmer. En revanche, lorsque le résultat est négatif (environ 96 % des cas dans la pratique courante), cela signifie qu'aucun saignement n’a été détecté dans les selles.

Personnes à haut risque : la coloscopie d’abord

Seul un cancer colorectal sur trois est familial. Pour ces personnes à risque élevé (ayant des antécédents familiaux de cancer colorectal dans la famille) ou très élevé, on zappe la case "test immunologique" pour subir d’emblée une coloscopie. Leur risque de cancer colorectalse situe entre 8 et 15% au cours de leur vie. On quitte alors le domaine du dépistage pour celui de la prévention. Effectuée sous anesthésie générale à l’aide d’un coloscope, la coloscopie* permet de déceler la présence éventuelle de polypes et de les retirer avant qu'ils ne se transforment en cancer. Dans la pratique courante, suite à un test immunologique positif, la coloscopie détecte un polype dans 30 à 40 % des cas et un cancer dans 8 % des cas.

Dr Éric Vaillant : « Aujourd'hui, la coloscopie réduit le risque de cancer de 70 à 90% à cinq ans. Toute la difficulté est d’identifier les personnes à risque. Actuellement en France, 110 000 personnes sont suivies par coloscopie pour le cancer du côlon. Ce qui est vécu comme le plus désagréable est la préparation à la coloscopie avec la purge préalable afin de vider le côlon de ses matières. Pour pallier cet inconvénient, de nouveaux types de préparations ont été mis au point : des volumes moins importants à ingurgiter (un grand verre de produit contenant de grosses molécules puis 3 litres d’eau contre 4 litres de boisson salée auparavant) et des fractionnements de la préparation ».

"Côlon day " en pratique

Chaque année en France, "Mars bleu" est consacré au dépistage et à la prévention du cancer colorectal. Pour que cela ne reste pas un vœu pieux, les gastro-entérologues en cabinet, à l’hôpital ou en clinique, mobilisés par le Conseil National Professionnel d’Hépato-Gastroentérologues (CNPHGE) avec le soutien de l’Institut National du Cancer (INCa) accueilleront le 1er mars tous ceux qui le souhaitent afin de répondre aux questions ou d’évaluer gratuitement leur niveau de risque.

Tous les renseignements sur www.colon-day.fr

Sources

(1) sondage 2016 Opinion Way pour le Conseil National Professionnel d'Hépato-gastroentérologie ; *"La coloscopie en vidéo" un film pédagogique sur le déroulement d’une coloscopie www.colon-day.fr/la-coloscopie-en-video/

D’après un entretien avec le Dr Éric Vaillant, gastro-entérologue à Lille, président du comité de pilotage de « Côlonday » 

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