Quand une promotion déstabilise...

Cadeau empoisonné ou mauvais timing ?
En théorie, une promotion doit arriver quand on est prêt à accéder à de nouvelles responsabilités, réputées d'exercice plus difficile. Sinon, elle sent le cadeau empoisonné, destiné au pire à vous décrédibiliser. Heureusement, ce scénario est rare ! Le plus souvent, une promotion prématurée n'est « que » le résultat d'une erreur de management. Votre supérieur et/ou les DRH (Direction des Ressources Humaines) ont surévalué vos capacités, peut-être dans l'urgence de pourvoir un poste délicat. Cette promotion casse-pipe ne doit pas vous saboter le moral. Elle ne vous remet pas entièrement en cause. Un excellent ingénieur peut se révéler un piètre directeur technique. Normal : les compétences requises dans les deux cas sont différentes. Vous pouvez alors, sans vous « griller », demander à retrouver vos anciennes fonctions. Mais si votre motivation est intacte, identifiez vos faiblesses et demandez des formations complémentaires. L'idéal étant de faire cette démarche avant d'accepter de nouvelles responsabilités.
Le stress de la promotion, une réaction normale
Même préparées, les personnes promues ressentent un « stress de la promotion », bien connu des psychologues du travail. « Le stress peut être induit par un évènement heureux, explique Patrick Legeron, psychiatre et auteur du « Stress au travail ». C'est une réaction d'adaptation à une situation nouvelle. Cela devient un « challenge » lorsque la personne se dit qu'elle va y arriver. Mais si son attitude mentale est négative, c'est du stress. » Il est alors possible de suivre quelques séances de coaching pour apprendre à adopter des attitudes positives. Quand la promotion concerne une femme, la situation se complique. « Françoise Giroud a dit que l'égalité hommes/femmes existerait le jour où des femmes incompétentes seraient promues à des postes importants », rappelle Patrick Legeron. « La promotion des femmes est entourée de suspicion. Les femmes ont toujours le sentiment qu'elles doivent faire leurs preuves et être parfaites ! Elles se posent forcément la question de leur légitimité. Les hommes, moins. »
Changer d'image, c'est déstabilisant
Changer de travail, c'est changer l'image que l'on a de soi et que les autres ont de vous. « Quand l'identité sociale est perturbée, l'individu peut être déstabilisé, en proie à des conflits de rôle, explique Patrick Legeron. « Untel va par exemple se mettre à vouvoyer ses anciens amis et collègues dont il est devenu le chef. Et je connais même une femme qui a refusé une promotion juste pour ne pas avoir à gérer cette situation » précise-t-il. Parfois, c'est l'image de soi qui coince. Si tout concourt à prouver que votre promotion est justifiée, les racines du malaise ne se trouvent peut-être pas dans votre CV mais dans votre cerveau. Les phrases du type « je ne suis pas à la hauteur » ou « je n'y arriverai jamais » sont des venins distillés par un manque de confiance en soi. Surtout s'il ne touche pas que le domaine professionnel. Une psychothérapie peut alors s'avérer utile.Enfin, une promotion peut déstabiliser parce qu'on n'avait pas pensé à toutes ses conséquences sur sa vie personnelle et familiale. Autant de données à prendre en compte avant de dire « oui ».
A lire
« Le stress au travail », Patrick Legeron, Odile Jacob, 2001.« L'estime de soi », Christophe André, François Lelord, Odile Jacob.