Cancer du sein et soutien-gorge : un médecin déconstruit ce mythe

Parmi les fausses croyances autour du cancer du sein, persiste l’idée selon laquelle le soutien-gorge à armature favoriserait la maladie. Une idée bien évidemment fausse que s’empresse de détricoter un médecin dans le Huffington Post UK.
© Adobe Stock

L’imaginaire collectif entretient et alimente certaines fausses croyances qui peuvent semer la confusion chez les personnes touchées de près ou de loin. En matière de cancer du sein, il est un mythe qui circule encore qui pourrait affoler toute la population féminine : il s’agit de la rumeur tenace selon laquelle le port du soutien-gorge à armatures exposerait à un risque accru de cancer du sein.

Une hypothèse complètement fausse que s’empresse d’infirmer l’Institut national du cancer sur son site : "Contrairement à certaines rumeurs, aucune preuve scientifique ne démontre que porter un soutien-gorge augmente le risque de cancer du sein".

Malgré le non-sens et la fausseté de cette croyance, des vidéos continuent à circuler sur les réseaux sociaux tendant à véhiculer et faire enfler cette "fake news" (infox) de façon virale. Tant et si bien que le Dr Liz O'Riordan, chirurgienne spécialisée en cancer du sein, elle-même touchée par un cancer du sein, a cru bon de publier une chronique sur The Huffington Post UK pour déconstruire une bonne fois pour toutes ce mythe.

Et pour mieux la balayer, la chirurgienne revient à la genèse de cette construction mentale montée de toutes pièces. Tout a commencé en 1995 avec la publication du livre Dressed to Kill : The Link between breast cancer and bra, de Sydney Ross Singer et Soma Grismaijer, signés par un couple d’anthropologues.

Ce livre, qui a été bien entendu démenti, affirmait que le port d'un soutien-gorge à armatures pendant plus de douze heures par jour augmentait considérablement le risque de cancer du sein, explique le DR 0’Riordan, qui prend soin de préciser que les auteurs n’étaient en aucun cas médecins et ne jouissaient d’aucune formation médicale. Leur affirmation était tirée d’une série d’entretiens menés auprès de 5 000 femmes américaines, dont la moitié s’étaient vues diagnostiquer un cancer du sein.

Selon les auteurs, le soutien-gorge à armatures exerçait une pression sur les tissus mammaires, bloquant le système lymphatique, et entraînant une accumulation de toxines dans les seins, à l’origine du cancer du sein.

Les soutien-gorge ne compressent pas les tissus mammaires

La chirurgienne tient à rétablir la vérité en revenant sur ces contre-vérités : d’abord, le soutien-gorge à armature bien ajusté "ne repose pas sur le tissu mammaire" mais sous le sein donc par définition ne le compresse pas (sauf à choisir une pièce trop petite). Ce vêtement ne bloque pas le drainage lymphatique. "Le liquide lymphatique présent dans le sein remonte vers les ganglions lymphatiques de l'aisselle, et non vers l'armature. Par conséquent, même si un soutien-gorge était trop petit et que l'armature appuyait sur le bord inférieur du sein, cela n'affecterait pas l'écoulement de la lymphe", précise le médecin.

La lymphe ne contient pas de toxines cancéreuses

Quant au liquide lymphatique, il ne contient pas de toxines cancéreuses. "Les vaisseaux lymphatiques de votre sein drainent les déchets du métabolisme. Ce liquide lymphatique est filtré dans les ganglions lymphatiques qui piègent ou détruisent tout ce qui est nocif, comme les bactéries. Le reste est réabsorbé dans la circulation sanguine où le foie et les reins s'en chargent".

Pas de risque donc que la lymphe ne se transforme un agent pathogène à risque de cancer du sein. Ce qui n’est en revanche pas le cas de l’alcool ou de la nicotine, des substances cancérigènes non présentes dans la lymphe mais qui peuvent, quant à elles, favoriser le cancer du sein. "Lorsque vous fumez ou buvez, ces substances sont absorbées dans la circulation sanguine et peuvent provoquer des mutations cancéreuses dans les cellules, entraînant le développement d'un cancer du sein".

Des observations sans fondement scientifique

Enfin dernier argument avancé par la chirurgienne et qui porte le coup de grâce à cette fausse rumeur : le livre paru en 1995 s’est appuyé sur des observations qui n’ont pas de valeur scientifique. De plus "de nombreux éléments n'ont pas été pris en compte, tels que l'âge, les antécédents familiaux de cancer du sein, la consommation d'alcool, le niveau d'activité et la masse corporelle, dont il a été prouvé qu'ils augmentent le risque de cancer du sein".

Voilà qui devrait apaiser les éventuelles craintes de certaines femmes au moment d’enfiler leur soutien-gorge.

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