Pilule contraceptive de 3ème génération : quel est le risque de maladie cardiovasculaire ?

Trois ans après la crise de la pilule contraceptive œstroprogestative de 3ème ou de 4ème générations, désormais toutes dé-remboursées, il est temps de rassurer les femmes. Ces pilules, efficaces à 99,7%, ont des effets secondaires connus mais limités, en particulier sur le risque de maladie cardiovasculaire, à condition de respecter à la lettre les contre-indications. Elles valent pour l’ensemble des pilules œstroprogestatives : jamais après 35 ans, chez les fumeuses et en cas de surpoids.
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Pilule contraceptive 3ème et 4ème générations : une crise pour rien ?

La polémique sur la pilule contraceptive de 3ème et 4ème générations a débuté en septembre 2012. Elle aura laissé des traces : l’idée fausse que ces pilules sont avant tout dangereuses a eu le temps de marteler les esprits. Elle aura cependant eu le mérite de rappeler qu’il existe des contre-indications à ces pilules, et aux contraceptifs œstroprogestatifs en général. Tout a commencé par le dépôt de plaintes suite à des accidents thromboemboliques (formation d’un caillot sanguin qui bouche un vaisseau, une artère, une veine ou une cavité cardiaque, bloquant l’oxygénation d’un organe) veineux dans ces cas, dont celle d’une jeune femme lourdement handicapée après un accident vasculaire cérébral.

Cette crise a eu pour effet une baisse du recours à la pilule contraceptive en général, passant de 50 % à 41 % entre 2010 et 2013 mais surtout une chute de 45% de la prescription des pilules de 3 et 4ème génération. Certaines femmes se sont tournées vers le préservatif (+3,2%), le stérilet ou dispositif intra-utérinDIU (+1,9%), mais aussi, malheureusement, vers d’autres méthodes dites naturelles peu fiables comme les dates de rapports (rapports en dehors des périodes de fécondabilité) ou le retrait (+ 3,4 points) (1). La conséquence fut une augmentation dès l’année suivante, en 2013, du nombre d’interruptions volontaires de grossesse de +4,7 % soit 10 000 IVG de plus par rapport à 2012, soit 217 000 avortements au total.

Diane 35, qui n’était pas considérée en France comme une pilule contraceptive mais comme un « traitement anti-acnéique aux propriétés contraceptives », a concentré les critiques. Retirée du marché français, elle a été réintégrée en janvier 2014 sur une directive européenne.

Pilule contraceptive 3ème et 4ème générations : la réalité du risque de maladie cardiovasculaire

Afin de réduire le risque de maladie cardiovasculaire, dont celui d’accidents thromboemboliques artériels, les pilules de 3ème et 4ème générations ont été développées à l’aide de nouveaux progestatifs (desogestrel) comparées à celles de 2ème génération. Elles augmentent cependant légèrement le risque de thrombose veineuse profonde : celui-ci est annuellement de 2 pour 10 000 femmes qui ne prennent pas de contraceptifs oraux, de 4 à 7 pour 10 000 qui utilisent une pilule de 2ème génération, et de 6 à 7 chez les utilisatrices de pilule contraceptive de 3ème génération. Rappelons que la grossesse et le post-partum immédiat confèrent un risque de 10 pour 10 000 !

Néanmoins, les pilules de 3ème et 4ème générations ont une place dans le paysage contraceptif : plus que les autres elles réduisent le risque vasculaire artériel (risque d’infarctus du myocarde de 1,8 sous 3ème génération contre 2,1 sous 2ème génération) (2). Mais ce qu’il faut comprendre, c’est que les accidents thromboemboliques sont avant tout liés aux facteurs de risque de la femme plus qu’à la pilule œstroprogestative elle-même.

Pr Pierre Marès, gynécologue obstétricien (Nîmes) : « Cette crise nous aura donné une leçon : il faut respecter les contre-indications relatives à la pilule contarceptive. Au premier chef : l’âge, le tabac et l’obésité. Les médecins doivent présenter l’éventail des méthodes contraceptives pour un choix partagé sur celle qui convient au mieux à la femme et au couple, et la réévaluer dans l’idéal chaque année. Le discrédit ne doit pas être jeté sur les pilules : la contraception hormonale œstroprogestative est très efficace pour limiter les grossesses non-désirées et si elle augmente légèrement le risque de cancer du sein et peut-être du col de l’utérus (3), elle réduit de 80% le risque de cancer de l’ovaire pendant les 20-30 années qui suivent une prise de 10 ans (3000-5000 décès évités par an en Europe) et de 12% celui des cancers colorectaux et de l’endomètre (1000 à 3000 décès évités) (4). »

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Source : (1) Nathalie Bajos et al. La crise de la pilule en France : vers un nouveau modèle contraceptif ? Numéro 511 mai 2014 ; ; (2) Plu-Bureau G et al. Best Pract. Res. Clin. Endocrinol. Metab 2012; (3) Cancer du sein : RR=1.5 et le risque absolu = 1 cas pour 20 000 femmes (sipilule débutée avant 18 ans et prise prolongée). THIS, Gynécologie PRAT Mars 2013 ; (4) Etude Cohorte Royal College Hannaford BMJ 2007 – 2010
D’après un entretien avec le Pr Pierre Marès, gynécologue obstétricien, service de Gynécologie-obstétrique-maternité, (Hôpital Universitaire Carémeau, Nîmes), suite à une intervention organisée par les Laboratoires Pierre Fabre aux Entretiens de Bichat (8-10 octobre 2015) intitulé « Risque cardiovasculaire et contraception, conséquences et  recommandations 3 ans après la « crise » des pilules de 3ème génération ».