Les médicaments contre le rhume, soupçonnés de provoquer des accidents vasculaires !

La majorité des médicaments contre le rhume contiennent de la phénylpropanolamine, une substance décongestionnante, certes efficace pour empêcher le nez de couler, mais accusée d'être responsable d'effets secondaires rares mais graves, particulièrement des hémorragies cérébrales. L'innocuité de cette molécule ayant été mise en doute par une étude américaine publiée en décembre 2000, les Etats Unis l'ont immédiatement interdite. Pourtant, en France, comme ailleurs en Europe, les médicaments contenant de la phénylpropanolamine restent en vente libre et même si le nombre d'utilisateurs n'est pas connu avec précision, il est de l'ordre de plusieurs milliers chaque année (Actifed jour et nuit, Humex Fournier gélule, Rinurel, Rinutan, Denoral comprimé, Rupton gélule, Triaminic …). Pourquoi ?

La phénylpropanolamine, dite également noréphédrine, est une substance voisine de l'amphétamine, ayant un effet vasoconstricteur et donc une action décongestionnante. Utilisée depuis des décennies dans de nombreuses spécialités médicales pour traiter les symptômes désagréables du rhume, une étude américaine publiée en décembre 2000 a jeté un doute sur son innocuité. Accusée de provoquer des accidents vasculaires cérébraux, l'Agence américaine de sécurité sanitaire (FDA) l'a immédiatement prohibée. Précisons qu'Outre-Atlantique, elle était également incorporée, jusqu'à son interdiction en novembre 2000, dans certains médicaments pour maigrir, en raison de son effet coupe-faim.

Des accidents vasculaires cérébraux graves, mais rares

Ainsi, entre 1969 et 1991, 22 cas d'hémorragies cérébrales ont été rapportés par la FDA chez des personnes venant de prendre de la phénylpropanolamine, dont 16 par l'intermédiaire de médicaments pour maigrir et 6 par l'intermédiaire de produits contre le rhume. Pour s'assurer d'un lien réel entre cette molécule, très répandue (des dizaines de milliers d'Américains en prennent chaque année) et ces accidents graves, mais cependant rares, une étude d'envergure a été lancée en 1992. Plus de 700 sujets âgés de 20 à 49 ans ayant souffert d'une hémorragie cérébrale ont été comparés à 1.400 témoins en bonne santé. Globalement, le risque d'accident vasculaire est multiplié par 1,49 par la prise de phénylpropanolamine, sous forme d'anorexigène ou de médicaments contre le rhume, et par 1,23 si l'on ne considère que les produits contre le rhume. Les preuves sont donc suffisantes et les auteurs estiment qu'entre 200 et 400 cas d'hémorragies cérébrales chaque année auraient été la conséquence de cette substance ! C'est ainsi que les Etats Unis ont décidé d'interdire la vente de médicament contenant cette molécule, rapidement imités par le Canada, la Chine et le Brésil.

Le positionnement de la France : pas d'urgence !

Toujours autorisée en France, comme dans toute l'Europe, l'Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé (AFSSAPS) étudie actuellement ce dossier, mais estime qu'il n'y a pas d'urgence. Elle a cependant rappelé un certain nombre de recommandations concernant ces médicaments, demandant notamment de respecter les posologies et de ne pas les utiliser par exemple en cas d'hypertension ou d'antécédents de convulsions. Alors pourquoi ne pas les interdire ? Trois raisons principales ont été évoquées. En premier lieu, une réévaluation des études américaines, qui devrait être close en juillet prochain, est indispensable. Ensuite, si l'on supprime ces produits, ils seront remplacés par des médicaments contenant d'autres vasoconstricteurs, possédant eux aussi leurs propres effets secondaires. Et enfin, les produits contre le rhume vendus sans ordonnance représentent un marché considérable ! Pourtant, rappelons que le rhume est une affection qui guérit spontanément. C'est-à-dire que les spécialités médicamenteuses ne servent qu'à alléger les symptômes sans même réduire leur durée.

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Source : New England Medicine, 21 décembre 2000.