Des virus pour combattre le cancer

Ils ne s'attaquent pas aux cellules saines de l'organisme. Ils infectent uniquement les cellules cancéreuses et les détruisent. Ce sont les virus oncolytiques, des virus qui pourraient devenir de redoutables armes anti-cancer.

Un virus contre le cancer ?

Un virus qui sauve déjà la vie de millions d'enfants pourrait devenir une nouvelle arme contre le cancer. Ce virus est celui que l'on utilise pour vacciner contre la rougeole, une version vivante, mais " atténuée " du virus à l'origine de la maladie infantile. " Il existe des virus qui vont préférentiellement infecter les cellules cancéreuses. C'est notamment le cas du virus du vaccin contre la rougeole " explique Marc Grégoire, directeur de recherche à l'Institut de recherche thérapeutique de l'université de Nantes. " Ces virus pénètrent dans les cellules cancéreuses et provoquent leur destruction " poursuit le chercheur. On parle de virus " oncolytiques ".

Financés par l'ARC*, Marc Grégoire et son équipe ont commencé à s'intéresser à ces virus à la suite d'une discussion avec un chercheur de l'Institut Pasteur de Paris, Frédéric Tangy. L'équipe nantaise venait de découvrir que de nombreuses cellules cancéreuses présentaient à leur surface une quantité inhabituelle d'une protéine nommée CD 46. Le chercheur parisien savait quant à lui que le virus atténué du vaccin contre la rougeole avait justement besoin de cette protéine pour infecter les cellules humaines. De là est née l'idée d'utiliser ce virus pour détruire les cellules cancéreuses.

Les autres virus oncolytiques

D'autres virus oncolytiques existent et il est même possible d'en fabriquer de nouveaux en modifiant des virus existants pour qu'ils acquièrent les propriétés nécessaires. La souche virale du vaccin contre la rougeole présente toutefois de gros avantages : utilisé depuis la fin des années 60 pour vacciner chaque année des millions d'enfants, la sécurité de son administration n'est plus à prouver. Par ailleurs, ce virus possède une activité antitumorale " bonus " : il va non seulement provoquer la destruction des cellules tumorales qu'il infecte, mais il va en même temps activer les cellules du système immunitaire du patient pour qu'elles s'attaquent elles aussi à la tumeur. " La destruction des cellules cancéreuses par le virus conduit à la production de signaux de danger qui sont reconnus par le système immunitaire " explique Marc Grégoire. " Une réponse immunitaire spécifiquement dirigée contre les cellules tumorales se met alors en place. Certaines données suggèrent qu'il y aurait même production de cellules immunitaires mémoires ". Si tel est bien le cas, le virus du vaccin contre la rougeole pourrait non seulement détruire les tumeurs, mais aussi éviter les rechutes : dès qu'une tumeur réapparaîtrait dans l'organisme, les cellules immunitaires mémoires s'y attaqueraient. Ce dernier point reste cependant à vérifier et les Docteurs Grégoire et Tangy s'y emploient activement.

L'utilisation de ce virus et d'autres virus oncolytiques est d'ores et déjà testée dans le cadre d'essais cliniques, en particulier à la Mayo Clinic de Rochester (Minnesota, Etats-Unis). Les résultats des essais américains ne sont pas encore publiés mais, selon Marc Grégoire, ils seraient plutôt encourageants. Les virus testés à la Mayo Clinic permettraient à ce jour de traiter de nombreux types de cancer, tels que des myélomes, des gliomes, des glioblastomes, des carcinomes ovariens ou encore des cancers du sein. " Nous travaillons sur le modèle du mésothéliome [cancer de la plèvre], mais nous songeons aussi à tester cette approche sur les mélanomes et des cancers du poumon. Le système de base est prêt. Il reste encore beaucoup de détails à valider, mais l'utilisation antitumorale de virus oncolytiques comme celui du vaccin contre la rougeole pourraient démarrer dans un futur peu éloigné ".

* Marc Grégoire et son équipe ont reçu en 2008 une subvention de 50 000 € pour ce projet de recherche.

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Source : Accédez au site de Fondation ARC pour la recherche sur le cancer en cliquant ici