Le point G, c’est dépassé ?

Plus de trente ans ont passé mais le point G, ce "bouton" qu’il suffirait de stimuler pour procurer à coup sûr plaisir et orgasme, n’a jamais pu être localisé précisément chez la femme. En réalité, ce serait plutôt une zone floue débordant sur les territoires anatomiques de l’urètre, du vagin et du clitoris. Ne dites plus "point G". Dites "complexe clitorido-urétro-vaginal".  
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Le point G. G comme…

Gräfenberg. Ernst de son prénom. Dans les années 1950, il fut le premier à décrire la sensibilité particulière d’une région vaginale. Selon lui, cette sensibilité était probablement liée à l'urètre, ce mince canal qui vide la vessie. Au début des années 80, cette zone sera surnommée point G en son honneur et située sur la face antérieure du vagin. Au passage, l'urètre féminin -peut-être parce qu’il n’a rien de glamour- sera oublié.

Le "point G" fait vendre. La recherche de cet endroit "miracle" deviendra une mode et les chercheurs tenteront de cartographier une structure anatomique isolée et hypersensible.

En vain. Régulièrement, des publications scientifiques sortent à ce sujet, prétendant avoir trouvé le Graal, mais leur méthodologie est souvent faible. Comme celle-ci, récente, qui décrit sa localisation au millimètre, intitulée (1) "Anatomie du point G : une nouvelle découverte" et parue dans une revue scientifique de renom. Il faut savoir cependant que les chercheurs ont observé leur "découverte" à partir de l’autopsie d’une unique femme de 83 ans…

C’est pourquoi, tout récemment, ne sachant pas vraiment quelles régions vaginales sont réellement stimulées pour procurer du plaisir, les scientifiques l’ont rebaptisé "complexe clitorido-urétro-vaginal" et même "clitorido-urétro-prostato-vaginale" pour certains, car recouvrant des zones à la fois vaginales, clitoridiennes mais aussi et (surtout ?) urétrales et prostatique pour certaines femmes.

Le point G : entre vérité scientifique et revendications sexuelles féminines

L’évolution considérable de la sexualité de la femme ces trente dernières années s’est construite en partie sous la bannière du "Point G". D’où les levers de bouclier lorsque des chercheurs ont osé remettre en cause l’existence d’une zone précise et circonscrite. Loin d’eux pourtant l’intention de remettre en cause le plaisir féminin lui-même !

Dr Pierre Desvaux, andrologue et sexologue (Département d’Urologie, Hôpital Cochin, Paris) : « L'une des premières à contester le point G fut Andrea Burri, une chercheuse spécialisée en génétique des comportements (2)[PD2] . D’après ses essais récents sur de vraies jumelles, qui étaient sensées ressentir exactement la même localisation de ce point G, elle rejette l’idée d’une localisation anatomique unique et précise. D’autres études ont suivi. Très récemment, un rapport signé par des experts internationaux reconnus a préféré botter en touche, faute de données fiables de niveau scientifique correct ».

Cette commission a statué en 2012 (3), produisant une conclusion très "diplomatique". La voici : « Des études ont montré que la majorité des femmes croie que le point G existe réellement mais elles ne sont pas toutes en mesure de le localiser. Les études d’imageries ont été incapables de démontrer la présence d’une entité unique autre que le clitoris. Les mesures objectives n’ont pas réussi à fournir une preuve forte et cohérente de l’existence d’un site anatomique qui pourrait être lié à l’existence du point G. Toutefois, les rapports fiables et les témoignages anecdotiques de l’existence d’une zone très sensible de la paroi antérieure distale du vagin soulève la question de savoir si tous les moyens ont été utilisés pour rechercher la présence de ce point G ».

Quelques mois après, les scientifiques ont consensuellement débaptisé le point G (structure anatomique précise) au profit du terme de "complexe clitorido-urétro-vaginal".

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Source : (1) J Sex Med 2012;9:1355–1359; (2) J Sex Med 2010;7:1842–1852; (3) J Sex Med. 2012 Mar;9(3):719-26; (4) J Sex Med 2008;5:1883–1891
D’après un entretien avec Dr Pierre Desvaux, andrologue et sexologue (Département d’Urologie, Hôpital Cochin, Paris)