Contrôler le diabète ou prendre du poids : faut-il choisir ?

"Glycémie bien contrôlée, prise de poids assurée". Souvent, bien gérer le diabète et notamment le diabète de type 2 se fait au prix de quelques kilos en plus. Voici quelques conseils pour faire mentir cet adage.
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« Diabesité » : quand le surpoids et le diabète sont intimement liés

La progression du diabète de type 2 en France suit très fidèlement celle de l’obésité. Si toutes les personnes obèses ne seront pas diabétiques, le diabète de type 2 apparaît la plupart du temps chez des personnes en surpoids, sur un terrain génétique favorisant. En effet, l’obésité abdominale (androïde) est tout particulièrement responsable de l’apparition du diabète de type 2.

La graisse viscérale exerce un effet néfaste au niveau du foie induisant une insulinorésistance (résistance des tissus à l’action de l’insuline), ce qui nécessite une augmentation de la production pancréatique d’insuline pour contrôler la glycémie (taux de sucre dans le sang). Lorsque le pancréas n’est plus capable de répondre à cette demande accrue, la glycémie s’emballe et les personnes passent de l’état d’obèse à celui de diabétique.

D’où l’intérêt de contrôler la prise de poids pour ne pas accentuer la gravité et le déséquilibre du diabète. Un problème épineux car bien contrôler le diabète expose à la prise de poids.

Pourquoi mieux soigner son diabète fait-il prendre du poids ?

Comment contrôler l’équilibre glycémique sans que les personnes diabétiques de type 2 ne prennent du poids, alors même que les trois-quarts d’entre eux sont déjà en surpoids ?

Ce problème est très délicat à gérer car le fait d’équilibrer le diabète limite les pertes caloriques induites par la glycosurie (perte de glucose via les urines). Cela explique que lorsque les glycémies sont bien contrôlées, la personne diabétique de type 2 puisse prendre du poids sans même modifier son alimentation.

Le paradoxe du contrôle de la glycémie dans le diabète de type 2 tient aussi au fait que le traitement -médicaments antidiabétiques oraux et insuline- induit très fréquemment une prise de poids:

  • La metformine, traitement de première ligne du diabète de type 2, n’entraîne pas de prise de poids. Il en est de même pour une autre classe de médicaments (inhibiteurs des alpha-glucosidases). *
  • En revanche, d’autres médicaments (sulfamides) qui forcent le pancréas à secréter de l’insuline, peuvent entraîner une prise de poids de l’ordre de 2 à 3 kg à 6 mois et parfois bien au-delà. Là, le facteur "poids" devient prépondérant. Une autre classe de médicaments par voie orale (les glinides) entraînent une prise de poids (entre 1,77 et 2,08 kg) *.
  • L’insuline est bien connue pour faire prendre des kilos (environ 5 kg dans le diabète de type 1 et 4-7 kg dans le diabète de type 2), d’autant plus nombreux que la dose d’insuline journalière est élevée. Or, plus la personne diabétique de type 2 est obèse, plus les doses d’insuline nécessaires pour contrôler sa glycémie seront importantes. Un cercle vicieux.
  • Deux classes médicamenteuses -les plus récentes- sont intéressantes dans la prise en charge du surpoids dans le diabète. Les premiers sont plutôt neutres sur le poids (inhibiteurs des DPP-4). Les seconds permettent chez une partie des diabétiques de type 2 une perte de poids, en moyenne de 2 à 4 kg (analogues du GLP1). Ils ralentissent la vidange de l’estomac et limitent l’appétit.

Le dernier élément pouvant faire prendre du poids est lié aux hypoglycémies (taux sanguin de sucre trop bas) sous certains médicaments par voie oral et sous insuline, en raison des prises de glucides en collation pour normaliser le taux de sucre dans le sang qu’elles nécessitent ("resucrage"). Des hypoglycémies légères et qui passent inaperçues augmentent aussi l’appétit.

De plus, certaines personnes réduisent ou cessent l’activité physique du fait de malaises hypoglycémiques. Au lieu d’en parler au médecin pour qu’il réduise les doses de certains médicaments et d’insuline, elles vont prendre alors des collations... et du poids.

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Source : * JAMA 2010 ; 303 : 1410-1418.
D’après un entretien avec le Pr Bernard Bauduceau, Service d’endocrinologie, HIA Bégin (Saint-Mandé).