Cardiovasculaire : finie l'ordonnance à rallonge, à quand la pilule tout en un ?

On commence à très bien connaître les facteurs de risque cardiovasculaire (tabagisme, excès de cholestérol, tension artérielle élevée…) et on prescrit de plus en plus, non pas un seul médicament, mais une association de quatre spécialités pharmaceutiques. Ne pourrait-on pas envisager de les regrouper dans un seul comprimé ?

Les données concernant l'accident cardiovasculaire sont aujourd'hui bien documentées. Soulignons d'ailleurs, la publication très récente d'une grande étude démontrant que 90% des infarctus du myocarde peuvent être prévenus sur la base de neuf facteurs de risque modifiables (tabagisme, diabète, cholestérol, hypertension artérielle, obésité abdominale, sédentarité, apports insuffisants en fruits et légumes, consommation excessive d'alcool et stress). Ainsi, arrêter de fumer diminue des deux tiers le risque de survenue d'un nouvel accident, la réduction du mauvais cholestérol le diminue de 61% et la baisse des chiffres tensionnels de 30 à 60%. On sait également que le risque chute de 70% avec un traitement associant bêtabloquant, aspirine, inhibiteur de l'enzyme de conversion (IEC) et statine.

C'est ainsi qu'aujourd'hui, cette polythérapie est devenue quasi-systématique chez les patients ayant fait un accident cardiovasculaire. Alors pourquoi ne pas insérer toutes ces molécules dans un seul comprimé ? La question fait actuellement débat. En effet, l'efficacité et la sécurité d'une telle « polypill » miracle sont controversées.

Certains spécialistes proposent de fabriquer une seule pilule combinant une statine, de l'aspirine et trois antihypertenseurs à faible dose (bêtabloquant, diurétique, IEC). Cette combinaison simplifierait la prise en charge pour le patient, mais également pour le médecin, sans oublier les économies substantielles.D'autres professionnels sont contre le fait d'associer systématiquement l'aspirine en raison des problèmes de tolérance rencontrés chez certains patients. D'autres encore suggèrent d'introduire uniquement une statine et deux antihypertenseurs à demi-dose.

On l'aura compris, la composition d'une telle pilule est encore loin d'être définie et de faire l'unanimité, tandis que nombre de professionnels s'inquiètent déjà du risque que pourrait représenter cette version « tout en un ». En effet, en facilitant considérablement la prescription, les consultations risquent de s'espacer au détriment du patient. De plus, les mesures hygiéno-diététiques, qui font partie intégrante du traitement, pourraient être occultées.

La discussion reste ouverte en attendant de meilleures données pharmacologiques et de nouveaux essais cliniques dans ce domaine.

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Source : The Lancet, S. Yusuf, septembre 2004 ; Law M.R. et coll., BMJ, 326 : 1407-1408, 2003 ; Le Quotidien du médecin, 24 septembre 2004.